Misère sociale, baisse vertigineuse du pouvoir d'achat et flambée des produits alimentaires de base. L'Algérie d'en-bas se débat dans un quotidien insoutenable. Face à la cherté de la vie, les travailleurs ne se portent pas bien. Tel est le constat avec lequel devrait se présenter l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), ce matin, au Palais du gouvernement, où se tiendra une rencontre tripartite UGTA-patronat-gouvernement. Si le principe de cette rencontre a été fixé lors de la tripartite tenue en février dernier - où il a été décidé une rencontre des trois partenaires tous les mois -, le point nodal et crucial qui marquera la journée d'aujourd'hui est la relance du débat sur la lancinante question de la révision du salaire national minimum garanti (SNMG), évacuée, faut-il le rappeler, de l'ordre du jour des deux dernières tripartites. Stagné officiellement à 10 000 DA, mais réellement à 8000 DA, le SNMG est perçu par nombre de travailleurs comme plutôt une prime qu'un salaire décent. D'abord parce qu'il ne couvre plus les besoins les plus élémentaires de la majorité des foyers algériens. Ensuite, parce qu'on a inclu dans son calcul les primes et indemnités. Face à une telle réalité amère, l'UGTA devrait taper fort pour inscrire cette revendication, chère aux travailleurs, dans l'agenda réel de l'Exécutif. La revalorisation des salaires par le biais de la révision du SNMG est plus qu'une urgence, surtout que l'Algérie se porte bien, au moins sur le plan financier, avec plus de 50 milliards de dollars de réserves de changes, dues aux exportations des hydrocarbures. L'augmentation du SNMG a un lien direct avec la suppression de l'article 87 bis du code du travail. Suppression qui a constitué, en 2003 et en 2004, le cheval de bataille des compagnons de Abdelmadjid Sidi-Saïd, secrétaire général de l'UGTA. Si le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, a promis de prendre en charge dans les temps ce dossier, les travailleurs ne peuvent plus attendre pour assurer à leurs familles de quoi manger quotidiennement, surtout lorsqu'un kilo de tomates frise les 150 DA, pour ne citer que ce produit. Et l'UGTA serait la première à en subir les conséquences. Ainsi et compte tenu de l'émergence des syndicats autonomes qui mobilisent les travailleurs de différents secteurs, c'est la crédibilité du vieux syndicat qui se jouera lors de cette rencontre. Ahmed Ouyahia, chef de l'Exécutif, a jusque-là bien accordé son violon avec celui de son troisième partenaire, les organisations patronales, pour dire en chœur non la suppression de ce controversé article 87 bis. Certes, Ouyahia, pour appuyer son niet et le justifier, a puisé dans son lot de chiffres dont l'authenticité et l'exactitude restent difficiles à vérifier. Il a été plus loin encore jusqu'à couper le souffle aux représentants des travailleurs durant la tripartite, en agitant l'épouvantail d'un fort risque que les entreprises publiques mettent la clé sous le paillasson en cas de suppression de cet article. Car, toujours selon ses propos, la suppression de l'article 87 bis induira une facture supplémentaire de 550 milliards de dinars. Mais cela est-il suffisant pour que la centrale syndicale renonce à une revendication si chère aux employés que la revalorisation des salaires ? C'est là tout le défi d'une organisation syndicale, reconnue comme seul interlocuteur du gouvernement au détriment de l'émergence de syndicats autonomes non des moindres. Faut-il rappeler qu'un pacte économique et social entre les trois partenaires est en gestation et devra être signé d'ici à l'automne prochain. C'est dans cette perspective même que l'UGTA est attendue pour peser de tout son poids à même d'arracher cette revendication qui ne pourra être que d'un grand soulagement pour les salariés. Autre point inscrit à l'ordre du jour de cette rencontre : l'évaluation de l'état d'avancement des travaux du groupe tripartite chargé de la médecine du travail.