Les manifestants antigouvernementaux tentent de poursuivre leur mouvement, alors que la plupart des forces au pouvoir cherchent à monter l'opinion publique contre la présence américaine en Irak. La contestation populaire contre le pouvoir central a connu hier de nouvelles violences en Irak. Selon des médias, de nouveaux heurts se sont déclenchés entre les forces de sécurité et les manifestants sur les principaux sites de la protestation à Baghdad et le sud du pays. Au sud après minuit, des hommes armés ont pénétré sur la place Habboubi, à Nassiriya, mettant le feu à des tentes de manifestants. Un protestataire a été tué et quatre autres blessés. Dans la ville portuaire de Bassora, des étudiants ont dressé de nouvelles tentes, après le démantèlement de leur campement samedi par les forces de l'ordre. Dans la ville sainte de Najaf, les manifestations ont repris hier. Dimanche, trois roquettes ont encore frappé, dont une pour la première fois directement, l'ambassade américaine à Baghdad, faisant un blessé. Quelques heures après les tirs, les Etats-Unis ont appelé Baghdad «à remplir ses obligations, afin de protéger (leurs) installations diplomatiques». L'Irak est secoué depuis le 1er octobre par un mouvement de contestation populaire. Les manifestants réclament, entre autres, des élections anticipées, un Premier ministre indépendant, la fin de la corruption et du système politique de répartition des postes en fonction des ethnies et des confessions. Comme ils rejettent toute ingérence dans le pays, qu'elle soit iranienne ou américaine. Sous la pression de la rue, le Premier ministre, Adel Abdel Mahdi, a démissionné en décembre, mais continue de gérer les affaires courantes. La répression de la contestation a fait jusque-là plus de 470 morts, selon des sources sécuritaires et médicales. Impasse Après avoir perdu de son souffle dans le sillage de l'élimination par les Etats-Unis, le 3 janvier à Baghdad, du général Qassem Soleimani, émissaire iranien en Irak, le mouvement est relancé le 19 pour faire aboutir ses revendications. Vendredi, les forces de l'ordre ont commencé à pénétrer dans les principaux camps des manifestants. Le même jour, Moqtada Sadr a mobilisé des milliers de ses partisans pour réclamer le départ des 5200 soldats américains stationnés en Irak. Une marche soutenue par le Hachd Al Chaabi, une coalition de paramilitaires pro-Iran intégrée à l'Etat irakien. La plupart des factions de ladite coalition sont vues par les Etats-Unis comme une extension de l'influence iranienne en Irak. Washington a accusé ces groupes d'être derrière la série d'attaques contre des intérêts en Irak ces derniers mois. Dans un communiqué lu par un porte-parole, Moqtada Al Sadr a appelé au retrait des forces américaines d'Irak, à l'annulation des accords sécuritaires entre Baghdad et Washington et à la fermeture de l'espace aérien irakien aux avions militaires américains. Comme il a exhorté le président américain, Donald Trump, à ne pas être «arrogant» face aux responsables irakiens. Et d'ajouter : «Si tout cela est fait, nous traiterons (avec les Etats-Unis) comme avec un pays non occupant, sinon, nous les considérerons comme un pays hostile à l'Irak.» Le jour même de la mort du général Souleimani, Moqtada Al Sadr avait réactivé son armée appelée «l'Armée du Mahdi». Faction gelée en 2007 après avoir combattu les soldats américains pendant l'occupation américaine de l'Irak (2003-2011). «L'assassinat de Soleimani (…) vise le djihad, l'opposition et l'esprit révolutionnaire international, toutefois, notre détermination restera intacte», a-t-il déclaré en la circonstance. Aussi, il a donné l'ordre d'alerte maximale, notamment à l'Armée du Mahdi, afin d'être pleinement prêts à protéger l'Irak. En avril 2016, les partisans de Sadr sont parvenus à pénétrer au sein de la «zone verte» ultra sécurisée de Baghdad qui abrite, entre autres, les ambassades étrangères.