A défaut d'une détection à temps, le cancer du sein peut entraîner le décès dans 98 % des cas. Les chiffres avancés par les conférenciers en la matière lors des 6èmes journées de formation en imagerie médicale organisées à l'hôtel Sabri de Annaba ne laissent pas indifférents. En Algérie, le nombre de cas recensés est passé de 2 000 à 7 000 par an entre 2003 et 2008 pour atteindre 9 000 en 2009. Il est la première cause de mortalité parmi la population féminine. En cas de survie, les conséquences sont graves puisqu'il s'agit, malheureusement, souvent d'une mutilation qui affecte de manière irrémédiable la qualité de vie de la femme et de son environnement familial et social, explique le Pr. M. Boubrit du CHU Béni Messous. Pourtant, s'accordent à dire les animateurs de la rencontre à l'adresse d'un parterre de plus de 300 participants issus de toutes les régions du pays, ce cancer peut être soigné s'il est détecté à temps. De plus, le coût est 10 fois moins important que pour un cas en stade avancé, qui est de l'ordre de 250 000 euros. Ce constat a poussé beaucoup de pays à mettre en place des programmes de dépistage par mammographie, seul moyen de repérer la maladie à un stade curable. C'est pourquoi des moyens colossaux ont été mobilisés par notre pays en vue d'équiper les CHU en mammographes numériques. La mammographie demeure, cependant, difficile à interpréter car même les radiologues spécialisés ne détectent pas certains cancers, notamment les plus petits qui peuvent être traités plus facilement. Le cas d'une jeune malade évoqué - qui a ému plus d'un parmi l'assistance - est un exemple édifiant. Son cancer a eu raison d'elle car traité par ses médecins comme étant un simple abcès. C'est pourquoi, l'introduction des nouvelles technologies du numérique et de l'aide au diagnostic s'est avérée la solution la plus efficace, ont expliqué les conférenciers. Au cours de cette dernière décennie, l'incidence du cancer du sein est passée au triple dans la seule capitale, Alger, a fait savoir le Pr. K. Bouzid. Déficit criard en spécialistes de l'imagerie Eu égard à cette sensible évolution de l'incidence, au nombre élevé de cas avant 50 ans, au très faible parc de mammographes et à l'absence d'imageurs experts, le Pr. K. B. estime qu'il serait judicieux de commencer un dépistage systématique de masse, dans quelques régions pilotes bien définies, en utilisant les nouvelles techniques telle que la mammographie numérique. Mais, souligne t-il, un dépistage systématisé de masse en Algérie comme dans tout autre pays du monde reste tributaire d'une décision politique, à prendre par les autorités sanitaires. Par ailleurs, ce spécialiste préconise d'accorder une attention particulière au dépistage familial pour la réussite duquel l'accompagnement psychologique des sujets à risque par des professionnels est incontournable. À partir de Annaba, les professionnels de l'imagerie médicale, ainsi que les responsables des structures sanitaires publiques et privées ont, en outre, appelé l'Etat à revoir sa politique dans les procédures des lettres de crédit liées au circuit de l'import. Ils estiment, à l'unanimité, inconcevable de soumettre leur activité, dont l'enjeu n'est pas des moindres s'agissant de la santé publique, aux mêmes règles que celles régissant l'importation de pièces auto ou de produits de luxe. Et, même si les politiques jugent légitime cette revendication, ils attendent que des propositions réalisables leur soient faites par les opérateurs économiques de ce secteur sensible. « Au cas où un mammographe tombe en panne, vu la lenteur et la complexité des procédures de paiement par lettre de crédit, je vous laisse imaginer les incidences pouvant être induites par ce retard sur l'état de santé des malades. Mêmes nos fournisseurs trouvent ça aberrant », relèvent nos interlocuteurs. Aussi, ils ont tenu à soulever le déficit criard en matière de spécialistes et manipulateurs en radiologie et imagerie dont souffre notre pays. À ce titre, ils interpellent les pouvoirs publics pour qu'ils multiplient les actions allant dans le sens d'une formation plus accrue dans ces spécialités et à encourager les quelque 400 sommités nationales en radiologie, qui profitent aux hôpitaux étrangers, à revenir au pays.