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« La télévision c'est de l'émotion, l'internet c'est de la pulsion »
Monique Dagnaud. Sociologue et directrice de recherche au CNRS
Publié dans El Watan le 03 - 05 - 2010

Monique Dagnaud est sociologue et directrice de recherche au Centre national de recherches scientifiques (CNRS). Elle enseigne à l'Institut des études politiques (IEP) de Paris et à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Elle est auteure de plusieurs ouvrages, dont Comment la télévision fabrique la culture de masse ?, publié en 2006. Elle anime des chroniques médias sur le site d'information Slate.
Vous évoquez souvent l'autogestion de l'information. C'est quoi au juste ?
J'ai fait ce constat après avoir analysé un ensemble de statistiques sur l'information sur Internet. Aux Etats-Unis, 40% des internautes produisent de l'information ou la relayent. Quand vous consultez le Net, facebook ou autre, vous constatez une attitude critique vis-à-vis des journalistes professionnels. Cette conception du journalisme fait que des citoyens produisent de l'information, la commentent, donnent leur opinion, font circuler tout ce qu'ils trouvent sur le web, même s'il ne s'agit pas d'un vrai travail journalistique. Cela est valorisé sur le Net. Aujourd'hui, aux Etats-Unis et en France, l'internet est le troisième moyen d'information après la télévision et la radio.
Ce n'est pas forcément le cas en Algérie, puisque la télévision d'Etat est médiocre et produit peu d'informations...
Bien sûr que la situation est différente. Selon les gourous de Silicon Valley, comme Chris Anderson qui a écrit récemment un ouvrage intitulé Free, qui veut dire « libre » ou « gratuit » (free of charge), le métier de journaliste est fini. D'après ses dires, les gens n'achètent plus de journaux puisque l'information vient à eux via Twitter, facebook et autres. Elle vient à travers des amis qui utilisent ces instruments de communication. Il y a un désir pour l'autogestion de l'information. C'est une donnée nouvelle, surtout que les gens sont passionnés par l'information ; 25% des Français le sont. Il y a de l'information de type spectacle, comme c'est le cas pour la télévision avec l'utilisation de l'image, et celle produite par les journalistes de la radio et de la presse écrite.
On peut imaginer que tout cela cohabite de manière agréable, mais l'information sur Internet est très concurrente puisqu'elle est gratuite. Aujourd'hui, la presse écrite souffre énormément. Ces vingt dernières années, la diffusion de presse écrite a baissé de 20%. En France, la plupart des journaux quotidiens, comme le Monde, connaissent une diminution de leur diffusion. Les gens lisent parfois les éditions papier et l'édition électronique. Aujourd'hui, les recettes perdues sur le papier ne sont pas compensées par les recettes publicitaires sur Internet. Il y a un effet de ciseaux. C'est une véritable préoccupation pour les journaux en Occident. En 2009, un livre a été publié sous le titre La fin des journaux.
Ce n'est pas vraiment le cas en Algérie, parce que le web n'est pas suffisamment développé. Je ne sais pas ce qu'il en sera dans dix ans. En Europe, s'installer aujourd'hui à une terrasse de café en ouvrant son journal est devenu presque un geste rustique (…).
L'information en autogestion qui circule sur le Net relève plus de l'opinion, du commentaire et de la rumeur. L'opinion peut être également de la diffamation. La télévision c'est de l'émotion, le Net c'est pire que l'émotion, c'est de la pulsion. On réagit souvent sans réfléchir. On exprime ses sentiments avec les tripes. Il faut s'interroger sur quel type d'information véhiculer et sur la démocratie qui a besoin de médiateurs professionnels, sur ce qui se passe dans la société... Cette naissance du citoyen-journaliste peut être fortement critiquée, sauf qu'il y a un certain discrédit pour les journalistes, notamment en France. Ils sont parfois assimilés à la classe dirigeante. En France, il y a 70% d'internautes. Dans la catégorie des jeunes, ils sont 80% à accéder à Internet. L'information autogérée, subjective, pulsionnelle est valorisée dans ce monde des internautes.
Est-ce une chance pour la liberté d'expression, puisque beaucoup de choses passent par facebook et par les blogs, ce qui n'est pas le cas pour les médias traditionnels ?
Les internautes vous diront que oui. En France, la société est pluraliste. Les droits d'expression de l'opposition y sont garantis. Il y a une grande diversité de médias. Sur Internet, tout le monde peut s'exprimer et dire ce qu'il pense. Mais, qu'appelle-t-on « expression » ? Cela peut être une chance pour l'expression des subjectivités. Ce n'est pas nécessairement une chance pour l'expression d'une réflexion nourrie et informée sur la société. Une réflexion nourrie par une collecte de données. Aujourd'hui, aucun journal ne peut vivre s'il n'a pas de site web. Outre les nouvelles, le site web offre la possibilité d'avoir de l'interactivité. Cela devient nécessaire. Facebook permet également aux journaux de faire circuler beaucoup de nouvelles. Dans le monde, il y a 400 millions de personnes connectées sur facebook. En France, ils sont 18 millions.
Avec cette concurrence de l'internet, la télévision a-t-elle la même influence aujourd'hui ?
En France, il y a cinq réseaux nationaux, plus une centaine de chaînes par câble ainsi que la TNT. Il y a donc une profusion de services de télévision. La durée moyenne de suivi d'un programme de télévision n'augmente plus, elle stagne : elle est de 3h25. Elle diminue quelque peu chez les jeunes, notamment chez les 14-24 ans, au profit de l'internet. On passe une à deux heures par jour à naviguer sur la Toile. Le journal télévisé demeure une grand-messe nationale ; il y a un aspect fédérateur. Les gens ne se voient pas, mais regardent tous ensemble. La télévision a encore la puissance de l'image. Cette puissance n'est pas encore assez présente dans le web. Il y a également une consommation de la télévision à travers Internet. Il y a ce qu'on appelle la télévision de rattrapage. Le JT est en fait très formaté avec les grandes nouvelles du monde en images et les faits divers. Les gens adorent les faits divers, car ils sont reliés à des questions de société.
Oui, mais souvent les faits divers sont amplifiés et prennent plus de place que les informations plus importantes. Une explosion qui tue cinquante personnes à Baghdad est réduite à quelques secondes en off, alors que les crèmes antirides bénéficient de 4 minutes de reportage ! Avouez que c'est exagéré...
Il y a le JT mais également des émissions d'information. En France, le JT donne les nouvelles du monde, cependant, il est concentré sur l'actualité nationale. Les télés doivent d'abord refléter les préoccupations et les tourments de la société. Consacrer 4 minutes pour le maquillage, j'ai du mal à le concevoir. Que le même temps d'antenne soit consacré à l'échec scolaire ou aux inégalités sociales, je peux le comprendre (…). Les professionnels qui confectionnent les JT le font en fonction de ce que veulent les gens.
En ce moment, la société française est fragilisée. Beaucoup de sujets de société sont mis en avant comme le chômage, les effets de la crise financière, l'école, la violence…
Les JT sont au même formatage, avec des sujets assez courts. Ils sont enclins à traiter les mêmes sujets. Il reste que l'image est, par essence, dans le compassionnel et le spectaculaire. En France, l'information est en règle générale de bonne qualité. Le défaut serait qu'elle est orientée vers le fait national. C'est la même chose en Allemagne et en Grande-Bretagne. La presse quotidienne dite de qualité est censée développer des analyses et donner des clefs de compréhension. Sur le Net, il y a le site payant Mediapart qui publie des enquêtes. Il est l'un des rares à le faire. Mais il s'adresse à un petit public. En règle générale, des sites tels que Mediapart, Slate ou Rue89 sont déficitaires par manque d'abonnés ou de publicité. Sur le web, on peut faire beaucoup d'audience et peu de publicité. Le Net ne capte que 5% de la publicité, en France, contre 40% pour la presse écrite et 30% pour la télévision...
ABC News prévoit de réduire ses effectifs aux Etats-Unis. Alors, la télévision est-elle en crise ?
Pour le moment, il n'y a pas de plan de diminution des effectifs dans les télévisions, comme au niveau de ABC News. Mais des plans de départs volontaires pour les journalistes existent pour la presse écrite en France. La télévision reste le premier moyen d'information pour le citoyen, en France et aux Etats-Unis. Aux USA, ce sont plutôt les télévisions locales.


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