Dans la soirée du vendredi 10 mai, un vibrant hommage a été rendu au poète et acteur Ahmed Lahlou, à l'occasion du 40e jour de son décès, par l'association socioculturelle Tighra, de Takorabt, son village natal. Une grande soirée culturelle avec des prises de parole, des témoignages et des poèmes déclamés par ses amis et compagnons de route et autres poètes d'expression kabyle. Au programme de cette soirée riche en émotions, il y avait aussi la projection des œuvres cinématographiques ou théâtrales qui ont vu la participation du poète disparu prématurément suite à une maladie. Parmi les amis du défunt que nous avons rencontrés au cours de cette soirée commémorative, Cherifi Hmimi a bien voulu nous faire part de son témoignage. «Ahmed était un véritable volcan qui tantôt se consumait de l'intérieur, tantôt était en éruption. C'était un aventurier qui pouvait paraître très timide, mais il était aussi très opiniâtre. Il faut dire qu'Ahmed Lahlou a eu une enfance difficile à cause de l'absence du père, émigré en France, mais il était très bon élève au primaire comme au moyen, malgré les difficultés de la vie qui l'ont poussé à quitter le lycée Debbih Cherif d'Akbou, après une première année en section maths francophone. Il a alors intégré le corps de l'éducation nationale juste après avoir effectué son service national comme chef de char puis comme instructeur. Autodidacte, rêveur, idéaliste, voire utopiste, Ahmed était très influencé par Charles Baudelaire, Pablo Neruda et Jean Ferrat. Anticonformiste et un peu anarchiste sur les bords, sa vie était tout sauf un long fleuve tranquille et il ne doit sa notoriété qu'à son abnégation et à sa persévérance. Ahmed n'était pas toujours compris par les siens ni même par les villageois et n'était pas toujours reconnu comme un artiste à part entière alors qu'il avait fait le tour de tous les festivals. Et là, il revient comme pour prendre sa revanche sur ceux qui se moquaient de lui et ne reconnaissaient pas son talent, mais, hélas, c'est souvent le cas chez nous, on ne reconnaît les artistes qu'à leur mort. Je pense que son jusqu'au-boutisme a eu raison de sa santé», dira de lui son ami. Quant à l'association Tighra, organisatrice de l'événement, elle a été créée en mars 2018, mais elle compte déjà à son actif de belles réalisations. Forte de près de 150 adhérents, dont la moitié est constituée de jeunes filles instruites ayant souvent un niveau universitaire, Tighra a réalisé un club de lecture pour les enfants, une nuit du conte avec des vieilles femmes qui ont raconté des histoires et des légendes pour les petits, une caravane médicale qu'elle compte bientôt renouveler, et un projet écologique qui est le tri sélectif des déchets ménagers. «C'est un projet à long terme, car cela nécessite de changer complètement les habitudes des gens puis de transformer les déchets collectés. Donc cela suppose de créer ou d'intégrer des filières de recyclage. Nous avons planté 100 arbres fruitiers le long de la piste agricole, tout comme nous avons organisé une journée de l'arbre durant laquelle nous avons veillé à ce que chaque élève puisse planter son propre arbre. Nous avons également planté des arbres parrainés par des habitants du village. Chaque habitant parraine un arbre. Nous sommes une jeune association qui essaie d'activer avec les moyens du bord, mais nous avons notre propre siège, mis à la disposition de l'association par notre vice-président et cela nous aide énormément pour coordonner nos actions. Concernant l'hommage rendu au défunt poète Ahmed Lahlou, nous avons essayé de nous occuper surtout de l'organisation et de la logistique en recevant les nombreux invités venus parfois de très loin», dira Sad Bachir, secrétaire général de l'association.