Plusieurs commissions rogatoires en Algérie et à l'étranger ont été ordonnées par le juge d'instruction dans le cadre de l'affaire de l'autoroute Est-Ouest Le scandale lié aux malversations dans les marchés de réalisation de l'autoroute Est-Ouest pourrait connaître de nouveaux rebondissements dans les semaines à venir, a-t-on appris de source proche du dossier. De nombreuses commissions rogatoires ont été ordonnées par le juge d'instruction du pôle judiciaire spécialisé en charge de l'affaire. Certaines ont été adressées à des pays étrangers et concernent notamment les transferts de devises, mais également des biens qu'auraient acquis certains prévenus en dehors du pays. D'autres commissions ont trait à des questions précises, notamment techniques pour lesquelles les services de la police judiciaire ont été instruits afin d'apporter des réponses. En attendant l'inculpation et la mise sous mandat de dépôt de l'ancien directeur des nouveaux projets auprès de l'Agence nationale des autoroutes (Ana), Mohamed Khelladi, ont donné une nouvelle tournure au dossier, dans la mesure où elles battent en brèche les griefs retenus contre certains mis en cause. Etant à l'origine de ce scandale, Khelladi, qui était très proche du ministre des Travaux publics, et ce, depuis son passage au ministère de la Pêche, où il lui avait confié le plus important département, celui du développement du secteur (le programme d'aide de l'Etat pour l'importation de navires de pêche), est en fait celui qui a le plus chargé certains prévenus, notamment Mohamed Bouchama, l'ex-secrétaire général du ministère des Travaux publics, en détention provisoire depuis plus de cinq mois. De ce fait, ses déclarations en tant que témoin devant le juge risquent d'être discréditées. Une faille que les avocats de Mohamed Bouchama n'ont pas laissé passer. En détention depuis cinq mois Ils ont introduit auprès du juge d'instruction une demande de mise en liberté, « étant donné que le principal accusateur » de leur mandant vient d'être inculpé à son tour. Pour Me Miloud Brahimi, la mise en liberté de Bouchama « s'impose d'elle-même au vu des nouveaux rebondissements qu'a connus le dossier », précisant « qu'il y va de la crédibilité de la campagne de lutte contre la corruption lancée par les autorités ». Me Brahimi conclut en disant : « Celui qui n'a jamais péché jette à M. Bouchama la première pierre. » Abondant dans le même sens, Me Khaled Bourayou souligne « l'importance » d'un tel aboutissement, « eu égard au fait qu'aucune preuve attestant la culpabilité de Bouchama n'existe dans le dossier », mis à part les déclarations de Khelladi. « La détention du secrétaire général ne saurait être justifiée étant entendu que la procédure d'instruction a tout épuisé jusqu'à maintenant », explique Me Bourayou. Les deux avocats espèrent que leur demande « trouvera un écho favorable » dans la mesure, disent-ils, où « la culpabilité de Bouchama n'est ni prouvée ni déclarée ». A signaler que dans ce dossier, huit personnes sont actuellement sous mandat de dépôt, dont sept le sont pour plus de quatre mois (le juge a renouvelé le mandat de dépôt après le délai de quatre mois prévu par le code de procédure pénale). Il s'agit de Chani Mejdoub, un homme d'affaires agissant pour le compte de la société chinoise Citic, Addou Sid Ahmed Tadj, propriétaire d'une poissonnerie à Beni Saf, Addou Sid Ahmed, les deux frères Bouznacha, des commerçants, ainsi que Hamdan Salim, directeur de la planification et de la coopération au ministère des Transports et Mohamed Bouchama, secrétaire général du ministre des Travaux publics. Un ministre dont le chef de cabinet, Mohamed Ferrach, a été également placé sous contrôle judiciaire quelques mois après la présentation des mis en cause. Une présentation qui a suscité de nombreuses interrogations, notamment à propos du conseiller du ministre de la Justice, un colonel du DRS (Département de renseignement et de sécurité) gravement mis en cause par Chani Mejdoub, le présentant comme étant son « passeport » au niveau des ministères et des administrations pour régler les problèmes de l'entreprise chinoise et obtenir des marchés en contrepartie d'importantes commissions. Eu égard aux graves révélations, le colonel devait être présenté devant le parquet d'Alger au même titre que les mis en cause, mais à la dernière minute, son nom a été retiré de la liste des convocations, sous prétexte d'un vice de procédure, lié à son statut, relevant du tribunal militaire, une juridiction qui, à ce jour, n'a pas été saisie du dossier. Un dossier qui n'éclabousse pas uniquement le secteur des travaux publics, mais aussi les transports, où des marchés de réalisation de téléphérique, de tramway et de chemins de fer ont été octroyés en contrepartie de commissions, malgré les procédures d'avis d'appel d'offres et la réglementation en vigueur. Un volet que le juge d'instruction n'a pas encore abordé. Les auditions dans le fond du prévenu Salim Hamdan n'ont pas encore eu lieu.