Renseignements pris auprès de l'inspection du travail, des dizaines de conflits individuels opposant des employés à leurs patrons sont enregistrés chaque année dans les secteurs du bâtiment et des services et chez un grand nombre d'investisseurs de la dernière génération, dont les cas suivants : Toufik Keraïmia, employé comme conducteur de camion entre 1999 et 2005 chez un magnat local du fer, est resté pendant des années sans déclaration au niveau des assurances sociales, sans attestation de travail, sans fiche de paie et pendant quelques mois sans salaire même. En tentant de faire valoir ses droits, son employeur qui fait partie d'une caste placée au dessus des lois à Souk Ahras, allonge la liste des infractions par un licenciement abusif. Portée devant la justice, l'affaire a abouti à la reconnaissance des droits de la victime par le tribunal de Souk Ahras, mais point d'application des verdicts à cause des appels faits par l'employeur. Condamné à une peine de prison avec sursis et à verser des dédommagements au plaignant par la même instance, ce dernier redoublera d'efforts pour faire durer le supplice de son ex-employé et engagera trois avocats, après appel au niveau de la cour de Guelma. C'est là où l'affaire connaîtra un revirement à 180° des verdicts prononcés initialement. D'innombrables doléances, où la victime a répertorié un canevas d'anomalies dans les procédures judiciaires, étoffées par des documents, ont été adressées aux responsables centraux dont le ministre de la Justice et garde des Sceaux. « Mon employeur préfère engager une guerre d'usure que de régulariser ma situation parce qu'il sait pertinemment que je ne supporterai pas autant de dépenses », a déclaré Toufik en parlant des dix procès de son affaire. Ahmed Brinis est un autre employé qui se dit « victime de décisions abusives » de la part de l'administration de la caisse nationale du logement (CNL) où il était employé comme chauffeur. Sanctionné par ses responsables à cause d'une faute professionnelle, son contrat de travail, établi pour une durée déterminée et renouvelable, ne sera pas reconduit. L'affaire est actuellement devant la justice et l'employé en question parle de « séquelles morales et de troubles neuropsychologiques » dus à la rupture de son contrat de travail. Dans son dossier, neuf de ses collègues témoignent, sur papiers signés et portant légalisation des services de l'état civil, de sa bonne conduite et de sa correction pendant l'exercice de ses fonctions.