Pour la 10e soirée des Journées du théâtre maghrébin, le TRC a présenté, lundi dernier, à un public plus fidèle et plus réceptif que jamais, une pièce tunisienne intitulée Adhil (l'ombre). Un duo dramaturgique écrit par D. Hassen Rachid et réalisé par El Moundji Ben Brahim, joué par ce dernier, en compagnie de Halima Daoud. C'est une remise en cause, aussi tardive qu'impitoyable, du couple par la femme, qui prend soudain conscience du vide de sa vie passée en parades mondaines pour plaire à un époux tyrannique, préoccupé par le prestige de ses galons d'officier, ayant eu un grand pouvoir de décision, de la fuite de ses rêves romantiques en somme, le drame de n'avoir pas vécu, d'être passée à côté de vraies relations humaines, auxquelles il a été préféré le clinquant des apparences. Ce n'est pas tant le drame du couple, homme-femme, qui est en question, mais beaucoup plus celui de l'être humain confronté à lui-même, avec toutes ses désillusions, à une étape ultime de sa vie : la vieillesse, puis la mort. Le jeu de scène, moderne et symbolique, donne prétexte à parler, à faire entendre, ranimer, faire redécouvrir la langue arabe classique, épurée, capable de susciter des émotions à partir de critères et données imposés par la modernité. Pari difficile, pourtant le charme des intonations de cette langue à vocation poétique a opéré. « Nous avons voulu prouver que cette langue est très belle et peut faire passer des messages, exprimer toutes les préoccupations existentielles, humaines », nous confiera El Moundji Ben Brahim à la fin du spectacle, applaudi et encouragé par un public, qui a prouvé sa capacité à comprendre des jeux de scène complexes.