Le souvenir du printemps noir de 2001 a été très présent hier à Béjaïa chez les milliers de manifestants qui ont marché pour le dix-septième vendredi de suite. L'on s'en souvient surtout de l'historique marche du 14 juin 2001 qui a fait déplacer des centaines de milliers d'Algériens venus des quatre coins de la Kabylie pour marcher à Alger et remettre pacifiquement à Bouteflika la plateforme de revendication adoptée par le mouvement dans la ville d'El Kseur. Un million, deux millions ou peut-être plus, la mobilisation était telle que les rues d'Alger ont contenu des vagues humaines que l'on a jamais vues de l'histoire du pays. Beaucoup parmi ceux qui ont vécu cette manifestation, réprimée dans le sang par les forces de l'ordre, se sont déplacés en masse ce vendredi sur Alger. Ils disent tenir leur revanche sur le pouvoir qui avait décrété au lendemain de la marche du 14 juin 2001, par la voix de Ali Benflis alors chef du gouvernement, l'interdiction de toute manifestation de rue dans la capitale. Pour ce 18e anniversaire de la marche historique, beaucoup sont partis des localités de Béjaïa où la rue ne s'est pas pour autant vidée de ses manifestants. Ils étaient des milliers à répondre à l'appel du 17e acte. Les « ulac smah ulac » (pas de pardon), et « pouvoir assassin » criés parfois avec rage, sont plus que jamais d'actualité, rappelant l'impunité des gens qui ont tiré sur des manifestants pacifiques en 2001. « On a perdu la bataille, juin 2001, mais pas la guerre, juin 2019 » est-il écrit sur une longue banderole noire, suggérant que l'histoire a fini par donner raison au combat des générations 2001 et d'avant. Deux dates ont été juxtaposées sur des pancartes et des banderoles, pour rappeler un long combat devenu depuis le 22 février dernier commun à tous les Algériens : « 14 juin 2001, 14 juin 2019 ». Les portraits des victimes du printemps noir ont été brandis par des manifestants par devoir de mémoire, pour leur rendre hommage mais surtout pour lutter contre l'oubli et transmettre le témoin à la nouvelle génération. Une partie des jeunes manifestants qui sont impliqués dans le mouvement du 16 février n'ont pas vécu les douloureux événements du printemps noir qui a fait au moins 126 victimes tombées pendant le tout premier mandat de Bouteflika. « Martyrs de la liberté » est-il écrit sur une banderole portée par des militants de la cause amazighe.