Mesures annoncées à grand bruit reportées. Une commission chargée d'appliquer la décision du gouvernement relative à l'adoption de la «transparence et l'objectivité» dans l'octroi de la publicité publique a été annoncée par le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Hassane Rabehi. «J'ai donné des instructions fermes aux responsables de l'ANEP pour trancher quant à l'exécution des décisions du gouvernement (réuni le 3 avril, ndlr) à travers la mise en place d'une commission constituée de personnalités ayant les compétences requises pour se concerter avec tous les partenaires des secteurs public et privé», a dit, la main sur le cœur, M. Rabehi lors d'une visite à l'ANEP, a rapporté l'APS. Dans la foulée, de nouvelles règles devaient être mises en place : l'octroi de la publicité étatique devra se baser, à en croire le ministre, sur les principes de «la déontologie, la transparence et l'équité». Un conseil de l'éthique et de la déontologie permettrait la concrétisation de ces principes annoncés tambour battant par le ministre du gouvernement Bedoui (voir El Watan du 11 avril 2019). Plus de cinq mois après, rien n'a été concrétisé par la tutelle concernant cette commission et les mesures dont devaient bénéficier les médias publics et privés. La situation de la presse est toujours difficile. Des journaux, deux pour être précis (El Watan et Liberté), sont toujours privés de publicité institutionnelle, alors qu'ils ont un lectorat bien assis depuis plusieurs années. D'autres supports médiatiques (journaux et chaînes de télévision offshore, de droit étranger), depuis 2014, bénéficient des largesses de l'ANEP. Contre toute logique économique. Ayant bénéficié de la manne quand son propriétaire, Ali Haddad, était dans les bonnes grâces du système Bouteflika, les journaux du groupe médiatique Temps Nouveaux, ayant connu ces derniers jours un mouvement de protestation, ont réduit leur pagination (16 pages au lieu de 24). Levée du monopole de l'ANEP Un encart publié dans l'édition d'hier de la version francophone Le Temps précise que le groupe est privé de la publicité étatique depuis le 9 juin. Un SOS est lancé, lit-on dans le texte, aux responsables concernés «pour rétablir la situation et éviter la mise au chômage des travailleurs. Car sans la publicité de l'ANEP, c'est carrément la mise à mort de deux journaux». Ce constat amer doit s'appliquer à d'autres rédactions pas du tout loties en matière de publicité publique. El Watan est privé de la publicité de l'ANEP depuis 1993, suite à une décision du chef de gouvernement, Belaïd Abdeslam, qui a voulu dénoncer par son oukase des journalistes qualifiés de «laïco-assimilationnistes». Quelle serait la solution à ce blocage ? D'aucuns évoquent la décision de la levée du monopole politique et la gestion transparente de l'octroi de la publicité étatique. «Si la proclamation du gouvernement en faveur du principe de justice et d'impartialité dans la distribution de la publicité publique dans les médias, sans aucune distinction entre le secteur public et le secteur privé, est en elle-même louable, la mise en œuvre de ce principe par le recours au même procédé, en l'occurrence confier la gestion de la publicité institutionnelle à l'ANEP, y compris la publicité des entreprises et sociétés publiques, n'est pas pertinente et serait inefficace pour la simple raison que le monopole exercé par cette agence, quand bien même il est adossé à une commission de contrôle, fausse le jeu de la libre concurrence», précise à raison Mohamed Brahimi, avocat spécialiste de l'économie de la presse.