Les Iraniens voteront demain pour accorder ou non un second mandat au président modéré, Hassan Rohani, et à sa politique d'ouverture sur le monde. Politique qui a suscité espoir et dépit. Le bilan du Président sortant est contesté par son principal adversaire, le conservateur Ebrahim Raissi, proche du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei. Elu dès le premier tour en 2013 avec 50,7% des voix, Hassan Rohani, réformateur, brigue un second mandat de quatre ans. L'ambition de Rohani, malgré l'hostilité américaine, est de poursuivre l'ouverture entamée grâce à la conclusion, en juillet 2015, d'un accord nucléaire avec les grandes puissances, dont les Etats-Unis. En échange de l'engagement à mener une politique nucléaire à des fins strictement civiles, Téhéran a obtenu une levée partielle des sanctions internationales qui entravaient le développement de l'économie. D'où une baisse de l'inflation, qui a reculé de près de 40% en 2013 à environ 9,5% aujourd'hui. Entré en vigueur en janvier 2016, l'accord nucléaire n'a pas attiré les investissements espérés pour relancer l'économie du pays et faire baisser le chômage. Le président Hassan Rohani tablait sur 50 milliards de dollars d'investissements étrangers par an, grâce à cet accord, afin d'atteindre une croissance de 8% permettant de résorber le chômage qui touche 12,5% de la population active. Il est loin du compte aujourd'hui. «Plus de 11 milliards d'investissements directs ont été enregistrés au niveau du ministère de l'Economie depuis janvier 2016, mais dans les faits, les investissements réalisés, c'est entre 1 à 2 milliards de dollars», a déclaré le 1er vice-président iranien, Es Hagh Jahanguiri. Il a également reconnu que les grandes banques européennes et asiatiques refusent toujours de coopérer avec l'Iran à cause du risque d'un retour des sanctions liées au nucléaire et «du climat de tension créé par Donald Trump». Cela dit, les exportations pétrolières ont atteint près de 2,8 millions de barils par jour, y compris les condensats de gaz. Ce qui a permis d'atteindre, selon le dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI), une croissance de 6,6% durant la dernière année perse (mars 2016-mars 2017). Les prévisions de croissance du FMI pour 2017-2018 sont à la baisse, à 3,3%, un taux largement insuffisant pour faire baisser le chômage et relancer l'économie. L'élection aux Etats-Unis de Donald Trump, qui ne cesse de dénoncer l'accord nucléaire, complique la tâche pour attirer les sociétés étrangères et les grandes banques internationales qui craignent des représailles américaines et de nouvelles sanctions. Le 21 avril, le président américain a accusé l'Iran de ne pas respecter «l'esprit» de l'accord, notamment par sa politique au Moyen-Orient, où Téhéran est accusé d'attiser les conflits et de soutenir des organisations «terroristes». Son secrétaire d'Etat, Rex Tillerson, a informé le Congrès américain du lancement d'une étude qui devra déterminer si l'allègement des sanctions envers l'Iran, prévu par l'accord, correspond à l'intérêt national des Etats-Unis. De Khomeiny à Donald Trump Téhéran et Washington n'entretiennent pas de relations diplomatiques depuis la prise du pouvoir par l'ayatollah Khomeiny, qui a consacré l'avènement de la République islamique. Les événements se précipitent. Le 4 novembre 1979, des étudiants occupent l'ambassade américaine, dont le personnel ne sera libéré que le 20 janvier 1981. En septembre 1980, est déclenchée la guerre irano-irakienne suite à l'agression des troupes de Saddam Hussein. Au paroxysme de ce conflit, éclate le scandale de l'Irangate. Il s'agit de vente secrète d'armes américaines pour l'Iran. L'argent récolté est versé aux contre-révolutionnaires nicaraguayens engagés dans une guerre contre le gouvernement sandiniste. En plus, les Américains comptent obtenir la libération de leurs otages au Liban. En octobre 1986, un avion américain transportant des armes s'écrase au Nicaragua. Les forces sandinistes capturent un pilote rescapé du crash, qui dévoile les secrets de l'opération et donne les noms de ses architectes. En novembre de la même année, l'hebdomadaire libanais Al Shiraa révèle l'affaire et évoque le voyage du conseiller national à la sécurité, Robert McFarlane, à Téhéran. Le scandale secoue même la présidence américaine. L'opération s'est déroulée en dehors du processus institutionnel, en violation de la Constitution et des décisions du Congrès, et de l'esprit de l'opération «Staunch» destinée à empêcher Téhéran de s'approvisionner en armes même auprès des alliés de Washington. Nommé commandant en chef des forces armées, Hachemi Rafsandjani convainc Komeiny d'accepter la résolution 598 du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) qui met fin à la guerre avec l'Irak en 1988. Khomeiny meurt en juin 1989. Lui succède comme guide Ali Khamenei. Le nouveau guide tisse de forts liens avec Hachemi Rafsandjani qui finit par devenir président de la République. Ils appellent à la libéralisation économique, des réformes politiques et la reconstruction du pays. En juin 1992, pour trouver des capitaux, l'Iran adopte une loi sur l'investissement privé, les étrangers ouvrent ainsi droit à posséder la totalité d'une entreprise iranienne. Son successeur Mohammad Khatami est considéré, lui aussi, comme réformateur. Mais cela n'empêche pas le président George W. Bush en janvier 2002 de parler de l'«axe du mal» pour désigner les pays qui soutiennent le terrorisme et souhaitent se doter de l'arme nucléaire, à savoir l'Irak, l'Iran et la Corée du Nord. L'élection d'Ahmadinejad n'a fait qu'exacerber les tensions entre Téhéran et l'Occident. Elu en juin 2013, le président Hassan Rohani veut faire sortir son pays de la situation économique difficile qu'il traverse à cause des sanctions économiques décrétées par la communauté internationale pour le contraindre à renoncer à son programme nucléaire. La Constitution donne l'essentiel du pouvoir au guide suprême, actuellement l'ayatollah Ali Khamenei. Le président de la République, élu pour quatre ans au suffrage universel, nomme le gouvernement, dont les membres doivent obtenir la confiance du Parlement. L'Assemblée des experts est chargée de nommer, superviser et éventuellement démettre le guide suprême. Les pouvoirs du Parlement sont limités par rapport à d'autres institutions, comme le Conseil des gardiens de la Constitution, en partie composé de religieux nommés par le guide suprême. Le Conseil de discernement est chargé de conseiller le guide suprême et de trancher les différends entre le Parlement et le Conseil des gardiens de la Constitution. Les Gardiens de la révolution constituent l'armée d'élite du pays.