Jeannette Bougrab, juriste, membre de l'UMP d'origine algérienne, a été nommée à la tête de la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), mettant un terme au débat sur la succession du socialiste Louis Schweitzer. Elle fait l'unanimité aussi bien à droite qu'à gauche. Paris De notre bureau Ce ne sera donc pas Malik Boutih. Sa nomination, un moment évoquée, à la tête de la Halde n'aura donc pas lieu. Au lendemain de la défaite historique de la droite, l'heure n'est plus à l'ouverture à gauche. La majorité présidentielle a décidé de ressouder ses rangs, et Nicolas Sarkozy a trouvé la synthèse parfaite en Jeannette Bougrab. Sa nomination a été saluée par tous les bords politiques. La jeune juriste de 36 ans sera auditionnée le 7 avril prochain par la commission des lois de l'Assemblée nationale, une formalité pour succéder à Louis Schweitzer. Une succession qui n'a pas été aisée. Une violente polémique avait eu lieu après les déclarations du sénateur UMP, Gérard Longuet, qui avait jugé que la nomination de l'ancien président de SOS Racisme, Malek Boutih, n'est pas opportune et qu'il valait mieux quelqu'un du « corps traditionnel français ». Pour une partie de la droite décomplexée, venue du groupuscule d'extrême-droite Occident, Malek Boutih n'était pas assez Français : « Dans ma vie politique, j'ai entendu des choses, des noms d'oiseaux, mais les propos dont j'ai été victime de la part de M. Longuet ont été d'une violence terrible. Je suis un homme public, et donc je suis prêt à recevoir des coups. Mais c'est vrai que j'ai été blessé », affirme Malek Boutih qui dénonce un retour à droite de la « hargne », de la « violence », « une conception violente de la vie politique ». Très fair-play, il se réjouit, lui aussi, de la nomination de Jeannette Bougrab. Se disant héritière d'un certain gaullisme social, Jeannette Bougrab a été militante de SOS Racisme avant de s'engager en 2002 à l'UMP, où elle a été secrétaire nationale chargée des nouvelles adhésions. En 2007, elle s'était présentée aux élections législatives, dans la XVIIIe circonscription de Paris. Dans ce bastion de gauche où réside une forte communauté immigrée, elle avait été très largement battue. Elle a grandi à Déols, près de Châteauroux, avec son père ouvrier et sa mère femme de ménage quelques heures par semaine. Dans un portrait très poignant dressé par Libération durant les législatives, on y apprend que malgré ses diplômes, sa situation sociale, elle a elle aussi souffert de la discrimination. Invitée au congrès du Parti populaire européen à Rome, elle est la seule du groupe UMP à se faire arrêter à la frontière : « Toute la délégation est passée, un seul a ralenti, j'ai serré les dents ». Son parcours professionnel et personnel font l'unanimité. « C'est une femme de conviction. Elle a totalement le profil, totalement les compétences et donc j'en suis ravie pour elle, et je pense qu'elle va faire un très bon travail à la tête de la Halde. Et puis elle est issue des quartiers, c'est un bel exemple pour les jeunes des quartiers », souligne Fadéla Amara. Son CV est assez impressionnant. Maître de requêtes au Conseil d'Etat, elle a été juriste au Conseil constitutionnel, alors présidé par Pierre Mazeaud, devenu son mentor. Elle a ensuite été membre du Haut conseil à l'intégration, membre du conseil d'administration de l'Institut du monde arabe et membre de l'observatoire de la diversité du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Auteur d'un rapport sur « les discriminations dans l'accès au marché de l'emploi », elle a été nommée, le 10 janvier, présidente du conseil d'administration de l'Agence pour la cohésion sociale et l'égalité dont la mission est de renforcer l'action de l'Etat en faveur des 2213 quartiers de la politique de la ville. Tout cela ne l'empêche pas de confier à Libération : « Sale Arabe, je l'entendrai toute ma vie. » Elle est à la meilleure place pour sanctionner, désormais, tous les dérapages.