La fripe, « El Khorda », ou encore « Chiffoun » par allusion à chiffon (vieux vêtements), sont des concepts qui n'émeuvent presque personne par les temps qui courent. Il est bien derrière nous le temps où le chaland en quête d'une veste ou d'un pantalon à bon marché éprouve gêne et désappointement en remuant le ballot d'habits usagés au niveau des étals des chiffonniers pour dégoter l'objet recherché. Mieux encore, le marché de la fripe n'est plus comme autrefois l'apanage des seuls hommes qui avaient un droit quasi régalien sur ces bazars à ciel ouvert qu'ils fréquentaient comme bon leur semble. Aujourd'hui, des dizaines de mères de famille accompagnées de leurs mômes, des couples distingués et des femmes, passent leur temps à déambuler au milieu des aires des fripiers. Il y en a même qui prennent le bus pour aller faire leurs emplettes au niveau des marchés hebdomadaires régionaux de Aïn Smara, Tadjenanet, Chelghoum Laïd, Mila, Khroub, etc. Après tout, le jeu en vaut vraiment la chandelle, puisque de centaines de chefs de famille arrivent à se procurer des vêtements de bonne qualité, voire neufs, sans pour autant casser leur tirelire. Au bonheur des petites bourses Tout le monde s'accorde à dire que le marché de la friperie est une aubaine qui permet aisément de faire des économies substantielles en s'habillant correctement soi-même tout en faisant profiter ses enfants. Importée du Canada, de Tunisie, d'Europe, d'Asie et des Etats-Unis, la friperie est entrée, ces deux dernières décennies, par la grande porte dans les mœurs vestimentaires des Mileviens, à l'instar des citoyens d'autres régions du pays. Grâce à cette gamme de produits dont les prix sont largement abordables, tant au niveau des souks quotidiens et hebdomadaires que dans les nombreux magasins spécialisés dans ce créneau, la plupart des ménages au revenu modeste font des économies appréciables. Car, se fringuer dans les boutiques d'habillement de la ville revient cher, surtout pour les familles nombreuses. « Je viens régulièrement au souk de la friperie pour acheter des fringues. Ce n'est pas cher et puis la modeste paie de mon mari ne nous permet pas d'acheter du neuf », note une femme d'un certain âge. Un père ayant six gosses à charge, dont quatre scolarisés, illustre parfaitement cet état de grâce en affirmant : « Pour 2 000 ou 2 500 DA on peut habiller un enfant de 10 à 12 ans des pieds à la tête. » En effet, au marché de la fripe il y en a pour tous les goûts et pour toutes les bourses. Et ce n'est certainement pas les bonnes occasions qui manquent. L'on peut dénicher sans coup férir une veste en très bon état pour 300 à 400 DA, un manteau en cachemire pour 800 à 1000 DA, un beau T-shirt pour 150 à 200 DA et des pantalons pour 300 DA.