– Selon l'Organisation internationale du travail (OIT) quelque 25 millions de personnes pourraient se retrouver au chômage à cause de la pandémie de Covid-19. Elle prévoit en outre une baisse drastique du revenu des travailleurs. Avec un taux de chômage réel dépassant les 20% (selon les experts), quels impacts cette crise sanitaire aura sur le marché de l'emploi chez nous ? Absolument. A cause de cette pandémie, des millions de travailleurs ont déjà perdu leurs emplois dans le monde à cause des licenciements économiques, la mise en arrêt de plusieurs unités industrielles et des services. Les salariés les plus touchés sont ceux des PME-PMI, notamment celles liées avec des contrats de sous-traitance avec les grandes entreprises. La globalisation libérale et l'interdépendance de l'économie mondiale aura un effet domino sur les emplois, notamment précaires. Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), 3 à 4 milliards de personnes vont basculer dans la totale précarité. L'humanité va devoir aussi faire face, dans un avenir proche, à la «pandémie» du chômage. La perte des emplois touche essentiellement le secteur du PTP, cafés et restauration, hôtellerie et autres services. En Algérie, dont la population active est estimée à 11,048 millions de travailleurs, le secteur privé emploie 6,95 millions de personnes, soit 63% du nombre total des travailleurs en Algérie, selon l'Office national des statistiques (ONS). Quant au secteur public, il en absorbe près de 4,09 millions, soit 37% de la population occupée. Une enquête précédente de l'ONS démontre que plus 35% de la population active ont un statut précaire, des travailleurs concentrés essentiellement dans le secteur du BTPH, services, agriculture et pêche, hôtellerie, journaliers, y compris dans la presse… pour ne citer que ceux-là. – Astreint au confinement, sans contrepartie, quel sort pour les travailleurs au noir, les journaliers, ouvriers et commerçants de l'informel, qui capte la part prépondérante de l'économie nationale ? Ces millions de précaires (hommes et femmes) sont en ce moment sans revenus et sans épargne conséquente pour affronter les semaines ou mois à venir. Si la situation perdure, on aura des millions de personnes sans ressources financières. Quant aux demandeurs d'emploi, ils peuvent attendre, car le peu de postes offerts sont bloqués. Dans un pays comme le nôtre, où les indemnités de chômage n'existent pas, cette situation va plonger des millions de famille dans la plus grande misère. Face à ce phénomène qui risque de se généraliser et de durer, notre gouvernement ne semble pas prendre en charge cette nouvelle donne due à cette crise sanitaire. Le décret exécutif n°20-69 du 21 mars 2020, relatif aux mesures de prévention et de lutte contre la propagation du coronavirus (Covid-19), n'intègre pas ces catégories de l'informel, ces travailleurs sont livrés à eux-mêmes. Il y a aussi les cas de contractuels de l'éducation nationale qui n'ont pas reçu leurs salaires depuis des mois, y compris en cette période exceptionnelle. Pourtant, ils sont dans le secteur formel. – Le secteur privé occupe 63% de la population active. Or, les mesures de soutien décrétées par le gouvernement ne couvrent pas, du moins pas expressément, les travailleurs du privé national. Vous avez fait des propositions à ce sujet, entre autres, l'instauration d'un revenu universel… Absolument, ce phénomène va toucher essentiellement les 63% de la population active qui travaille dans le secteur privé. Les premiers à être sacrifiés sont ceux sous contrat à durée déterminée CDD, les des milliers de salariés qui travaillent dans le cadre du dispositif pré-emploi (ANEM), les milliers de salariés qui travaillent dans le secteur de la sous-traitance, ceux des petites entreprises et celles en difficultés financières. Le décret exécutif n°20-69 du 21 mars 2020 relatif aux mesures de prévention et de lutte contre la propagation du coronavirus (Covid-19) stipule dans son article 6 qu'il est mis en congé exceptionnel rémunéré, au moins 50% des effectifs de chaque institution et administration publique. Ces mesures sont étendues au secteur économique public et privé. Alors, du point de vue de la réglementation, il est censé payer les salariés et sans défalcation des journées non travaillées des congés annuels. Mais sur le terrain, plusieurs entreprises privées ne respectent pas ces mesures. Les mesures de confinement et de couvre-feu ne feront qu'amplifier les choses, notamment dans les régions concernées par le couvre-feu de 15h à 7h. A cet effet, les inspections du travail sont interpellées à assumer leur rôle dans cette phase de non-respect des lois du travail en vigueur. Les syndicats, les travailleurs, les partis et militants de tout bord doivent se mobiliser davantage pour interdire tout licenciement économique et pour le paiement de l'intégralité des salaires pour les travailleurs confinés sans toucher à leurs congés annuels. L'Etat doit assurer des salaires à l'ensemble des travailleurs journaliers, des petits artisans, saisonniers de l'agriculture, femmes de ménage indépendantes, etc. Quant aux patrons qui ne respectent pas l'article 6 cité ci-dessus, les normes de prévention contre le Covid-19, qui continuent à faire travailler leurs salariés dans des secteurs non essentiels, ils doivent être sanctionnés durement.