Cet éminent sociologue, nommé par certains de ses proches le « Socrate algérien », est né en 1933 à Aghbala, près de Sidi-Aïch (W. de Bejaïa). Il a poursuivi ses études secondaires au lycée de Bejaïa avant d'entrer à l'Ecole Normale de Bouzaréah. Sa nomination en tant qu'instituteur dans la Casbah d'Alger, lui permet d'étudier la philosophie et la psychologie à l'Université d'Alger. Il y rencontre le futur « leader » de la sociologie française, Pierre Bourdieu, avec lequel il noue une relation intellectuelle et personnelle très forte. En 1963, il se rend en France, d'abord au Centre de sociologie européenne dépendant de l'Ecole des hautes études en sciences sociales. En 1977, il intègre le CNRS (Centre national de la recherche scientifique) où il devient directeur de recherches en sociologie. Ses travaux s'orientent vite vers la question de l'émigration qu'il ne cessera d'approfondir tout au long de sa carrière jusqu'à devenir une référence mondiale en la matière. C'est lui qui mettra en lumière la dualité du rapport émigré-immigré sans laquelle il est impossible d'analyser le statut de populations prises entre leurs « variables d'origines » (la société dont ils sont issus et qu'ils portent en eux et tentent de reconstituer) et leurs « variables d'aboutissement » (leur rapport à une société étrangère, non pas seulement en tant que force de travail). De même, ses recherches font ressortir pour la première fois l'existence de générations d'émigrés, aux motivations et comportements liés mais différents. D'une manière générale, il permet une lecture de l'émigration-immigration, non plus comme un phénomène économique aux conséquences sociales plus ou moins identifiables mais comme un fait social « dans sa globalité ». Il a également introduit la perspective historique de l'émigré-immigré en liant sa situation au phénomène de la colonisation-décolonisation. Ses recherches qui font encore autorité ont été utilisées par de nombreux sociologues dans le monde travaillant ou ayant travaillé sur d'autres émigrations. Il a écrit d'innombrables contributions sur la question dans les revues spécialisées ainsi que plusieurs ouvrages qui demeurent des références. On citera notamment « L'immigration ou les paradoxes de l'alterité » (En deux tomes. Ed. Raisons d'agir, Paris, 2006). Abdelmalek Sayad est décédé en mars 1998.