L'historien se réfère à la déclaration faite par le président Emmanuel Macron au député Cédric Villani, qui est membre de La République en marche (LRM) et qui a aussi présidé le Prix Maurice-Audin de mathématiques. Dans une récente interview à L'Humanité, ce député proche de la famille Audin, qui a eu l'occasion d'honorer publiquement la mémoire du défunt assassiné en juin 1957 et dont son corps n'a jamais été retrouvé, a déclaré qu'il avait eu l'occasion de s'entretenir directement avec le président Macron et qu'il lui avait fait part de «son intime conviction qu'effectivement Maurice Audin avait été assassiné par l'armée française». «On peut dire que l'Etat français a fait un petit pas vers la reconnaissance de la vérité sur l'assassinat de Maurice Audin, car ces mots n'ont jamais été prononcés auparavant par un représentant, officiel ou officieux, de l'Etat», souligne Gilles Manceron. «L'auteur de cet assassinat est désigné comme n'étant pas un militaire français ou des militaires français, qui auraient pu agir en l'absence d'ordres reçus, mais comme étant l'armée française. Ce meurtre relève d'un ordre de la hiérarchie de l'armée. C'est un petit pas de plus de la part de l'Etat français vers l'aveu de la vérité», précise encore l'historien, déplorant par la même que cette déclaration s'accompagne de «beaucoup d'hypocrisie et de lâcheté», car, selon lui, «rien n'est dit sur les témoignages ou documents qui ont conduit le président à cette conclusion». Pour Gilles Manceron, «cela présage peut-être de la volonté du président Macron de dire enfin toute la vérité sur cette disparition, mais ce n'est pas encore le cas». Le député Cedric Villani a déclaré dans les colonnes de l'Humanité que le président Macron lui a annoncé que le grand travail d'ouverture des archives, initié par François Hollande, «allait se poursuivre», attestant qu'à ce jour «aucune archive ne venait apporter un éclairage décisif» sur le sort de Maurice Audin et que l'Etat «ne cherche plus à imposer sa version». Sur la question des archives, Gilles Manceron soutient, pour sa part, que l'armée française et l'ancien gouvernorat général ont des archives et que «si ce meurtre résulte d'un ordre de la hiérarchie de l'armée, dont le chef d'état-major en Algérie était alors le général Raoul Salan, et le commandant dans la région d'Alger, le général Jacques Massu, chef de la 10e division parachutiste, il est clair qu'il a été forcément partagé par le ministre résident d'alors, Robert Lacoste, qui pilotait totalement avec eux la conduite de la bataille d'Alger», rappelle l'historien. L'historien estime que le président Macron, aura le courage «de dire la vérité au pays ou de permettre que les historiens l'établissent». Pour Gilles Manceron, «la reconnaissance officielle par l'Etat français de ‘‘toute la vérité'' sur l'affaire Audin est une ‘‘étape essentielle'' dans un combat plus important encore : celui pour la reconnaissance officielle des responsabilités de l'armée française dans des milliers d'autres disparitions forcées et exécutions extrajudiciaires survenues pendant cette guerre». Une démarche qui doit commencer, selon cet historien, par «reconnaître la vérité sur tous les crimes commis par l'armée française pendant la guerre d'indépendance algérienne et laisser les historiens accéder librement aux archives pour établir les faits».