Pouvoir atterrir à l'aéroport Soummam Abane Ramdane de Béjaïa, en provenance de l'aéroport de Bâle-Mulhouse en France, est le rêve d'une importante communauté algérienne établie dans cette région du nord-est de l'Hexagone. Cela fait une année qu'un émigré, Djamel Idir en l'occurrence, en a fait une revendication qui a réuni autour d'elle du beau monde. Et elle demeure posée à ce jour. Pour les seules régions d'Alsace et des Vosges, elles seraient 36 000 personnes immatriculées au niveau du consulat algérien à Strasbourg. Binationaux non compris. Pour la Franche-Comté, la Lorraine et l'Alsace, le chiffre est à tripler. Parmi ce beau monde, se recrute une forte communauté kabyle forcée à transiter par Paris ou Lyon pour des vols sur Béjaïa. « Le nombre de ressortissants de la communauté algérienne originaires de la wilaya de Béjaïa et résidant dans le nord-est de la France (Alsace, Territoire de Belfort, Franche-comté et la Lorraine) est important. Pour se rendre à Béjaïa, les voyageurs sont contraints de se déplacer à Paris (aéroport d'Orly) ou à Lyon (aéroport St-Exupéry) où deux compagnies aériennes, Air Algérie et Aigle Azur, assurent la liaison. Dans le contexte actuel, pour un vol d'1h30, les voyageurs y consacrent la journée, ce qui entraîne une fatigue et un coût supplémentaire (non négligeable) ». La pétition, lancée le 20 août 2009, étale des arguments qui défendent la justesse de la demande d'ouverture d'une ligne Bâle-Mulhouse/Béjaïa. Chemin faisant, elle a réuni quelque 1450 signatures. « J'ai transmis la demande avec une pétition de plus de 100 pages à Air Algérie, je n'ai pas eu de retour à ce jour », nous apprend Djamel Idir, particulièrement engagé dans cette démarche « citoyenne ». Monter jusqu'à Paris pour prendre un avion sur Béjaïa ? Sur la grande toile, d'aucuns parmi les membres de la communauté algérienne à Mulhouse considèrent cela comme « un parcours du combattant ». A plus forte raison lorsqu'il s'agit de rapatrier la dépouille d'un parent. La peine est double. Et Djamel Idir l'a vécu lors du décès de sa grand-mère. Depuis, il a pris sur lui le dossier pour lequel il frappe encore à toutes les portes. Du petit noyau qui s'est formé autour de lui, depuis cette date-là, il en est aujourd'hui à porter la voix de plus de 1450 demandeurs d'une ligne aérienne Mulhouse Béjaïa. « Je ne sais pas où est-ce que ça bloque », avoue-t-il, impuissant. Déterminé, il a sollicité le concours de l'assemblée élue de la wilaya (APW), la direction des Transports, pris attache avec les élus locaux, des deux côtés de la Méditerranée. A Mulhouse, on a réussi à compter sur le soutien du maire et sur « le gros travail » de la députée du Haut-Rhin, Mme Arlette Grosskost. Du côté du gouvernement français, une telle liaison est réalisable. C'est ce qu'estime le secrétariat d'Etat chargé des Transports qui met cependant un bémol. « L'ouverture d'une telle liaison aérienne par un transporteur aérien français est possible, au regard de l'accord bilatéral régissant les relations aériennes entre la France et l'Algérie. Pour autant, l'initiative d'ouvrir une semblable liaison appartient aux seuls transporteurs aériens. Aussi, ai-je transmis le dossier de M. Idir au Président de la compagnie Aigle Azur, citée par l'intéressé. Cette société pourra ainsi examiner les éléments mis en avant, en faveur de l'ouverture de tels services », a répondu, à la députée, le secrétaire d'Etat chargé des Transports. Entre-temps, une compagnie aérienne, Air Méditerranée en l'occurrence, a trouvé opportun de lancer, depuis fin juin dernier, une liaison hebdomadaire de Bâle-Mulhouse mais pour desservir l'aéroport de Jijel, le temps de l'été. Pour le secrétaire d'Etat français chargé des Transports, cette liaison répond « en grande partie aux souhaits exprimés par M. Idir au nom des résidents du nord-est de la France, originaires de la Kabylie ». Il s'agit, en fait, d'un charter en partance de Paris qui fait escale à Mulhouse pour la destination de Jijel, à une centaine de kilomètres de Béjaïa. Comme Djamel Idir, nombreux sont ceux qui sont obligés de prendre l'avion à partir de Sétif pour rallier la région de l'Alsace en un seul vol. « 50% de ceux qui le font à partir de Sétif sont de Béjaïa », soutient notre interlocuteur. Depuis plus d'une année, un vol d'Aigle Azur est programmé, chaque mercredi, de Sétif vers Mulhouse. Quatre autres, d'Air Algérie et d'Aigle Azur, le font chaque semaine à partir de Constantine, dont deux pour la saison estivale. Il est possible de rallier Mulhouse aussi à partir d'ailleurs, depuis la lointaine Oran par exemple. Mais aucun ne décolle de l'aéroport international de Béjaïa. Les demandeurs de la ligne directe sur Béjaïa ne comprennent pas « l'absence d'une offre commerciale adaptée » et que l'on n'exploite pas une destination qui, soutiennent-ils, « suscite ces dernières années un intérêt grandissant ». On attire l'attention que « les voyageurs qui désirent se rendre en Algérie, pendant la période estivale ou en dehors de ces dates, sont découragés par un tel périple (en particulier les aînés) ».