Nous soussignés, partisans d'un Maghreb pluriel, héritiers des valeurs et des rêves des fondateurs de l'idée maghrébine – ceux-là même qui ont transcendé le découpage colonial de l'Afrique du Nord, et qui ont érigé tout haut l'articulation stratégique entre libération du joug colonial et unité des peuples de la région dans un Maghreb prospère et citoyen –, proclamons à leur suite, solennellement, «notre foi en l'unité du Maghreb» (conférence de Tanger, 27-30 avril 1958). 1)- Nous déclarons, avec force et conviction, notre pleine solidarité avec la lutte du peuple algérien pour retrouver sa pleine souveraineté confisquée jusque-là. 2)- Nous dénonçons toute forme d'ingérence extérieure dans la lutte du peuple algérien et toute atteinte à sa libre expression, à son unité et à la paix en Algérie et dans tout l'espace maghrébin. 3)- Nous constatons qu'en dépit des expériences politiques depuis les indépendances, qui n'ont réalisé ni unification de cet espace, ni démocratisation de la vie publique, ni développement humain et durable, le rêve de la construction maghrébine demeure vivace. Bien mieux, il est devenu l'espoir permettant d'exister dans le monde actuel où il n'y a de place que pour les grands regroupements cimentés par des solidarités régionales agissantes. 4)- Les peuples de notre espace maghrébin, de la Mauritanie à la Libye, expriment – de façon continue et par le biais d'actions diverses, dans l'espace public – leurs aspirations à la dignité, au droit à la vie, à la démocratie, à l'équité, au développement durable, à l'égalité des chances, aux droits des femmes et des jeunes, au respect du lien de droit et à une solidarité sociale active. Par leurs actions et revendications, ils donnent corps au Maghreb de demain : le Maghreb des citoyens. Nous nous sentons parmi eux et nous nous projetons avec eux dans cet avenir maghrébin prometteur. Ils ressuscitent, par leurs luttes et aspirations, la conscience maghrébine des fondateurs. Hier, c'est à l'initiative du peuple tunisien que les peuples du Maghreb, et spécialement leurs jeunesses, sont descendus dans les rues pour protester contre le despotisme et pour revendiquer haut et fort la fondation de sociétés modernes, solidaires et démocratiques, et l'instauration d'Etats de droit cimentés par des légitimités populaires librement exprimées et collectivement consacrées. Puis ont suivi les mouvements marocains du 20-Février et du Hirak rifain. Aujourd'hui, c'est le peuple algérien et sa jeunesse qui relancent le processus de libération et qui reçoivent spontanément le soutien des peuples maghrébins et de leurs jeunesses. 5)- Nous nous engageons dans cette voie : – pour que le processus de démocratisation et de modernisation des Etats et des sociétés ne soit pas confisqué et détourné vers des fins de reproduction du despotisme ; – pour que le choix de l'expression pacifiste des volontés populaires ne soit pas détourné vers des dérapages qui «justifieraient» des interventions violentes des despotes et de leurs appareils sécuritaires ; – pour faire éviter aux peuples maghrébins le néfaste choix entre despotisme et chaos ; – pour que cette conscience maghrébine transcende toute tendance à l'isolationnisme, au patriotisme étriqué, au clanisme et autres clientélismes ; – pour que la socialisation des jeunes générations ne se fasse pas dans le déni du Maghreb, le patriotisme étroit et la haine de l'autre… Mais, bien au contraire, le socle dans lequel cette socialisation se fera sera celui de la citoyenneté maghrébine ; – pour que la complémentarité des ressources matérielles et humaines soit exploitée au profit d'un bien-être maghrébin, notamment par des mutualisations diverses et des partenariats innovants, contrairement à la dilapidation actuelle de ces capitaux humains et matériels ; – pour que l'espace Maghreb soit une zone de paix, où la quiétude et la sécurité des citoyens et des peuples seront garanties, d'abord par l'adhésion déterminée et large à la construction citoyenne du Maghreb, ensuite par la promotion d'une culture du dialogue et de la recherche des convergences. Enfin, par l'institution de cadres de recherches de compromis, d'arbitrages et de résolutions des litiges et des conflits. Cela préviendra tout dérapage vers la violence, et toute tentation terroriste ; – pour que le conflit du Sahara occidental, qui, par sa non-résolution, porte préjudice non seulement aux intérêts stratégiques des peuples de la région, mais aussi à la paix dans l'espace mixte euro-méditerranéen-africain, trouve la voie d'une solution politique juste, équitable et consensuelle. 6) Nous affirmons qu'au-delà de la complexité de la question saharienne, une solution maghrébine au conflit est possible. Nous sommes disposés à participer à son élaboration, dans l'intérêt stratégique des peuples du Maghreb, de la Méditerranée et de l'Afrique. Pour nous, le Sahara occidental doit être un pont vers le Maghreb et non un champ de guerre et de destruction. 7) Nous proclamons notre soutien total et inconditionnel au peuple algérien. Dans cette phase de mondialisation instable, il n'y a de salut que maghrébin.
Premiers signataires : Abbad Andaloussi Samia, pharmacienne (Maroc) Abdelhamid Maha, chercheuse géographe (Tunisie) Abdeljaoued Héla, médecin, militante féministe et des droits de l'homme (Tunisie) Abdelmoumni Fouad, économiste, militant des droits de l'homme (Maroc) Abderrahmane Ali, universitaire (Tunisie) Abdessamad Hichem, traducteur (Tunisie) Abdoun Ismaïl, universitaire (Algérie) Ahrrare Latefa, actrice, metteur en scène (Maroc) Akesbi Najib, économiste (Maroc) Akrouf Sanhadja, militante féministe (Algérie) Al Moutamassik Ahmed, sociologue (Maroc) Allal Mourad, militant associatif (France/Tunisie) Allal Tewfik, militant associatif de l'émigration maghrébine en France, président d'ACDA (Agir pour le changement et la démocratie en Algérie) Amara Jean-Claude, militant associatif (France/Algérie) Amrani Souhli Mehdi, économiste (Maroc) Arsalane Chakib, administrateur (Maroc) Ayegou Jamila, économiste (Maroc) Baaboura Noureddine, juriste, militant associatif (France/Tunisie) Balafrej Omar, parlementaire PSU (Maroc) Bazza Mohamed, militant associatif (France/Maroc) Ben Ameur Ali, universitaire (France/Tunisie) Ben Ameur Hédia, militante associative (France/Tunisie) Ben Azouz Nabil, enseignant, militant politique (Tunisie) Benamar Abderrahmane, avocat, militant des droits humains (Maroc) Benazzouz Imane, biologiste (Maroc) Benhaim Raymond, économiste (Maroc) Benjelloun Tahar, écrivain ( Maroc) Bensaïd Mohamed Aït-Idder, ancien parlementaire OADP (Maroc) Bensaïd Mohammed, militant associatif (France/Tunisie) Benslimane Moncef, universitaire (Tunisie) Bessis Sophie, historienne (France/Tunisie) Biad Tayeb, historien (Maroc) Binebine Mahi, peintre, sculpteur, écrivain (Maroc) Bouaziz Mustapha, historien (Maroc) Bouden Hajer, traductrice (France/Tunisie) Boutouala Ali, SG du parti PASD (Maroc) Chammari Khémaies, ancien ambassadeur, militant des droits humains (Tunisie) Chaoui Hakima, poète (Maroc) Charfi Mounir, journaliste (Tunisie) Cherbib Mouhieddine, président de la CRLDHT (Tunisie) Cherif Faysal, historien (Tunisie) Cherki Alice, psychanalyste (Algérie) Chouikha Larbi, universitaire (Tunisie) Dahmani Ahmed, économiste (Algérie) Daidiaa Mohamed, ancien parlementaire, syndicaliste (Maroc) Dakhlia Jocelyne, universitaire (France/Tunisie) Djabi Nacer, universitaire (Algérie) Djahnine Habiba, poète, cinéaste, féministe (Algérie) Dridi Mohsen, militant associatif (France/Tunisie) Elalamy Youssouf Amine, écrivain (Maroc) El Amri Aida, militante associative (France/Tunisie) El Aroussi Moulim, philosophe écrivain (Maroc) El Aziz Abdeslam, SG du parti CNI (Maroc) El Bouhsini Latifa, historienne (Maroc) El Hadjali Fathi, militant associatif (Belgique/Tunisie) El Idrissi Nacer, président de l'Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF) El Kherchi Driss, enseignant, militant associatif (France/Maroc) Elloumi Chedly, militant associatif (France/Tunisie) El Yousfi Abdellatif, enseignant (Maroc) Essalmi Nadia, éditrice (Maroc) Faouel Raoudha, militante associative (France/Tunisie) Ferjani Mohamed Cherif, universitaire (France/Tunisie) Fliss Mohamed Salah, militant politique (Tunisie) Habchi Ahmed, manager (Maroc) Hadj-Moussa Ratiba, universitaire (Algérie) Haidour Mohamed (Tunisie) Haidour Mohammed Anouar, secretaría confederal de Internacional y Cooperación (Maroc) Hamza Mohamed, chimiste (Maroc) Hanine Maher, militant associatif et politique (Tunisie) Hennad Mohamed, universitaire (Algérie) Jalloul Nacer, Association Farhat Hached Solidarité et justice (Tunisie) Jendoubi Kamel, ancien ministre, militant des droits humains (France/Tunisie) Kadri Aïssa, universitaire (Algérie) Kamel Lahbib, militant associatif (Maroc) Kaouah Majid, poète, écrivain (Algérie) Karaborni Najet, militante associative (Tunisie) Kazdaghli Habib, universitaire (Tunisie) Khaless Rachid, écrivain (Maroc) Khelifi Meriem, universitaire (Algérie) Kitouni Hosni, historien (Algérie) Krichen Aziz, sociologue, écrivain (Tunisie) Laalami Ouali Mohammed, ingénieur (Maroc) Labidi Moez, enseignant, économiste (Tunisie) Laïfi Kamel, secrétaire général de Voix libre (Tunisie) Lamrani Dalila, militante féministe (Algérie) Laraki Jaouad, parlementaire PJD (Maroc) Laroui Fouad, écrivain (Maroc) M'Hamedi Hend, présidente de CVDT 6 (Belgique/Tunisie) Machta Insaf, universitaire (Tunisie) Madani Mohamed, juriste (Maroc) Madi Mustapha, universitaire (Algérie) Mahmoudi Karim, président de Maghreb plus (Algérie) Mansouri Otman, historien (Maroc) Miftah Mostapha, administrateur (Maroc) Miled Najet, libraire (France/Tunisie) Monjib Maati, historien (Maroc) Morsly Dalila, professeur émérite (Algérie) Moukhlis Mohammed, ingénieur consulting (Maroc) Mounib Nabila, SG du PSU (Maroc) Mousdad Mustapha, dirigeant PSU (Maroc) Najar Noureddine, banquier, militant associatif (Tunisie) Nissabouri Mostafa, poète, écrivain (Maroc) Ouayahman Ahmed, cadre société civile (Maroc) Oussedik Fatma, universitaire (Algérie) Saber Najib, géologue (Maroc) Sadoun Mohammed, écrivain (Algérie) Saïd Abdelhadi, poète et écrivain (Maroc) Saïd Zahraoui, journaliste (Algérie) Saidi Kamel, universitaire (Algérie) Samhari Mohammed, enseignant (Maroc) Samrakandi Mohammed-Habib, universitaire, directeur de la revue Horizons maghrébins Sansal Boualem, écrivain (Algérie) Sassi Mohammed, politologue (Maroc) Senouci Brahim, universitaire, écrivain, chroniqueur (Algérie) Senoussi Noureddine, président de REMCC (Tunisie) Serhane Abdelhak, écrivain, universitaire (Maroc) Silem Ali, artiste peintre (Algérie) Slama Hassen, universitaire (Italie/Tunisie) Slimani Ahmed, directeur de CERM (Maroc) Smida Mohammed, juriste, président de l'association ATF-Nord (Tunisie) Taarji Hinde, journaliste Tahar Benjelloun, écrivain (Maroc) Taleb Ibrahimi Khaoula, professeur des universités (Algérie) Tanjaoui Hocine, écrivain (Maroc) Tazi Nadia, philosophe (Maroc) Tengour Habib, poète et anthropologue (Algérie) Titouh Fatima, psychiatre, psychanalyste (Algérie) Toujani Zeineb, islamologue (Tunisie) Trifi Mokhtar, avocat, ancien président de la LTDH (Tunisie) Yahyaoui Fatima-Zahra, linguiste (Maroc) Zakari Abderrahmane, philosophe (Maroc) Zniber Abdallah, ancien président d'IDD (Maroc)