Qui sème le vent, récolte la tempête. C'est ainsi que le vote sur l'interdiction des minarets revient tel un boomerang vers le gouvernement suisse. Par 20 voix contre 17 et 8 abstentions, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a condamné l'interdiction de la construction de minarets comme une manifestation d'islamophobie. Le document présenté par l'Organisation de la conférence islamique (OCI) « condamne fermement l'interdiction de la construction de minarets et de mosquées et d'autres mesures discriminatoires récentes, qui sont des manifestations d'islamophobie en claire contradiction avec les obligations internationales dans le domaine des droits de l'homme concernant la liberté de religion, de croyance, de conscience et d'expression ». Reste que ce dossier de « l'islamophobie », développée par la Suisse, risque de revenir sur la table de la Ligue arabe à Syrte en Libye les 27 et 28 mars. Là, la situation risque de se gâter surtout que Berne est en conflit direct avec Tripoli. En attentant l'heure libyenne, la CDH, depuis Genève, a souligné que « de telles mesures discriminatoires votées en Suisse pourraient alimenter la discrimination, l'extrémisme et les fausses perceptions conduisant à la polarisation et à la fragmentation avec des conséquences dangereuses et imprévisibles ». La Suisse n'est pas nommément mentionnée dans le texte, mais indirectement visée à la suite du vote du peuple suisse interdisant la construction de nouveaux minarets le 29 novembre. Babacar Ba, représentant de l'OCI auprès des Nations unies à Genève, a affirmé que l'OCI agira à la fois au niveau diplomatique et au niveau légal. « Nous continuons de discuter avec les autorités suisses », a déclaré l'ambassadeur en rappelant que le secrétaire général de l'OCI avait rencontré le 2 mars à Genève la conseillère fédérale, Micheline Calmy-Rey, au début de la session du Conseil. Les discussions avec la Suisse portent aussi sur la situation au Proche-Orient, a-t-il fait remarquer. « La Suisse doit redresser une situation qui la met en porte-à-faux avec ses engagements internationaux », a affirmé l'ambassadeur. Il a évoqué « la nécessité d'une contre-initiative en Suisse pour revenir sur cette décision ». Babacar Ba a encouragé les personnes atteintes dans leurs droits par l'interdiction des minarets à faire recours sur le plan légal, sur le plan interne et international, devant la Cour européenne des droits de l'homme, « pour avoir gain de cause ». L'ambassadeur a estimé que l'acceptation de l'initiative contre les minarets viole les articles 8 et 15 de la Constitution fédérale. « Il faut faire en sorte que cette initiative ne porte pas davantage préjudice aux droits des musulmans », a-t-il dit. La résolution adoptée à l'ONU condamne dans un de ses paragraphes l'interdiction de la construction de minarets. L'ambassadeur Babacar Ba a affirmé sans ambiguïté que ce paragraphe a été introduit à la demande de l'OCI à la suite du vote suisse le 29 novembre, un vote qui « porte préjudice à la liberté religieuse et aux droits des musulmans de construire comme ils veulent leurs lieux de culte ».