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Le religieux et le politique ligués contre la femme
Publié dans El Watan le 25 - 10 - 2017

Le président tunisien, Béji Caïd Essebsi (BCE), a lancé, le 13 août dernier, le débat sur l'égalité entre femmes et hommes en matière d'héritage. S'exprimant à l'occasion de la «Fête de la femme» en Tunisie, qui célèbre la promulgation du Code du statut personnel (CSP), M. Essebsi a annoncé avoir installé une commission chargée d'étudier «la question des libertés individuelles» et celle relative à «l'égalité dans tous les domaines».
Si l'appel du chef de l'Etat tunisien a été salué par le mufti de la République, Othman Battikh, des religieux et des personnalités apparentés islamistes de ce pays et d'ailleurs (El Azhar, prédicateurs proches des Frères musulmans et des monarchies du Golfe…) ont dénoncé des propositions «contraires à la charia» et la «déviation» d'un Président qui ne fait que poursuivre l'«œuvre néfaste» de Habib Bourguiba, initiateur de la «majallat al ahwal al shakhsiya» adoptée en 1956.
Le soir même de l'annonce, des imams algériens avaient table ouverte sur les chaînes de télévision privées pour dénoncer des mesures «contraires à l'islam» et discuter de la nécessité de s'organiser pour arrêter ces «bida'» (innovations) qui veulent détruire les fondations de la oumma.
En Algérie, le débat sur l'égalité successorale et les discriminations à l'égard des femmes n'a pratiquement jamais été abordé, les féministes s'arrêtant presque exclusivement dans leurs revendications sur certaines dispositions du code de la famille : le wally (tuteur matrimonial), la répudiation, la filiation, etc.
Contesté dès sa promulgation par des féministes, dont des moudjahidate, à l'instar de Fettouma Ouzeguène, Zhor Zerari, Zohra Drif, le code de «l'infamie» n'a été révisé qu'en 2005, le chapitre consacré aux parts successorales est resté tel qu'il a été voté en juin 1984 par des élus d'une assemblée FLN.
Vingt-six ans après l'adoption du code par le président de l'Infitah, Chadli Bendjedid, une initiative a été lancée par le Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (Ciddef) pour plaider l'égalité du statut successoral entre homme et femme. Soutenu par l'Unifem, le document a rappelé les dispositions réglementaires contenues dans le code de la famille et les contradictions qui y sont contenues avec la Constitution et les conventions internationales ratifiées par l'Algérie.
Le plaidoyer disponible sur le site internet du centre du Sacré-Cœur n'a pas eu l'écho escompté. «Nous n'avons pas eu de réaction violente, mais les avis étaient partagés. Le plaidoyer a eu le mérite d'instaurer un débat ; aujourd'hui, il est porté par de nombreux acteurs favorables à l'égalité dans l'héritage», se félicite son initiatrice, Me Nadia Aït Zaï (voir l'entretien).
Quand le clan avorte une décision du Président !
En 2015, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, a ordonné au gouvernement de charger un comité ad hoc pour la révision et le réaménagement des articles dudit code relatifs au divorce qui prêtent à interprétation, «en vue d'y introduire les clarifications et précisions nécessaires».
Dans son message adressé aux femmes, à l'occasion du 8 mars 2015, le président Bouteflika a lancé un appel afin de «reconsidérer» les réserves de l'Algérie concernant certains articles de la Convention internationale de lutte contre toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, Cedaw (articles 2, 15, 9, 16 et 29) ratifiée par l'Algérie en 1996. Les attaques contre cette initiative viendront du clan présidentiel.
Un sénateur RND de Béchar a interpellé le ministre des Affaires religieuses quant aux «conséquences néfastes» de la mise en œuvre des articles de la Cedaw. Le ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa, affirme que l'Algérie reste attachée aux réserves qu'elle a formulées au sujet des articles qui sont «contraires aux préceptes de la religion musulmane et à l'identité nationale».
Contredisant le Président, le ministre précise que «l'Etat est conscient de la sensibilité de la question» et que «les réserves émises par l'Algérie sont maintenues». Sa collègue du gouvernement, l'ancienne ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la femme, Mounia Meslem, estime, de son côté, que la révision des réserves de l'Algérie concernant certains articles de la Cedaw se fera «dans le strict respect de la charia».
Si le comité ad hoc dont a parlé le Président n'a pas rendu son rapport à ce jour, les conservateurs resteront sur la brèche pour dénoncer la Cedaw et vouloir maintenir les règles discriminatoires à l'égard de la femme. L'Association des oulémas, qui s'exprime à travers son hebdomadaire Al Bassaïr, ou le Haut conseil islamique (HCI) veulent le statu quo. Pour les religieux, un principe doit prévaloir : «Lâ ijtihâda ma'a n-nas» ; il n'y a pas d'effort de réflexion, quand le texte coranique, en l'occurrence celui sur les successions, existe.
Les religieux vouent aux gémonies toute tentative de réforme des textes sur ce sujet
«Plusieurs sections du droit canonique musulman relèvent encore du tabou et de l'intouchable, dont la section héritage ou le droit successoral, estime l'islamologue et chercheur en soufisme Saïd Djabelkhir. (…) Ce blocage est essentiellement dû à l'emprise des religieux (réformistes islahistes et intégristes) qui ont toujours imposé une lecture rétrograde des textes dits ‘‘sacrés'' (Coran et Hadith), car en principe nous n'avons ni le droit ni le pouvoir d'interpréter un texte ‘‘sacré''.
Et à partir du moment où un texte est dit ‘‘sacré'', il ne peut être compris ou interprété que par une minorité religieuse ou cléricale qui va forcément monopoliser ce droit de lecture et d'interprétation du ‘‘sacré'', d'où le pouvoir absolu de cette minorité sur les croyants.»
La sociologue et architecte Nassera Merah pointe aussi du doigt ces mêmes religieux qui jouent un rôle dans la «spoliation» des droits des femmes, «mais seulement quand cela arrange les mâles de la famille». «Pour cela, je cite le droit coutumier kabyle qui prive les femmes de l'héritage, même si les hommes sont très religieux ou apparemment religieux.
Il suffit de faire un tour dans les tribunaux pour avoir une idée du phénomène, encore faut-il prendre en considération que très peu de femmes osent se dresser contre la famille», poursuit la sociologue qui fait remarquer que certains religieux s'arrangent toutefois pour que leurs filles héritent de leur vivant, «c'est dire que la religion a bon dos parfois».
Pour le fondateur du Cercle des lumières pour la pensée libre (CLPL), Djabelkhir, le pouvoir politique est aussi responsable de cette «situation de discrimination» en continuant à faire dans le populisme et les demi-mesures pour ne pas fâcher les courants religieux (qui sont devenus ses alliés principaux) au lieu de trancher pour une vraie modernité et non pas une pseudo-modernité de vitrine, destinée à donner une belle image à l'étranger, mais qui à l'intérieur bafoue les droits basiques du citoyen, dont ceux de la femme, notamment en matière successorale.
Ijtihad et/ou droit positif ?
Dans un Etat supposément civil comme l'Algérie, où la Constitution est la Loi fondamentale, s'est toujours posé le problème des deux ordres juridiques (droit positif et charia) et partant des inégalités entre les sexes en matière d'héritage. Pour l'islamologue, droit positif et charia «ne peuvent pas cohabiter», sauf si le législateur ignore ou interprète les textes sacrés selon la tendance du droit positif.
«Dans le seul cas où le législateur algérien a essayé de jumeler le droit positif et la charia, c'est-à-dire le code de la famille, nous nous sommes retrouvés dans des contradictions immenses à cause des inégalités entre les sexes qui sont fréquentes dans les textes de la charia. Je pense que nous ne pouvons pas gouverner des citoyens et des croyants en même temps. Il faut choisir l'un ou l'autre, car la citoyenneté est la même pour tous, mais les idées et les croyances diffèrent d'un citoyen à l'autre.»
L'ijtihad est-il possible ? Pour Djabelkhir, l'ijtihad «n'est pas une possibilité mais une obligation». «Le droit canonique ou charia possède toutes les sources et les éléments de réflexion nécessaires à un nouvel ‘‘ijtihad'' pour aller vers une meilleure application du principe d'égalité homme-femme en matière successorale, s'il existe une volonté politique de le faire», soutient-il.
Selon Mme Merrah, il n'y a que le droit positif qui doit régir les citoyens : «Il n'y a pas d'ijtihad, car les interprétations sont multiples en l'absence d'un clergé qui fait autorité. De plus, en Algérie, les religieux plus ou moins ouverts n'ont pas d'audience, surtout après leur décrédibilisation par l'islamisme. Ce qui est déplorable, c'est de constater que l'islam, première religion à avoir donné ce droit aux femmes, est la dernière dans ce domaine 15 siècles plus tard.»
Chez nos voisins de l'Est, la réforme engagée par le président Essebsi se dessine avec l'installation d'une commission des libertés individuelles qui prépare son rapport. Selon Frida Dahmani, journaliste à Jeune Afrique, «une voie du milieu sera trouvée» pour ménager les différents courants politiques en présence. «Il y a un texte très consensuel mais novateur déposé l'an dernier par Mehdi Ben Gharbia à l'Assemblée», nous signale-t-elle. L'expérience à suivre viendra-t-elle de ce pays, comme toujours ?


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