Le secret semble bien gardé. Pourtant, il est quasi-certain que le président Caïd Essebsi ait en tête un nom, voire plusieurs, qu'il a déjà discutés avec Rached Ghannouchi, le leader des islamistes, pour s'assurer d'une majorité parlementaire confortable en faveur de la prochaine équipe. Ce n'est d'ailleurs pas par hasard que le leader d'Ennahdha a apporté son soutien absolu au projet de gouvernement d'union nationale, et ce, dès le lancement de l'initiative présidentielle, le 2 juin dernier. Ghannouchi s'est même permis de publier, la semaine dernière, un communiqué, signé de son nom, pour dire que les positions officielles du mouvement n'émanent que de lui ou du porte-parole, Imed Hammami. Le chef d'Ennahdha a ainsi vigoureusement riposté aux propos déplacés des dirigeants du mouvement, Abdelkrim Harouni et Abdellatif Mekki, concernant le profil du prochain chef de gouvernement. Harouni est président du Conseil de la choura, député et ancien ministre des Transports. Mekki est député, membre de la Choura et ancien ministre de la Santé. Les deux se sont produits dans les médias pour exprimer leur opposition à l'installation d'un des politiciens ayant travaillé avec Ben Ali à la tête du gouvernement. Pour Ghannouchi, toutes les options sont ouvertes concernant le prochain chef de gouvernement. «La Tunisie a besoin de toutes ses compétences. Ce n'est pas facile de trouver la personne capable de la sortir de sa crise», n'a-t-il cessé de dire. Choix restreints La situation socioéconomique difficile que traverse la Tunisie en ce moment fait que la principale tâche du prochain chef de gouvernement sera de trouver des solutions aux problèmes rencontrés par le pays. Les enjeux sont d'autant plus délicats que plusieurs tentatives ont été faites par des personnalités de notoriété internationale, depuis février 2014, dans les gouvernements de Mehdi Jemaâ et Habib Essid. Mais les résultats n'ont pas été à la hauteur, créant même la désillusion de larges couches de la population. En plus, après le revers cuisant au Parlement du chef de gouvernement démis Habib Essid à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), le prochain locataire de la Kasbah sait à quoi s'attendre de la part des instances et partis politiques en Tunisie. Habib Essid n'a obtenu que trois voix en faveur de son maintien sur les 211 députés présents sous la coupole du Bardo. Un camouflet qui n'a pas, semble-t-il, pareil dans le monde. Donc malgré un régime politique à facette mixte où la Constitution accorde même plus de pouvoir au gouvernement au détriment de la présidence de la République, la réalité est toute autre sous l'administration Caïd Essebsi, qui a désormais un droit de regard sur toutes les rouages de l'Etat. Le président de la République associe le leader d'Ennahdha dans les décisions importantes pour procurer le soutien requis à l'ARP. Mais, en se référant à ce qui est arrivé à Essid, le chef de gouvernement n'est vraiment pas libre dans ses manœuvres. Ceci n'empêche qu'il y a toujours des prétendants pour occuper le poste de chef de gouvernement. Néji Jalloul, l'actuel ministre de l'Education issu de Nidaa Tounes, est un prétendant sérieux, tout comme son collègue des Finances, Slim Chaker. Toutefois, le président de la République semble favoriser la piste d'une personnalité indépendante, ayant roulé sa bosse en économie politique. Là, le nom de Mohamed Fadhel Khelil, ancien ministre des Affaires sociales sous Ben Ali, de 1992 à 1996, émerge du lot. Il bénéficie du soutien de l'UGTT, la puissante centrale syndicale. Mais des doutes planent sur sa disponibilité à occuper le poste. Il a été récemment accueilli par le président de la République. Les heures à venir apporteront sûrement plus de détails sur le prochain locataire de la Kasbah.