Les données chiffrées sur les pertes d'animaux lors des derniers incendies ne sont pas rendues publiques. La Direction générale des forêts (DGF) dit ne pas avoir enregistré de pertes d'animaux sauvages. Zoom sur les dégâts que peuvent occasionner les feux de forêt sur la faune. La Direction générale des forêts (DGF) affirme que cette année, aucune perte de faune sauvage causée par les incendies de ces dernières semaines n'a été enregistrée. Mme Ilhem Kabouya, directrice de la protection de la faune et la flore à la DGF, affirme qu'aucune perte n'est à déplorer, même si les animaux domestiques ne sont pas du ressort du recensement de cette direction. Plusieurs riverains ont en effet déploré la perte de leur cheptel ou ruches. Pour ce dernier détail, aucune statistique n'est encore rendue publique. Le Pr Gahdab Chakali, du département de zoologie agricole et forestière à l'Ecole nationale supérieure agronomique d'Alger, évoque la difficulté à estimer les dégâts s'ils existent. Sur la base des enquêtes conduites auprès des forestiers sur la faune touchée par les incendies, une diversité de vertébrés et surtout d'invertébrés a connu un impact sur son territoire difficile à estimer en espèces et en nombre, affirme t-il. Car, il faut savoir que les incendies constituent actuellement la première cause de la destruction de la forêt en Algérie. Elle a supplanté de loin le déboisement et les coupes illicites. Cette année, apparemment, nous sommes loin des scénarios dramatiques enregistrés dans le passé. L'année dernière, dans les forêts de Saharij à Bouira, plusieurs singes ont été calcinés dans les feux de forêt. En 2002, plus d'une dizaine de singes magots ont été retrouvés calcinés dans les forêts de Tikjda. Par leur vitesse de propagation et les vents qui ont sévi à cette époque, les feux de forêt ont décimé des familles de singes qui étaient encerclés et brûlés par les flammes. En 2012, des tortues et des hérissons ont été retrouvés calcinés dans les chênaies de la région de Tlemcen. Cette hécatombe reste très inquiétante pour diverses chaînes trophiques dans leur territoire et peut avoir une répercussion sur la biodiversité dans son ensemble (floristique et faunistique), explique Gahdab Chakali. Pour cet été, par détails, notre interlocuteur affirme que parmi les oiseaux, des hiboux et des chouettes ont été retrouvés calcinées dans diverses forêts incendiées au Djurdura. De même, au cours de cette période estivale, c'est-à-dire début d'août, un sanglier enflammé a été observé entre la frontière algéro-tunisienne et a pu répandre des flammes dans les forêts avoisinantes de l'autre côté de la frontière. Les renards, détaille-t-il encore, par leur queue développée et touffue sont souvent la proie des feux et facilitent par leur déplacement la propagation du fléau dans d'autres sites. Du côté d'El Hamdania à Blida, des forestiers ont observé un faucon enflammé au vol suite à une masse électrique et qui se dirigeait vers des sites non incendiés. «Les animaux sauvages peuvent donc à leur tour générer des sautes de feux et déclencher des foyers d'incendies secondaires. Ces dommages collatéraux portent aujourd'hui préjudice aussi bien à la richesse floristique et forestière mais aussi sur le patrimoine faunistique de notre pays», explique Gahdab Chakali. Protection Existe-t-il un moyen pour protéger cette faune ? Oui, puisque, selon toujours le spécialiste, tout commence par la protection de son environnement ou son écosystème des incendies. «Les travaux sylvicoles, particulièrement les débroussaillements sont les alternatives les plus prometteuses pour limiter les départs des feux de forêt. Il serait aussi ingénieux d'ouvrir certains périmètres forestiers à une gestion intégrée de la brousse, et ce, par le recours aux éleveurs qui peuvent par leur troupeau débroussailler toute une strate inflammable et qui (à 60% des cas) déclenche en premier ces feux de forêt.» Quelles sont les espèces les plus menacées par ces feux de forêt ? Toutes, selon Mourad Ahmim lire l'entretien), mais Gahdab Chakali développe que dès qu'un incendie se déclenche, diverses espèces, par leur perception du danger abandonnent hâtivement leur biotope vers d'autres sites plus accueillants avant d'être emprisonnées par les feux. Naturellement, les oiseaux et quelques mammifères qui se déplacent rapidement en sont capables de répondre à ce fléau dévastateur des écosystèmes forestiers. De même, explique-t-il encore, une partie de la faune a la stratégie «de rechercher et de regagner un refuge aux alentours de son habitat (terrier ou des masses rocheuses)». En grande partie, ce sont les reptiles, les grenouilles, les tortues et les hérissons qui sont fortement menacés dans leur habitat. Et M. Chakali d'ajouter : «En nombre et en espèces, ce sont les invertébrés qui sont plus menacés par les incendies, particulièrement les arthropodes terrestres qui présentent une grande utilité dans le maintien de l'équilibre. Diverses espèces peuvent se reconstruire au cours du temps, mais les espèces utiles et protégées sont menacées de disparaître dans ces milieux fragiles». Mais, généralement, c'est lors des grands incendies périodiques que les menaces sont plus inquiétantes et très significatives. Notre interlocuteur évoque la présence des nombreuses espèces d'insectes qui jouent un rôle primordial dans le fonctionnement des écosystèmes. La distribution spatiale des populations est généralement abordée soit à la lumière de l'écologie des communautés, soit comme une réponse que chaque espèce présente aux variations du milieu. Explication : Le premier modèle invoque l'existence de processus, comme les compétitions inter et intraspécifiques, la prédation ou le parasitisme, qui régulent la distribution spatiale et temporelle des espèces et structurent les communautés. Le deuxième modèle considère que la distribution d'une espèce est un phénomène dynamique, fait d'un jeu d'extinction et de recolonisation de populations locales suivant les variations des conditions environnementales. La relation intime liant certains insectes et les feux de forêt est généralement peu connue, selon M. Chakali. Pourtant, ce lien s'est développé et solidifié au cours de milliers d'années d'évolution. De nombreux insectes effectuant leur développement larvaire dans le bois mort ou dans le sol convergent massivement vers les brûlis récents en forêt, stimulés par la fumée et la chaleur dégagées par les feux. Beaucoup d'espèces d'insectes sont considérées comme adaptées au feu, voire «pyrophiles» qui aiment le feu. Par Nassima Oulebsir [email protected]