L'opération de lancement du baccalauréat professionnel a bel et bien commencé. Une commission a été officiellement installée. Les responsables de trois secteurs, à savoir l'Education nationale, la Formation et l'Enseignement professionnels et l'Enseignement supérieur et la Recherche scientifique, en parlent comme le projet du siècle. A voir la situation actuelle du secteur de l'éducation, quel est aujourd'hui le degré de faisabilité d'une telle démarche ? Le gouvernement actuel a-t-il les moyens de cette nouvelle politique ? Interrogés à ce sujet, les syndicalistes de l'éducation restent sceptiques. Même s'ils applaudissent cette décision, ils reprochent à ses initiateurs beaucoup de points. «Nous avons toujours revendiqué l'organisation d'un bac professionnel. Toutefois, dans notre vision, c'est le ministère de l'Education qui devrait en être l'organisateur et non celui de la Formation professionnelle. Pour nous, c'est à l'école classique que les penchants des élèves vers un travail manuel ou des études académiques apparaissent», explique Zoubir Rouina, président du Conseil des lycées d'Algérie (CLA), qui voit en cette démarche un rempart à la déperdition scolaire. Pour Meziane Meriane, coordinateur national du Syndicat des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Snapest), le bac professionnel aurait dû être instauré avant la fermeture des lycées techniques. «Le gouvernement devait remettre en place ce diplôme professionnel avant la fermeture des technicums afin de profiter du savoir des professeurs du technique et du matériel. Délaissés pendant des années, des ateliers entiers, avec tout le matériel qui va avec, sont la proie de l'érosion», souligne le syndicaliste qui s'interroge sur qui devrait réellement prendre en charge l'établissement des programmes et surtout l'utilité d'un baccalauréat professionnel pour ceux qui vont l'obtenir. Dans ce même ordre d'idées, Boualem Amoura, secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs de l'éducation et de la formation (Satef), dit ne pas oublier qu'avant la suppression de cette formule du bac, les orientations étaient une «mascarade». «Imaginez un élève de la filière fabrication mécanique orienté en droit. Avant 2003, année de suppression du bac professionnel, nous avions des établissements formidables, des enseignants de grande qualité et des élèves qui sortaient avec des connaissances et des compétences extraordinaires en technologie. Au lieu de réviser le système d'orientation vers l'université qu'il y avait à l'époque, les autorités sont allées vers la solution radicale, qui est la suppression pure et simple de ce bac», dénonce-t-il. Que ce soit pour Messaoud Boudiba, porte-parole du Conseil national des enseignants du secondaire et du technique (Cnapest), ou des autres syndicalistes, il est aujourd'hui faisable de réintroduire le bac professionnel mais avec beaucoup de conditions, dont essentiellement léguer cette mission au ministère de l'Education. Une commission à tout faire En réponse à toutes ces questions, l'actuel ministre de la Formation professionnelle, Dada Moussa Belkhir, avait déclaré, lors de l'installation de la commission interministérielle chargée de l'étude et la préparation du bac professionnel, que cette dernière a pour principale mission de proposer une nouvelle vision à l'enseignement professionnel, incluant ce nouveau baccalauréat et tout ce qui va avec, dont entre autres les différents modes d'enseignement et les filières et spécialités qui sont déjà enseignées à l'université. Composée des représentants de ces trois ministères ainsi que de la direction générale de la Fonction publique, cette commission devra, selon lui, préparer les programmes d'enseignement, élaborer les paramètres de passage des élèves de l'enseignement classique au professionnel, selon des normes bien établies, et étudier minutieusement les méthodes d'organisation de l'examen final du baccalauréat professionnel. En plus de toutes ces tâches, elle est également censée proposer une révision générale du système d'orientation des élèves dans tout le système éducatif. Dans la conception de cette démarche, le bachelier de l'enseignement professionnel aura le choix entre aller directement vers le marché de l'emploi ou poursuivre des études supérieures à l'université ou dans les établissements de la formation et de l'enseignement professionnels.