Il s'agit de Tayeb Kouidri, natif de Meknès, ayant des biens en France et en Suisse où il a sa résidence, et qui a mystérieusement quitté le pays pour ne plus revenir, dès l'arrestation de Mejdoub Chani, un homme d'affaires, en septembre 2009. Son nom a été cité par Mohamed Khelladi, l'ex-directeur des nouveaux projets au niveau de l'Agence nationale des autoroutes, et par Addou Sid Ahmed, l'homme d'affaires, tous les deux actuellement en détention provisoire. Le premier l'avait présenté comme « un élément important dans le lobby qui a la mainmise sur les marchés de réalisation de l'autoroute Est-Ouest » que dirigeait, selon toujours Khelladi, l'homme d'affaires français, Pierre Falcon, condamné dans son pays pour une affaire de trafic d'armes vers l'Angola. Que ce soit devant les officiers de la police judiciaire du Département du renseignement et de sécurité (DRS) ou devant le juge d'instruction de la 9e chambre, près le tribunal de Sidi M'hamed, Khelladi n'a pas modifié ses propos, révélant lors de chacune des auditions que les commissions versées par la société chinoise, Citic, dans le cadre de l'octroi des marchés de l'autoroute Est-Ouest, « étaient partagées entre un groupe d'intervenants dont un certain Kouidri de Chlef ». Il avait déclaré avoir rencontré, lors de son voyage en Chine, un homme d'affaires chinois du nom de Phillipe Shan, qui lui avait fait de nombreuses révélations. D'abord, que des commissions de 4% du montant des marchés octroyés à la Citic étaient versées à Mejdoub Chani, censé être leur représentant en Algérie (actuellement en détention provisoire), 4 autres à des cadres de la Citic et 1,2% à un certain Kouidri Tayeb, présenté comme « un chargé de mission » du ministère des Travaux publics. Il avait également cité Addou Sid Ahmed, l'homme d'affaires qui sert d'intermédiaire à de nombreuses sociétés étrangères pour leur obtenir des marchés en contrepartie de commissions. Ce même Addou va plus loin dans ses propos, en affirmant devant les enquêteurs avoir intervenu dans le contrat de suivi et de contrôle du tronçon Est de l'autoroute, au profit de la société italienne Inco, grâce aux « bons offices » du chef de cabinet du ministre des Travaux publics, le nommé Ferrache Belkacem, homme de confiance du ministre, inculpé dans le cadre de cette affaire. Addou aurait révélé lui avoir remis une somme de 500 000 DA, coût de ses vacances en Turquie, en attendant le versement du reste de la commission et qui devait être défalquée du montant de 300 000 dollars qu'il avait perçu. En fait, Kouidri Tayeb (de Sour El Ghozlane et non de Chlef) est un richissime homme d'affaires et parent par alliance à un haut responsable militaire. Une connaissance de Ghoul, Khelil et de… feu Ali Tounsi Il est probablement le lien qui relie le scandale du secteur des travaux publics à celui de Sonatrach. L'homme en question avait été poursuivi et condamné, il y a près de 25 ans, pour dilapidation de deniers publics, alors qu'il était à la tête d'une entreprise publique de l'hydraulique. Des années après, il est expert judiciaire et évolue dans le milieu du MSP, puis devient incontournable dans les expertises en matière de transaction et de marché, au point où de nombreux ministères font appel à lui. Mais il était plus sollicité par l'ex-ministre de l'Energie, Chakib Khelil et celui des Travaux publics, Amar Ghoul, avec lesquels il entretenait des relations soutenues, tout comme d'ailleurs c'était le cas avec le défunt directeur général de la Sûreté nationale, Ali Tounsi. L'intrigue reste quand même son départ précipité d'Alger, alors qu'il était beaucoup plus en Algérie qu'en France ou en Suisse. Il avait quitté le pays, moins de 48 heures après l'arrestation de Mejdoub Chani, un homme d'affaires qu'il connaissait assez bien. Depuis, il n'est plus revenu. La commission rogatoire délivrée par le juge d'instruction Ghazali Kamel, de la 9e chambre du pôle judiciaire spécialisé près le tribunal de Sidi M'hamed, aux officiers de la police judiciaire du DRS pour l'entendre sur l'affaire n'a pas abouti. Sa résidence à Hydra, au quartier Paradou, est fermée depuis longtemps. Peut-on croire qu'il a pris les devants avant l'éclatement du scandale ? On n'en sait rien. Ce qui est certain, c'est que son nom est d'une manière ou d'une autre connu non seulement à Sonatrach et au ministère de l'Energie, mais également au ministère des Travaux publics, où il était reçu régulièrement au bureau de Amar Ghoul. Même si pour l'instant rien n'indique qu'il a des liens avérés avec l'affaire de Sonatrach, néanmoins, des soupçons planent sur le rôle qu'il aurait pu jouer dans l'affaire des commissions dans les marchés de réalisation de l'autoroute Est-Ouest. Un rôle que seul le juge d'instruction de la 9e chambre peut élucider, lui qui vient d'inculper le directeur général de l'Agence nationale de gestion de l'autoroute (Anga), Ghazali Ahmed Rafik, ce qui porte à 9 le nombre de personnes poursuivies pour association de malfaiteurs, blanchiment d'argent, abus d'autorité, corruption et abus de fonction. Il s'agit du chef de cabinet du ministre des Travaux publics, Belkacem Ferrachi (sous contrôle judiciaire), du secrétaire général, Mohamed Bouchama (en détention provisoire), du directeur des nouveaux projets au niveau de l'Agence nationale des autoroutes, Mohamed Khelladi (en détention), du directeur des nouveaux programmes au ministère des Transports, Hamdane Salim Rachid (en détention), de trois hommes d'affaires, Chani Mejdoub, Addou Sid Ahmed, Addou Tadj Eddine (en détention) et de deux commerçants les frères Bouzenacha Naïm et Madani (en détention).