– Le gouvernement vient d'instaurer un nouveau dispositif d'encadrement des opérations du commerce extérieur (DAPS), qui remplace la suspension provisoire à l'importation. Pensez-vous que la surtaxation des produits importés, dont le taux varie entre 30 et 200%, aurait des effets vertueux sur la balance des paiements, qui a enregistré des déficits depuis 2014 ? Comme il fallait s'y attendre, le régime des restrictions à l'importation, qui a donné lieu à plusieurs réactions négatives de la part des partenaires commerciaux de l'Algérie ainsi que de nombreux opérateurs économiques, vient de laisser la place à un autre mécanisme basé sur une protection tarifaire. Il s'agit d'un droit de douane bis, appelé droit additionnel provisoire de sauvegarde, qui frappera près de 1095 sous-positions tarifaires avec six quotités ad valorem (30%, 50%, 60%, 70%, 120% et 200%). Deux principaux effets sont attendus : une amélioration sensible de la fiscalité douanière et une baisse relative sur de nombreux postes liés à la structure des importations pouvant influer sur l'équilibre de la balance commerciale. Le tarif douanier vient donc officiellement de changer, ce qui provoquera une évolution dans la nature des produits achetés de l'étranger. Cependant, il ne faudra pas s'attendre à une mutation profonde dans la mesure où les besoins essentiels de l'Algérie, notamment ceux de la population ainsi que de l'appareil productif restent encore incompressibles. Aussi, la pression sur les réserves de change ne risque pas de tomber de sitôt. – L'Exécutif motive aussi sa décision de surtaxation des importations par le souci d'encourager la production nationale et de développer les industries naissantes. Un tel dispositif fiscal pourrait-il constituer réellement un coup de pouce aux entreprises locales ? La mise en œuvre d'un droit additionnel provisoire est à considérer comme étant une action indirecte des pouvoirs publics sur le système des prix afin de rendre les produits locaux plus compétitifs par rapport aux produits importés rendus à cet effet plus chers sur le marché national. Ce mécanisme, qui a fait ses preuves dans beaucoup de pays, peut contribuer à juste titre à renforcer les capacités productives nationales, à condition de ne pas se limiter au seul DAPS. Il y a lieu de rendre l'acte d'investissement plus attractif que celui d'importer afin d'arriver à une densification du tissu industriel. Il peut y avoir également des effets pervers à éviter si des producteurs locaux venaient à décider d'augmenter leurs prix pour les aligner sur ceux des produits importés, ce qui entraînerait des tensions inflationnistes. La question du contrôle doit être aussi de mise en cas de sous-facturation (infraction sur la valeur en douane) pour atténuer le paiement des droits et taxes. – Quelles sont les conséquences de la mise en œuvre d'un tel dispositif sur le consommateur final ? C'est le consommateur final qui subira les effets du DAPS, car il aura à payer plus cher des produits de l'importation. L'écart de prix peut être important pour les biens étrangers qui supporteront à la fois droit de douane, TVA, TIC et DAPS. Logiquement, le comportement des consommateurs algériens évoluera vers l'achat des produits locaux, à condition qu'ils soient plus disponibles, ce qui n'est pas toujours évident. Connaissant les faiblesses des réseaux de distribution en Algérie, il faut s'attendre à une distorsion dans le système des prix qui sera pénalisant pour les ménages dont le pouvoir d'achat est limité. En définitive, l'application du DAPS est certes limitée dans le temps et avec l'argument d'une meilleure disponibilité des produits pour la consommation, contrairement au système des restrictions qui crée des pénuries sur le marché. Hocine Lamriben