L'affaire des magistrats faussaires revient devant les juges du tribunal d'Alger. Dix-huit ans après sa première comparution, le brave Benyoucef Mellouk, l'homme par qui le « scandale » est arrivé sera de nouveau à la barre, seul cette fois, sans le défunt journaliste Abderrahmane Mahmoudi, décédé entre-temps. Dix-huit ans depuis le jour où le ciel lui est tombé sur la tête parce qu'il a osé débusquer dans le maquis des faux moudjahidine, les magistrats qui s'y sont planqués depuis l'indépendance. Croyant « faire œuvre patriotique », il a toujours estimé, lui le « moussebel », avoir seulement répondu à l'appel des plus hauts responsables du pays pour écarter les usurpateurs de la qualité de moudjahid. Il était loin de se douter, en ces débuts des années 1990, qu'il allait lui et les siens, vivre un véritable calvaire, après avoir dévoilé une liste de magistrats faussaires provoquant un véritable séisme qui a ébranlé tout l'appareil d'Etat. Licencié de manière abusive, privé de ses droits les plus élémentaires comme celui d'avoir un passeport – qu'il n'a obtenu que récemment – après avoir été jeté en prison, l'homme a pratiquement été condamné à vivre en pestiféré, pire comme une bête traquée, seul contre tous avec à ses côtés quelques journaux indépendants qui ont médiatisé son combat contre le mensonge et la mauvaise foi. Jamais, sans doute, un harcèlement judiciaire n'aura été aussi tenace, de report en report, procès à huis clos, condamnation en l'absence du prévenu et de son avocat, toute une panoplie de procédés honteux a été déployée pour briser un homme et préserver l'honneur « usurpé » de quelques caciques du système. Très peu savent ce qu'a enduré Benyoucef Mellouk, aujourd'hui désabusé, plus d'une fois trahi par quelques satrapes qui lui ont promis que ses efforts ne seraient pas vains, que justice serait faite et les faussaires punis. Malgré ces déboires, il espère encore que son combat pour la vérité aboutisse ou tout au moins que l'on cesse de le considérer comme un criminel, alors qu'il n'a fait que son devoir de citoyen et de fonctionnaire soucieux de l'intérêt général, considérant que tous les faussaires avaient causé un immense préjudice financier à la collectivité nationale. Son plus grand souhait est de voir la justice « balayer devant sa porte » et donner l'exemple dans le cadre de cette campagne de moralisation et de lutte contre la corruption et la concussion.