Ceux qui, malgré une invitation en bonne et due forme ou malgré l'information donnée n'ont pas réagi positivement, ont eu tort d'avoir raté jeudi dernier la naissance d'un Café littéraire à la maison de la culture. Parmi ceux-là, ceux qui se désolent à longueur de temps du « désert culturel régnant » et qui ont brillé par leur absence. Finalement, l'idée chère au directeur de la culture s'est enfin concrétisée avec la venue d'un hôte de marque. Il s'agit de Bouziane Ben Achour (journaliste dramaturge et romancier) qui a animé une sympathique mais tout aussi féconde causerie autour du théâtre algérien auquel il a consacré deux ouvrages en tant que critique dramatique. C'est également en tant qu'auteur dramatique qu'il est intervenu même si l'on ne connaît encore à Témouchent que Aboud 1er, la dernière de ses sept pièces montées pour les unes au TRO et les autres par des compagnies indépendantes. L'assistance, composée essentiellement de personnes connaissant surtout le théâtre des années 1970 et 1980, ne s'est pas privée de s'informer sur le théâtre des années 1945 aux années 1970, un théâtre qui constitue le sujet de Théâtre algérien, une histoire d'étapes ainsi que sur celui des années 1990 dont traite Le théâtre en mouvement d'octobre 1988 à ce jour. A cet égard, sur ce dernier, l'on s'est posé la question de son existence puisqu'il a été très peu vu contrairement à celui des années 1970 par exemple. A cette interrogation, le conférencier, bien au fait de l'activité théâtrale de ces dernières années, a répondu que les motivations, la production et la diffusion du théâtre ne pose plus dans les mêmes termes depuis l'avènement de l'après-octobre 1988 et l'instauration du libéralisme. De sorte, il y a lieu de savoir que s'il n'y avait que sept théâtres d'Etat auparavant, il y a aujourd'hui 41 compagnies indépendantes qui produisent bien plus que ces théâtres. Cela pour contredire l'idée de la disparition ou de la réduction de la création théâtrale. Par ailleurs, contrairement aux années 1970, les collectivités locales qui achetaient les spectacles et permettaient ainsi leur diffusion ne le font plus. Enfin, durant les années 1990, la diffusion a été entravée par la situation sécuritaire. La récurrente question du texte a été également évoquée. Il a été expliqué qu'elle aussi ne le pose plus dans les mêmes termes qu'auparavant, puisque aujourd'hui l'auteur a toute latitude d'investir une thématique, une idée particulière loin des œillères idéologiques ayant longtemps bridé la création artistique. De la sorte, le théâtre s'est ouvert sur l'universel, se préoccupant des questions dont l'individu, et non plus les masses, est au centre. Ce qui explique que le théâtre algérien s'est par exemple ouvert aux questions de l'amour et de la mort. Par ailleurs, l'écriture dramatique se trouve aujourd'hui rejointe et rivalisée par l'écriture scénique qui fait du metteur en scène un coauteur, ce qui fait un sort à la conception du théâtre en tant que genre littéraire. Pour ce qui est de la question relative à la situation des théâtres d'Etat, leur crise structurelle s'est aggravée du fait du nouvel environnement économique. Bien d'autres questions et remarques tout aussi pertinentes ont été soulevées au cours d'un riche débat qui s'est clos par une vente-dédicace des ouvrages de Bouziane Ben Achour, des ouvrages au nombre de cinq disponibles sur les étals de Dar El Gharb au sein du troisième Salon du livre. Bon vent au Café littéraire !