Un petit espace ouvert dans la paisible commune de Beni Mered a vécu les nuits du jeudi et vendredi derniers de chaudes et denses soirées grâce à la disponibilité de Chantal Lefèvre, aux engagements de l'apc de Blida et de Beni Mered pour la prise en charge sur le plan logistique, au dévouement de beaucoup de personnes ayant en commun le désir d'innovation et la sortie des sentiers battus et éternels de commémorations officielles. La célébration du mawlid ennabaoui se déroula ainsi sur deux modes différents. Une première soirée animée par la troupe de Bahaz et le diwan qui mettra quasiment en transe les artistes des Beaux-Arts d'Aix-en-Provence et d'Alger terminant leur travail sur la thématique de l'« Enracinement et Résistance » à travers les oliviers du jardin Sidi Yacoub de Blida. Cette soirée a été rehaussée par la présence de l'archevêque d'Alger, Mgr Teissier. La seconde soirée sera plus douce, voire plus romantique, avec les morceaux de haouzi interprétés par le musicien Farid Khodja, tirés de son second album, Oum El Hassen auxquels seront rajoutés des airs invitant à la danse. Rechta au poulet arrosée de l'ben a été au menu du diwan où plus de 130 personnes goûtaient aux plaisirs d'une animation quasiment disparue de l'esprit algérien ; une allée en terre délimitée de cierges, enfouis dans le sable et protégés de la brise nocturne à l'intérieur de simples sacs en papier, permettait une entrée directe dans l'enchantement. Dattes, oranges et tamina assuraient le suivi des traditions liées à l'événement pendant que Bahaz distribuait la rouina, mélange de semoule grillée et de sucre, à la nombreuse assistance heureuse de se retrouver. Cœurs ouverts, élargissant l'espace scénique de la troupe redonnant sens aux croyances liées à l'idolâtrie et à l'amour du Prophète. L'ambre, le camphre et les senteurs des plantes locales rajoutaient une ambiance de féerie. Le lendemain, le territoire andalou se fera doucement pénétrer par la voix entraînante du prodige Khodja, surtout lorsqu'il entama un sami' comme ouverture puis quelques extraits de la nouba maya. Chems el achia, vaste cantate comme hymne au crépuscule qui descendait sur l'espace verdoyant. L'artiste poursuivra une valse orientale en mode sahli et termina avec un chant religieux panégyrique en hommage au mawlid. Denis Martinez et ses artistes présents pouvaient repartir en emportant les meilleurs moments d'une ville qui veut renaître, se replacer dans la charnière de l'innovation. Jacques Hemery, enseignant aux Beaux-Arts d'Aix-en-Provence déclarera à la fin : « nous repartons au moment où nous nous sommes habitués à ces lieux. »