Les experts et spécialistes, ainsi que le mouvement associatif, ayant pris part au colloque international Tabac et Santé, qui s'est déroulé les 29 et 30 mars, sont unanimes à dire que le combat contre le tabagisme se fait sur deux volets importants : le sevrage tabagique et le travail sans fumer (TSF), concept qui fait son bonhomme de chemin dans les pays du Maghreb. En guise de réponse, un cours d'aide à l'arrêt du tabac a été lancé : « La formation vise à améliorer les compétences des professionnels de la santé à l'aide et à l'accompagnement des fumeurs, et l'enseignement, qui touche plus de 60 médecins généralistes et résidents en formation post-graduation, se fera sous forme d'exposés théorique et pratique ; les cours seront dispensés par des experts et spécialistes français », souligne le Pr. Mokhtar Hamdi-Chérif, épidémiologiste de renom, qui enchaîne : « L'objectif recherché à travers cette approche c'est former des professionnels pour dispatcher la formation à une grande échelle et promouvoir l'action à travers les médias et les ONG pour encourager la mobilisation des acteurs dans la lutte contre le tabac source de cancers dont la mortalité reste, en dépit des progrès thérapeutiques, toujours élevée. A titre d'indication, l'augmentation de l'incidence des cancers et maladies liées au tabac au cours de ces dernières années suit la progression du tabagisme. En Algérie, environ 35 000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués chaque année, avec une augmentation de 50% du nombre de cas entre 1986 et 2000. Il faut souligner que la consommation de tabac a triplé au cours de ces dernières décennies, passant de 7,7% en 1978 à 20,6% en 1998. Le taux de prévalence du tabagisme est de 43,81% chez l'homme et 6, 56% chez la femme ; 50% des fumeurs sont âgés de moins de 27 ans. » En dépit de la nonchalance des décideurs du pays, notamment le ministère de la Santé, qui n'a toujours pas mis en application la convention cadre de lutte anti-tabac (CCLAT), pourtant ratifiée en 2006, le CHU et l'université de Sétif, en collaboration avec Epidaure -CRLC- Montpellier (France), l'UICC et la ligue nationale contre le cancer (LNC), ont (une première à l'échelle nationale), mis un programme pilote d'aide à l'arrêt de la consommation de tabac dans la région de Sétif. En se référant à l'expérience marocaine, la démarche peut donner de très bons résultats. L'exemple du royaume chérifien, exposé par Y. Chami Khazraji, M.H.Afif, M.Bennani, R. Bekkali, mérite l'attention. Le projet, selon nos interlocuteurs, a été lancé en 2007 dans 31 établissements scolaires pour couvrir, en 2010, l'ensemble des lycées du Maroc. Par rapport aux entreprises, le programme en concerne 18 dont 13 émanent du secteur privé. Le programme consistait à déployer un plan antitabac tant au niveau scolaire qu'à celui professionnel. Entre mai 2007 et décembre 2009, les activités de lutte antitabac intéressent 585 établissements scolaires, soit 26,5%, et couvrent 22 418 enseignants et corps administratifs, et surtout 671694 élèves, soit un taux de couverture de 32,75%. Grâce à l'appropriation du projet par le ministère de l'Education nationale et celui de la Santé, le programme CLEs sera étendu en 2010 aux 1 622 lycées restants. Il a été permis de constater que parmi les 4 762 élèves suivis pour sevrage tabagique, 477, soit 10%, ont complètement arrêté de fumer ; 255 enseignants et administratifs sur les 1 485 suivis ont fait de même. Au niveau des entreprises, 1 160 salariés fumeurs ont fait l'objet d'un suivi dans la consultation d'aide au sevrage tabagique : 564 parmi eux sont actuellement complètement sevrés, soit les 48, 6%. Le chargé du volet entreprise, Dr Bouaoud, de l'association Ennour de Sétif, dira à ce propos : « Mis en place depuis 2008 par l'Américan Cancer Socièty (ACS), le projet avance. Les résultats enregistrés sur le terrain nous encouragent à aller de l'avant. Le travail réalisé dans 14 entreprises des deux secteurs, employant plus de 10 000 salariés, donne ses fruits ». Pour le plan d'action de l'année en cours, le programme touchera 45 autres entreprise des wilayas de Bejaïa, M'sila, Constantine, Bordj Bou Arréridj, Jijel et Mila. Mme Touati, chargée du secteur éducatif, abonde dans le même sens : « Il faut savoir que 28,6% des élèves sont des fumeurs et 12,7% consomment une autre forme de tabac. L'exposition à la fumée du tabac est très élevée : 4 élèves sur 10 vivent dans un foyer où d'autres personnes fument, 2 sur 3 sont exposés à la fumé dans les lieux publics, 3 élèves sur 10 ont des parents qui fument, 8 sur 10 pensent que la fumée produite par d'autres personnes est nuisible et 10 que la consommation du tabac devrait être interdite dans les lieux publics.