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Programme de sauvegarde de la nation algérienne , 1re partie
Publié dans El Watan le 11 - 06 - 2016

Elle propose une méthodologie pour assurer la réussite de la réalisation d'un programme de sauvegarde de la nation algérienne.
Elle est structurée en trois grandes composantes : une première composante qui pose le diagnostic de la situation interne, les perspectives d'avenir de la nation algérienne et celles de l'environnement international et de ses influences inévitables sur notre société afin de démontrer de façon convaincante la nécessité du changement du système de gouvernance pour pouvoir nous y adapter et en profiter ; une deuxième composante qui propose une feuille de route de la mobilisation pacifique pour le changement du système de gouvernance ; une troisième composante consacrée à la feuille de route de la mise en œuvre du programme de sauvegarde.
Situation actuelle et perspectives d'avenir de la nation algérienne
Pour déterminer les perspectives d'avenir d'un pays, il suffit d'analyser la nature du pouvoir qui le dirige et les conséquences de sa gouvernance sur l'Etat, la situation des populations et la projection dans le futur de son économie et de son environnement international.
La nature du pouvoir algérien se caractérise par l'autoritarisme, le patrimonialisme et le paternalisme.
L'autoritarisme, c'est le refus de tout contre-pouvoir. Il consiste à vous dire : «vous êtes avec moi en applaudissant, sinon vous êtes contre moi et je fais tout pour vous faire taire». Alors, et inévitablement, le pouvoir est très peu informé sur la situation réelle du pays, il s'en détache progressivement au point de ne plus en contrôler les ressorts essentiels.
Le paternalisme, c'est l'omniprésence d'un «chef» qui se comporte comme le père du peuple, avec qui il doit rester en contact direct sans interface aucune. Il considère que les institutions de gouvernance de l'Etat sont des intermédiaires qui gênent sa relation avec son peuple. Alors, il fait tout pour les affaiblir et les cantonner dans un simple rôle de figuration et de trompe-l'œil.
Un régime patrimonialiste est un régime qui bénéficie d'une rente confortable qui rassemble autour du «chef» une faune de courtisans prêts à se distinguer par leur zèle dans l'allégeance et à s'assurer ainsi toutes sortes de gratifications. Pour sa part, la société dans son ensemble demeure écartée des préoccupations du sommet, ses problèmes n'étant guère pris en considération. D'où l'important gap entre gouvernants et gouvernés. Dans la situation de l'autoritarisme, du patrimonialisme et du paternalisme, qui ont été érigés en système de gouvernance dans notre pays, le pouvoir devient défaillant et sa gestion chaotique, et ruineuse pour la société.
La rente et la prédation dans l'utilisation des ressources mènent vers la corruption de l'argent.
La défaillance du pouvoir et la corruption de l'argent mènent vers la déliquescence de l'Etat.
Un Etat déliquescent se caractérise par : la généralisation de la corruption et la kléptocratie ; l'institutionnalisation de l'ignorance et de l'inertie ; le culte de la personnalité ; la centralisation du pouvoir de décision entre un nombre réduit d'individus au lieu et place des institutions habilitées ; l'émiettement du pouvoir entre les différents clans à l'intérieur du système.
Ces critères de définition d'un Etat déliquescent sont apparents dans le mode d'exercice du pouvoir et dans l'ensemble des activités de l'Etat en Algérie, notamment dans le naufrage de l'école ainsi que celui des universités ; les faux diplômes et les notes de complaisance qui donnent accès aux universités mettant sur le marché du travail des cadres inaptes à gérer, à diriger, ni à concevoir ou soigner.
La kléptocratie se définit comme la caractéristique d'un système politique où la haute hiérarchie du pouvoir utilise la corruption à grande échelle pour son enrichissement illicite, notamment à travers l'accaparement de la rente dégagée des exportations des hydrocarbures.
Pendant ce temps, la population connaît quant à elle cinq grands maux : la perte de la morale collective ; la violence qui devient l'instrument privilégié de règlement des conflits entre les individus, entre les groupes d'individus et entre les groupes d'individus et l'Etat ; la généralisation de la corruption ; l'indifférence et le fatalisme.
Le crépuscule de la rente et de la prédation s'annonce à l'horizon. Il est inscrit dans une politique budgétaire très fortement expansionniste et laxiste, au moment même où le pays enregistre une baisse tendancielle de la production et une augmentation notable de la demande nationale de l'énergie, ce qui débouche sur une forte baisse des exportations d'hydrocarbures. Ces exportations en volume qui ont enregistré une baisse de 25,6% entre 2006 et 2011 ont connu une autre baisse de 10% en 2012 par rapport à 2011 et continuent à baisser jusqu'à ce jour. Malgré cela, nous enregistrons une augmentation importante des dépenses budgétaires financées sur la fiscalité pétrolière.
Effectivement, le prix d'équilibre budgétaire du baril est passé de 34 dollars en 2005 à 115 dollars en 2011 et 130 dollars en 2012.
Quel a été le comportement des autorités budgétaires après ce renversement de situation dans les recettes ? Ce comportement s'est
paradoxalement caractérisé par plus de laxisme, puisque le budget de fonctionnement de 2011 était en augmentation de 47% par rapport à celui de 2010.
C'était une façon d'élargir le cercle des courtisans après les événements de janvier 2011 ! Cette augmentation était de 23% en 2012 par rapport à 2011 ! Ainsi, lorsque les prix des hydrocarbures à l'exportation ne suffisent pas pour couvrir les dépenses budgétaires, on se comporte avec plus de laxisme que lorsqu'ils étaient supérieurs aux prix d'équilibre !
Après la baisse durable des prix des hydrocarbures à l'exportation survenue dès le deuxième semestre 2014, passant de 115 dollars/baril en juin 2014 à 30 dollars en début 2016, les autorités compétentes ont annoncé dans l'urgence, la fébrilité et la précipitation une politique d'austérité budgétaire.
Lorsque nous comparons les résultats budgétaires du 1er semestre 2015 par rapport au 1er semestre 2014, nous constatons que la valeur des recettes des exportations a baissé de -47% par l'effet de la baisse des prix et -4,57% par l'effet de la baisse des quantités.
Nous sommes bien installés dans une longue période de baisse des prix et des quantités. Face à cette baisse des recettes, il a été enregistré durant cette même période une augmentation des dépenses budgétaires de +7,8% avec 158
milliards DA d'augmentation des dépenses de fonctionnement.
En réalité, la politique d'austérité a été réalisée dans l'augmentation des prix de consommation des produits alimentaires importés du fait de la baisse administrée du taux de change du dinar par rapport au dollar.
Cette baisse durable de la rente touchera certes les prédateurs, mais elle n'épargnera pas le reste de la population qui devra vivre avec des prix non subventionnés des politiques sociales restrictives à l'école, à l'hôpital, à la retraite… ainsi que des réalisations d'infrastructures en diminution importante. De même, des pénuries de marchandises sur le marché par la baisse des importations et notre dépendance alimentaire.
Le volume des exportations algériennes d'hydrocarbures continuera à baisser du fait de la forte hausse de la consommation interne d'énergie de source fossile ; de la baisse de production à cause du départ notable du personnel qualifié de Sonatrach et du moindre intérêt des compagnies étrangères dans l'exploration, la recherche et le développement. Les prix ne connaîtront pas de hausse notable durant la prochaine décennie à cause du rythme d'augmentation de l'offre mondiale supérieure à celui de la demande. D'où l'offre excédentaire et la pression sur les prix à la baisse.
La forte augmentation du rythme de croissance de l'offre, conséquence d'une plus grande maîtrise dans l'exploitation des sources non conventionnelles d'énergie, pétrole et gaz de schiste. Le retour de certains pays dans la production de l'énergie conventionnelle, l'Iran notamment, a induit chez les pays producteurs de pétrole membres de l'OPEP l'orientation d'une politique de parts de marché et non de prix.
La faible augmentation du rythme de croissance de la demande à l'extérieur s'explique par la transition des économies vers les Technologies de l'information et de la communication (TIC) moins gourmandes en énergie ; une rationalisation de la consommation des énergies de source fossile dans les pays consommateurs et une faible croissance de l'économie mondiale dont celle principalement de la Chine qui est passée d'un taux à deux chiffres à celui de 6,7%.
Il faut noter que le prix d'équilibre du Budget de fonctionnement (BF) se situait à 70 dollars le baril en 2011. Cela signifie qu'avec les prix actuels entre 30 et 40 dollars, l'endettement envisagé par le gouvernement irait financer le déficit du Budget de fonctionnement ; contrairement à la bonne règle qui consiste à utiliser l'épargne pour le financement des équipements et non le fonctionnement.
situation de l'environnement international : relation entre technologie dominante et construction institutionnelle
A travers l'histoire, chaque fois qu'une nouvelle technologie a dominé l'activité humaine elle a apporté des transformations dans la construction institutionnelle de l'Etat, dans les élites gouvernantes et dans le comportement des populations.
Quelle est la logique de cette relation : nouvelle technologie – construction institutionnelle ?
La nouvelle technologie va impliquer une reconfiguration de tout le système productif. Il s'ensuit des changements dans le mode de consommation. D'où une inadéquation fondamentale des modes de gouvernance avec les nouvelles conditions. Alors, tensions politiques et sociales. D'où une crise d'ajustement qui appelle une redéfinition des facteurs de compétitivité. Alors, des changements institutionnels avec une nouvelle structure de l'Etat dans son ensemble, des nouvelles élites au pouvoir et de nouveaux comportements dans la société.
Sans aller loin dans l'histoire, nous pouvons constater que la domination de la technologie agricole s'est caractérisée par le féodalisme et le tribalisme au niveau de l'Etat, le pouvoir était entre les mains des élites guerrières et le comportement de la population se caractérisait par l'ignorance, le fatalisme et la superstition.
Avec la technologie industrielle, nous sommes passés, dans les pays du Nord, à l'Etat-nation encouragé par une alliance entre le capital et le syndicat pour affronter le féodalisme contrôlé par les élites guerrières. C'est aussi deux siècles d'une économie protégée à l'intérieur d'un territoire dont les frontières sont reconnues par les Etats voisins. Le pouvoir était entre les mains des élites bureaucratiques et administratives.
Le comportement de la population se caractérisait par l'attachement aux sciences et au progrès technologique ; de même que le concept victorien du progrès, à savoir le suffrage universel, la tolérance religieuse et les libertés individuelles.
Au Sud, c'était le colonialisme et l'accaparement des richesses naturelles pour l'approvisionnement des usines installées dans le Nord.
Alors que nous vivons depuis le troisième quart du XXe siècle le passage à la domination des Technologie de l'information et de la communication, il faut s'attendre à des changements au niveau de l'Etat, des élites au pouvoir et du comportement des populations. On parle déjà de la globalisation, de la glocalisation et du village global au niveau de l'Etat. Les élites financières semblent prendre de plus en plus de pouvoir. Le comportement des gens est conditionné par le village global.
Ainsi, l'environnement international offre des opportunités, mais aussi des menaces.
Opportunités et menaces du progrès technologique
Les opportunités du progrès technologique sont inscrites dans l'expansion rapide du capital scientifique mondial. Il double en moins de sept ans. Cela signifie que tout ce que l'humanité a accumulé comme capital scientifique depuis l'arrivée de l'être humain sur Terre jusqu'à 2009, elle accumulera son équivalent entre 2010 et 2016. Les prévisions citent un doublement de ce capital tous les 70 jours en 2035 ! Sans parler de l'Université de l'Abondance dans la convergence des travaux entre la faculté, les laboratoires de recherche et les entreprises.
De même, la convergence entre les nanotechnologies, les biotechnologies, les technologies de l'information et de la communication et les sciences cognitives (convergence NBIC), avec pour objectif de produire d'ici 2050 des cellules intelligentes qui surpassent l'intelligence humaine.
Le monde est entré de plain-pied dans l'économie du savoir, «une économie qui assure une utilisation effective du savoir pour la réalisation du développement économique et social», définition proposée par la Banque mondiale.
C'est une économie qui s'appuie sur quatre piliers : la promotion économique et la construction institutionnelle, la qualité du système d'enseignement, la place accordée à l'innovation dans la relation, entreprise, université et capital, la Technologie de l'information et de communication en production et en consommation.
Pendant ce temps, en déphasage total avec ces rapides bouleversements, nos élites et nos responsables des réformes de l'enseignement discutent dans la stérilité du remplacement de l'arabe classique par l'arabe dialectal durant les deux premières années de l'enseignement primaire !
Cependant, si le progrès technologique offre des opportunités, il comporte également des menaces.
Il s'agit de la globalisation, de la glocalisation et du village global.
La globalisation est un grand programme publicitaire lancé partout dans le monde par les occidentaux pour unifier le mode de consommation et de loisirs de tous les habitants de la planète sur le modèle occidental. Il s'agit de faire du monde un marché global pour la production occidentale, américaine, notamment.
Nous entrons dans les trente prochaines années dans une compétition féroce entre les trois grandes économies que sont la Chine, l'Inde et les Etats-Unis d'Amérique, qui se classent dans les trois premières positions mondiales en 2014 par le PIB en parité de pouvoir d'achat : Chine, Etats-Unis, Inde, dans l'ordre de classement.
La compétition chinoise se construit sur des coûts de production bas, avec pour conséquence des prix très compétitifs, de même qu'un marché intérieur en très forte expansion. Le revenu par habitant en Chine est passé de 941 dollars US en 2000 à 7589 dollars US en 2014, soit une augmentation de 800% !
La compétition indienne se construit sur une qualification élevée des ingénieurs dans les secteurs des TIC et des services. Déjà, plus des deux tiers de la création mondiale annuelle de richesse se fait dans les services.
La compétition américaine se construit sur une demande mondiale élevée pour les produits et services de ce pays grâce au programme publicitaire de la globalisation.
La glocalisation. Il s'agit de faire disparaître l'Etat national, en le morcelant en petits Etats dans le cadre de réseaux d'alliances régionales. Pour notre région, c'est le Grand Moyen-Orient qui est proposé. Les exemples du Soudan, de l'Irak, de la Syrie, du Yémen sont à méditer à ce sujet. La situation en Libye présente un danger imminent sur la sécurité de nos frontières. Il faut s'en préoccuper sérieusement.
Le village global. C'est la capacité d'influence sur les individus et les groupes d'individus par les systèmes de communication de masse qu'offrent les réseaux sociaux. On parle déjà de la «dictature scientifique».
Comme il est aisé de le constater, pour se protéger contre les menaces et profiter des opportunités du progrès technologique, nous avons besoin d'un autre mode de gouvernance et d'un autre profil de dirigeants.
Si nous n'avons pas pu bénéficier des bienfaits de l'avènement de la Révolution industrielle parce que nous étions sous occupation coloniale, nous ne devons pas rater l'avènement de la Révolution des Technologies de l'information et de la communication.
La feuille de route pour la mobilisation
Comme cela a été présenté auparavant, la réalité de l'Algérie d'aujourd'hui et plus encore celle de demain se caractérise par un Etat déliquescent, une société malade et une économie vulnérable, volatile, dépendante, en déficit de moyens de financement. Autrement dit, un pays ouvert à tous les dangers. Cette situation est due au système de gouvernance actuel, obsolète et en déphasage total avec sa société autant qu'avec le monde extérieur, d'où la nécessité du changement du système de gouvernance responsable de cette situation pour parer aux menaces, profiter des opportunités et construire l'Algérie de l'espoir.
Il faut bien noter que la vraie transition démocratique ne pourra commencer qu'au lendemain de la chute du régime.
Il faudra, alors, mettre de l'ordre dans l'espace politique, parce que l'on passera de la peur du connu à la peur de l'inconnu.
D'où l'urgente nécessité de la mobilisation pacifique des masses pour la construction d'une autre culture politique fondée sur le pluralisme, la gestion des conflits par le dialogue et la concertation et la prise en charge des divergences.
Donc, le travail de mobilisation consiste à préparer la société et les acteurs de la période de transition afin de leur donner les moyens pour s'engager à la réalisation datée avec un système de contrôle à la mise en œuvre d'un programme politique qui pourrait comprendre, à titre indicatif et sans être exhaustif, les actions suivantes :
1)- s'attaquer aux questions essentielles de construction d'un Etat moderne et fort de ses institutions face au patronage sponsorisé du régime ;
2)- renforcer l'Etat de droit par la promotion d'un véritable pouvoir judiciaire indépendant ;
3)- promouvoir dans un cadre légal les initiatives qui assurent l'opportunité d'indépendance financière des citoyens et des associations par rapport à l'Etat ;
4)- encourager la lutte contre la corruption et le gaspillage des ressources (capital humain et hydrocarbures en premier lieu) ;
5)- promouvoir une décentralisation du pouvoir de prise de décision économique et un développement régional intégré ;
6)- encourager la coopération entre les partis politiques de l'opposition et les éléments dynamiques de la société civile ;
7)- réduire sensiblement le gap qui sépare gouvernants et gouvernés grâce à la mise en place d'un vaste programme de bonne gouvernance, à savoir la voix et l'imputabilité (accountability en anglais, mousaala en arabe) ; la stabilité politique et l'absence de violence ;
l'efficacité et la capacité du gouvernement dans l'accomplissement de ses missions ; la primauté du droit et le contrôle de la cooptation. Les préalables sont : la promotion d'une large mobilisation collective pour assurer le succès aux décisions fondamentales initiées ; la mise en place des outils et des mécanismes indispensables à la réalisation de l'objectif défini ; la sécurisation du processus de changement contre toute pratique de régression ou de statu quo.
Pour ce faire, il semble qu'un partenariat politique, à finalité démocratique qui prône la libération de la société du système de gouvernance actuel, est inéluctable. Un partenariat fondé sur une stratégie, un organigramme et des tâches planifiables. Pour arrêter le processus de mise en œuvre de la stratégie, il faudrait intérioriser très fortement la nécessité du changement du système de gouvernance pour s'engager sérieusement et durablement dans une transition démocratique négociée, réussie et sans violence. Le premier pas est d'envisager pour les étudier les différents scénarii possibles du changement.
A cet effet, quatre d'entre eux sont possibles : le changement mené de l'intérieur du pouvoir en place ; le changement négocié par le pouvoir en place avec l'opposition et les parties prenantes à forte influence sur le cours des événements ; le changement suite à l'explosion sociale dans la rue ; le changement après un coup d'Etat militaire. Le changement mené de l'intérieur du pouvoir n'est pas prévisible du fait de l'émiettement des clans à l'intérieur du pouvoir et de l'absence de stratégie de sortie de crise chez les différents pôles de prise de décision.
Ces derniers ne sont guidés que par la prédation autour de la rente qui sera en amenuisement continu. Le changement après un coup d'Etat portera sur les personnes et non sur le système de pouvoir. Il est donc à rejeter. Reste le changement négocié ou à la suite d'une explosion sociale. Dans les conditions actuelles et prévisibles à moyen terme, l'explosion de la rue à l'ombre des difficultés matérielles qui s'annoncent, augurant d'un niveau de vie décroissant des populations, demeure le scénario le plus probable.
D'où la nécessité de travailler pour une mobilisation massive de la population et des parties prenantes pour un changement négocié, dans les meilleurs délais, afin d'éviter l'explosion fatale pour les tenants du pouvoir et pour la population. Il faut bien considérer qu'avec l'explosion de la rue, ce sont les maux actuels dans la société ainsi que l'influence des réseaux sociaux qui définiraient les comportements des émeutiers ; d'où la forte probabilité de : l'avènement du communautarisme autour des questions de langues, de religions et de régionalisme ;
l'avènement du grand banditisme, et donc de l'insécurité généralisée ; l'élargissement de la corruption et de la prédation ; les méfaits de la perte de la morale collective : vol, alcoolisme, drogues, violence, prostitution ; la quasi disparition des institutions de l'Etat et bien d'autres maux, à l'image de ce qui se passe en Syrie, en Irak, en Libye, au Yémen…
Face à ce scénario catastrophe qui n'est souhaitable par personne, reste l'option du changement négocié, lequel cependant fera apparaître, fatalement, la volonté de s'accaparer du pouvoir par les différentes parties prenantes.
Il s'agit de divisions, d'oppositions et de données fiables qu'il faut prendre en charge lors de la confection du programme de changement.
Feuille de route de la mise en œuvre du programme de sauvegarde
Les tâches prioritaires pour atteindre cet objectif se classent en deux dimensions :
– la construction des institutions ; – l'amélioration du comportement individuel et collectif.
La priorité de la construction des institutions se réalisera en quatre chantiers :
– la refondation de l'Etat ;
– la refondation de l'école ;
– la refondation de l'économie ;
– la promotion des compétences nationales et la maîtrise de la numérisation.
La refondation de l'Etat concernera : une restructuration des administrations centrales, locales et aux frontières pour les mettre efficacement et effectivement au service du citoyen. Il s'agit des ministères et agences gouvernementales nationales, des wilayas, daïras et communes, des douanes, polices aux frontières et autres agents. Une administration tournée vers la satisfaction des besoins des citoyens. La fin de la corruption, du clientélisme et du régionalisme.
La garantie de la sécurité pour tous
Malgré la complexité de la violence qui dure depuis plus de vingt ans, la situation sécuritaire en Algérie ne relève d'aucun fatalisme et les solutions sont disponibles via un travail d'analyse approfondie et l'engagement de toutes les composantes de la société dans un large débat, sans oublier le travail de mise à niveau de l'Etat, de l'économie et de la société civile.
Pour faire face à la crise sécuritaire, l'administration restructurée mobilisera les meilleures de ses ressources pour panser les plaies, protéger les populations vulnérables, prévenir les conflits et reconstruire ce qui a été détruit, c'est-à-dire que le programme de sortie de crise sécuritaire doit s'appuyer sur les actions suivantes : panser, protéger, prévenir, reconstruire.
Une restructuration de l'administration judiciaire pour renforcer le droit de la défense et le principe de la présomption d'innocence ; garantir l'indépendance et la protection du juge ; mettre en place les moyens nécessaires à la mise en œuvre des décisions de justice. De même, le traitement équitable des citoyens, la protection des biens et des personnes. En un mot, le règne de la loi. Une modernisation de l'armée avec la définition d'une doctrine militaire adaptée à son époque et à ses réalités afin de répondre aux nouvelles exigences de sécurité nationale qui doivent garantir à la nation la protection contre toute atteinte à sa souveraineté, à la sécurité de ses citoyens, à son économie et à son indépendance.
Cette doctrine, réaliste et qui tiendra compte des capacités intrinsèques nationales qui devront être renforcées, sera basée sur l'élément humain en priorité ; ce qui garantira la maîtrise des techniques et des stratégies les plus modernes dans le domaine de la défense nationale. Une industrie militaire capable de donner à notre armée nationale les capacités nécessaires pour remplir ses missions sera également un élément important de cette vision.
Le choix pour une stratégie de défense et non de l'agressivité constituera un autre pilier de cette doctrine. Ce choix est de nature à mettre à l'abri le pays lorsqu'il sera soutenu par une diplomatie de bon voisinage, d'aide et de coopération avec les pays voisins au nord, à l'ouest, au sud et à l'est.
La sélection des fonctionnaires et des responsables politiques sera fondée uniquement sur le mérite, la compétence et l'intégrité. Des règles strictes et transparentes seront mises en place et une surveillance constante sera exercée sur les recrutements, les promotions et la signature des contrats et marchés publics. Des mécanismes permanents d'audit et de contrôle des différents agents de l'Etat et des institutions seront mis en place.
Faire de la presse un partenaire effectif dans la construction de l'Etat et la lutte contre la corruption. Assurer sa liberté, sans contrôle a priori, sauf le contrôle de la conscience professionnelle et la loi. Les objectifs de la refondation de l'école sont : une population bien formée et professionnellement compétitive ; une population avec un sens civique élevé et ouverte sur le monde ; une forte intégration avec le monde professionnel ; une infrastructure de recherche et d'innovation adaptée aux besoins du pays ; un espace de formation continue et de seconde chance ; un corps professoral performant et jouissant d'une pleine reconnaissance sociale ; une population totalement alphabétisée avec un socle de formation de base de qualité ; un haut niveau de qualification ; une capacité d'innovation permanente.

(A suivre)

Par Dr Ahmed Benbitou :
Ancien chef du gouvernement


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