Le lancement des opérations de mise en œuvre du passeport et de la carte d'identité biométriques a très vite tourné à la polémique par médias interposés. Plus que tout le reste, la question de savoir s'il faut obliger les femmes à se faire photographier sans le voile et les hommes sans la barbe alimente depuis plusieurs semaines pratiquement toutes les discussions. Même les chaînes satellitaires arabes y ont vu le moyen de « plomber » leur audience et n'ont pas hésité une seconde à ouvrir le débat avec les téléspectateurs sur la question. La précipitation et le manque de préparation de l'administration à cette tâche ont donné lieu parfois, il faut le dire, à des situations ubuesques. Comme celle retransmise par le JT national où l'on voit le ministre de l'Intérieur et des Collectivités s'exprimer sur la longueur de la barbe qui peut être à l'origine d'un rejet d'identification biométrique par les lecteurs électroniques aux postes-frontières et conseiller par la même de se raser au plus près si l'on ne veut pas courir le risque d'être refoulé à l'étranger ! Mais au-delà l'aspect comique que peut prendre la préparation de l'opération pour la mise en place de document de voyage ou d'état civil de type biométrique, cette polémique a mis à nu l'inconsistance d'une administration archaïque, sous-développée et mal préparée à l'ère du tout numérique, d'où d'ailleurs les réticences des uns et des autres. Cela est encore plus évident quand l'autorité peine à faire admettre, au sein de l'opinion et des usagers, les solutions les plus innovantes, au point de faire marche arrière et d'accepter que ces mesures ne s'appliquent pas aux futurs pèlerins devant se rendre à La Mecque, par exemple. Le comble de l'archaïsme est sans doute atteint lorsque, nonobstant la quantité de paperasse exigée pour l'établissement d'un passeport ou d'une carte d'identité et dans un souci, semble-t-il, d'authentification des demandeurs et pour éviter toute falsification, chaque demandeur doit citer dans le formulaire qu'il doit remplir les noms, prénoms et numéros de téléphone de trois camarades de classe ou de régiment dans le cadre du service national ainsi que la date de l'année d'incorporation ! Quel que soit l'argument avancé pour justifier une mesure aussi aberrante, elle s'apparente beaucoup plus à une volonté de fichage des individus et/ou une remise à jour du fichier de police au moyen de cette opération biométrique. Un procédé que la société civile, les partis et les citoyens ne peuvent que réprouver parce qu'il est l'apanage des régimes autoritaires et des dictatures et qu'il n'a rien à voir avec l'Etat de droit. La prévention et la sécurisation des documents biométriques passent certainement par des solutions encore plus innovantes et qui font malheureusement cruellement défaut au sein de l'administration algérienne et de ses gouvernants. Elles existent ailleurs et ont été testées par des Etats démocratiques.