La capitale de l'Ouest, Oran, une mégapole qui rassemble plusieurs millions de personnes chaque été, souffre atrocement de l'absence de véritables espaces de détente à la hauteur de sa réputation de ville ouverte, de cité tournée vers la mer. En effet, et à part quelques îlots de distraction urbaine, Oran n'arrive toujours pas à se créer des endroits conviviaux assez spacieux pour contenir beaucoup de monde et agrémentés par des crémeries, salons de thé et autres cafétérias pouvant permettre aux habitants et aux visiteurs de se prélasser sans contrainte d'espace durant les longues soirées d'été, d'autant que la ville s'y prête. Des lieux de regroupement et de citoyenneté qui pourraient réunir dans une ambiance décontractée les citoyens, notamment lors d'événements exceptionnels à caractère local ou national. Doter El Bahia, à l'instar de toutes les grandes agglomérations du monde d'une vaste esplanade est d'une nécessité absolue. Il semble d'ailleurs que le projet de création de grandes places avait été toujours été inscrit dans les programmes des assemblées populaires communales qui se sont succédées à la tête de la deuxième ville du pays. Dans cette perspective, il avait été question, au cours des années passées, d'un projet d'extension de l'actuelle place du 1er Novembre 1954, explace d'Armes, face au splendide Opéra construit au tout début du siècle dernier, vers l'emplacement du palais du Bey. On croit savoir que même les responsables de la 2e Région militaire s'étaient montrés disposés à céder une partie du terrain militaire jouxtant le mess des officiers. Ils le sont toujours. Mais l'idée, pourtant soutenue et espérée par la majorité des édiles locaux, demeure toujours au stade de projet. En été, ce ne sont pas seulement les habitants du centre-ville qui étouffent par manque d'esplanades. Des quartiers qui étouffent Pratiquement aucun des dizaines de quartiers de la ville ne dispose de lieux de détente appropriés pour les familles et les touristes qui choisissent Oran comme lieu de villégiature. Ces lacunes se retrouvent au sein des nouvelles cités qui ont poussé comme des champignons, notamment à l'est d'Oran, même s'il y a un léger mieux avec l'ouverture de grands accès routiers vers les localités balnéaires de Canastel et Belgaïd, là où précisément on a construit le nouveau pôle universitaire, là où on pense lancer de nouveaux projets structurants qui hisseraient Oran au rang de métropole méditerranéenne . Ces nouveaux sites d'habitat collectif ne manquent d'ailleurs pas seulement de places publiques, mais de nombreux autres équipements d'accompagnement, les confinant à la fonction de cités-dortoirs, et plus précisément dans les nouvelles cités Es Sabbah, En Nour et El Yasmine, des forêts de bâtiments jouxtant l'immense quartier USTO. Certains habitants, désabusés, évoquent les immenses places qui font la fierté des villes étrangères aussi bien au Maghreb qu'au sud de l'Europe. C'est lancé avec un soupir qui en dit long sur leur déception à l'endroit d'une métropole qui n'a jamais manqué d'atouts pour réussir sa mue après les extensions urbanistiques successives qu'elle a connues. « Une situation à l'origine de la création de ‘‘la mentalité des ronds-points'', nous dit un pince-sans-rire qui explique : « Oui ! la ‘‘mentalité ronds points'' consiste à passer de longues heures à admirer le carrousel des véhicules autour des deux principaux ronds-points du Sheraton et du Centre des conventions sur la route des Falaises, en prolongement du pont Zabana et à humer les parfums dégagés par les tuyaux d'échappement… On ne cherche pas la place de la Concorde, l'esplanade du Champs de Mars, la place Rouge de Moscou, mais… » Rond-point … D'eau Devant l'exiguïté des lieux, les familles, par smalas entières, se bousculent devant le magnifique jet d'eau du rond-point du « Millenium » qui procure un plaisir pour les yeux et la fraîcheur pour le corps, et où les enfants, tout comme leurs parents, s'en donnent à coeur joie. Cela pourrait être bien sans l'énorme bouchon provoqué par les centaines de véhicules qui tournent autour, avec tous les risques pour les piétons qui débordent sur la chaussée. Les quelques petits espaces verts existants sont pris d'assaut, immédiatement après le repas du soir, par les familles riveraines, en quête de détente et de sécurité pour leur progéniture. Certains viennent carrément avec leur repas qu'ils consomment sur le gazon, entourés de leur marmaille. Mais le nombre de ces espaces de détente et de convivialité se comptent sur les doigts d'une seule main. Et c'est certainement leur cruelle absence dans les quartiers périphériques qui contraint les habitants de ces derniers à se rabattre sur le centreville. Là, faute de place, les badauds se mettent à faire les cent pas le long de l'emblématique boulevard du Front de mer. Avec ce sentiment d'être à l'étroit, les usagers souffrent également du manque affligeant de lieux d'aisance. La ville, qui était bien pourvue en toilettes publiques avant 1962, ne compte plus que quelques latrines, du reste mal entretenues, alors qu'il s'agit d'un équipement absolument indispensable, surtout si on veut faire d'Oran une métropole touristique de dimension méditerranéenne. A