Violette Daguerre vient de publier un ouvrage intitulé, L'Immigration : problématiques et défis, aux éditions du Cygne, à Paris. L'auteure, sans négliger les migrants d'autres origines ou régions du monde, a néanmoins centré une part notable de son travail sur la France et les immigrants d'origine arabe. Violette Daguerre justifie son choix par sa trajectoire personnelle. Madame Daguerre est une Libanaise vivant en France depuis plus de trois décennies. Elle est docteur en psychologie sociale et en psychologie clinique, et également présidente de la Commission arabe des droits humains, une ONG dont le siège est à Paris. Selon l'auteure, un terrien sur trente-cinq est migrant, en ce début du 3e millénaire. L'Europe fut pendant très longtemps un continent d'émigration de dizaines de millions de ses ressortissants vers les Amériques, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les Antilles, l'Afrique, etc. La tendance s'est ensuite inversée. Mais la mondialisation et la crise économique des pays capitalistes ont entraîné des restrictions draconiennes à l'entrée et au séjour des étrangers dans ces Etats. Les trajectoires migratoires se sont alors en partie modifiées : plus de 50% d'entre elles ont désormais lieu entre pays en développement. Les migrations humaines s'expliquent par divers facteurs, notamment par le pillage, pendant plusieurs siècles, des pays du tiers-monde par la domination coloniale, puis néo-coloniale, à partir des années 1960. Cela à travers le cycle infernal de l'endettement de ces pays, par le biais d'officines du système capitaliste international telles que le FMI, la Banque mondiale… et par l'échange inégal avec les pays capitalistes, par le moyen notamment de l'OMC. L'immigration, un bienfait économique, culturel et sportif pour les pays d'accueil Les migrants et leurs descendants constituent une perte pour leurs pays d'origine et un bénéfice pour les pays d'accueil. C'est ainsi que la France, manquant cruellement de bras, avait successivement demandé l'aide de centaines de milliers de travailleurs belges, italiens, polonais, espagnols, algériens… pour réussir sa révolution industrielle, qu'elle avait entamée au XIXe siècle, et pour se reconstruire, à cause de ses importantes pertes matérielles et humaines durant les deux guerres interimpérialistes (1914-1918) et (1939-1945), ainsi que pendant les Trente Glorieuses (de 1945 à 1975). Les réfugiés politiques en provenance de Russie et d'Europe centrale, surtout juifs, ont eux aussi contribué à combler son déficit démographique, ainsi que son essor économique et son rayonnement intellectuel et culturel. La reconstruction de l'Allemagne et l'essor économique de ce pays, à partir des années 1950, ont été atteints en partie, grâce à l'apport de pas moins de 12 millions de réfugiés et de rapatriés. En Espagne, une étude effectuée en 2005 par le conseiller économique du Premier ministre et une autre réalisée par une banque, ont montré l'apport non négligeable des immigrés à la croissance de ce pays dans les domaines de l'économie, de la consommation, de la création d'emplois, du niveau de vie, et pour combler son déficit, alors que leurs salaires étaient inférieurs de 30% en moyenne. Les immigrés en situation irrégulière, souvent surexploités, ne sont pas en reste. Ils participent eux aussi positivement à l'augmentation du PIB de la France et des autres pays européens. Une étude, réalisée en 2007 en Grande-Bretagne, indique que la régularisation éventuelle d'un demi-million d'immigrés « clandestins » rapporterait 1,47 milliards d'euros à l'économie, tandis que leur expulsion coûterait 6,9 milliards d'euros aux contribuables. L'intégration des immigrés et de leurs descendants avance inexorablement Selon certains chercheurs, l'intégration des immigrés et de leurs enfants est en bonne voie, en dépit de tous les obstacles dressés devant eux. Pour approfondir et accélérer ce processus, il est nécessaire, selon eux, d'améliorer de manière appréciable leurs conditions socio-économiques. Ce facteur est fondamental pour l'intégration des populations allogènes. Il faudrait également leur accorder certains droits civiques, notamment le droit de vote dans les élections locales, à l'instar des pays scandinaves et des Pays-Bas. Ces derniers ont accordé ce droit à leurs immigrés, sur la base du principe d'égalité entre tous ceux qui vivent sur leur territoire et qui participent à leur vie économique. Il s'agit aussi de prendre en compte les cultures d'origine des minorités, tout en mettant l'accent sur ce qui les unit, et non sur ce qui les différencie des valeurs et des lois des pays d'accueil, comme le préconise le Haut conseil de l'intégration, et encore moins les aspects de ces cultures qui pourraient les opposer à ces valeurs et lois. Enfin, il faut lutter contre les discours xénophobes, notamment musulmanophobes, et les discriminations à l'embauche, à la promotion professionnelle, au logement, aux études, etc, dont les migrants et leurs enfants sont victimes. Ces deux fléaux constituent un terreau fertile au communautarisme (à ne pas confondre avec communautaire) et à l'islamisme. C'est pour cette raison que la lutte contre les discours xénophobes et les discriminations est un combat éminemment laïque. Ces études mettent également en évidence un grand nombre d'indicateurs positifs d'intégration des immigrés originaires du Maghreb et de leurs descendants, qui sont de loin les plus nombreux parmi les populations allogènes en France. C'est ainsi que les deuxième et troisième générations de cette catégorie de la population se sentent nettement moins liées que leurs parents à leurs pays d'origine. Elles relèvent aussi la baisse de l'usage de leur langue maternelle au sein de leur famille ; l'augmentation de l'âge du mariage des femmes, âge qui tend à se rapprocher de celui des Françaises de souche ; ainsi que l'augmentation des taux des mariages mixtes et des unions libres ; du travail des femmes dans tous les domaines ; de l'accès aux professions libérales ; de la baisse importante du taux de natalité, de la polygynie, de l'endogamie communautaire…