C'est grâce à Abdelmadjid Meslem que la chanson chaâbie continue à drainer les foules et à s'affirmer, en ces temps de recul des anciens genres musicaux, comme partie prenante des mœurs culturelles à Souk Ahras. Fidèle aux paroles et aux rythmes des cheikhs initiateurs de cette musique, l'artiste n'a pas démérité le respect que lui vouent les mélomanes et autres intellectuels de Souk Ahras. Puisant souvent dans les qacidat des anciens, il se permet, toutefois, des innovations sans porter atteinte à l'esprit d'une touchia ou d'un istikhbar, adaptés au contexte voulu. Ce chantre à la voix rauque mais agréable à écouter, dont la réputation a dépassé les frontières de la wilaya depuis déjà deux décennies, a récidivé, vendredi dernier, dans le cadre d'un programme non-stop concocté par la direction de la culture. Un récital de 20 minutes, intitulé Souk-Ahras, ya bladi, dans lequel le chanteur a glorifié les martyrs, leurs hauts faits, les monuments de la région, ses érudits, ses repères et ses vertus naturelles. Il a fait comprendre au public qui a investi l'espace de détente situé à la cité Badji Mokhtar que l'innovation est permise, pour peu que l'âme de cette musique centenaire soit de rigueur. Selli houmoumek fi del âchia, un khlass emprunté du répertoire andalou, a fait danser un groupe de jeunes, bercés, quelques minutes auparavant, par une mélodie au verbe accessible mais pas forcément simple, et c'est là justement toute la force de la chanson chaâbie. Une trêve de quelques secondes et c'est reparti avec une troupe aguerrie dans l'art de dominer les humeurs et un public acquis d'office à la belle parole et au rythme enchanteur. Kan ândi tir m'rabbih (J'avais élevé un oiseau), Ya babour ellouh (ô bateau en bois), et bien d'autres chansons du patrimoine algérois ont servi d'ingrédients pour la réussite d'une soirée organisée en plein air, au grand plaisir des familles sorties prendre un bol de fraîcheur nocturne, après une longue et suffocante journée.