Un vent de panique a soufflé jeudi dernier sur la ville de Manchester. Et comment ! La nouvelle de l'achat du prestigieux club de la ville, le plus riche et le plus populaire au monde, par le tycoon américain Malcom Glazer, s'est répandue comme une traînée de poudre. Toutes les chaînes de télévision ont ouvert leurs bulletins avec des images de milliers de supporters des Reds manifestant leur colère au centre-ville et aux abords du stade. Hier, tous les journaux ont publié l'information à la une. « Il ne connaît rien au football », a déclaré furieuse Kate Fox, dont la mère est une fan de l'équipe depuis 60 ans. « Il ne connaît rien de l'histoire du club. Il ne connaît pas les fans. Il ne s'intéresse au club que pour l'argent. Je ne pense pas qu'il aura le culot de montrer son visage ici. S'il le fait, il faudra qu'il se rase la barbe », ajoute Kate, les larmes aux yeux. D'autres fans, cités par les chaînes de télévision et la presse écrite, ont été plus violents dans leurs propos. « Il va mourir, il va mourir », ont-ils scandé devant les caméras. Ils ont même improvisé une chanson en la circonstance : « Malcom Glazer is going to die / How I will kill him/ I do not know ? Cut him from head to toe / All I know is Glazer is going to die » (Malcom Glazer va mourir. Comment vais-je le tuer ? Je ne sais pas. Le couper de la tête à l'orteil. Tout ce que je sais c'est qu'il va mourir). Les supporters portaient des banderoles sur lesquelles ont pouvait lire : « Glazer, rendez-vous en enfer ! », et en référence à un éventuel boycott du club : « Pas de supporters, pas de bénéfices ! » A un journaliste qui l'accostait, Ritchie Farman lève la tête en direction de la statue de Matt Busby, l'entraîneur mythique des Reds du début des années 1950 qui a véritablement lancé Manchester, avant de devenir son président dans les années 1960, et demande : « Vous voyez cet homme en haut à l'entrée du state d'Old Trafford. Il doit se retourner dans sa tombe aujourd'hui. » Contenue par des éléments de la police montée, la foule chantait : « United n'est pas à vendre, United n'est pas à vendre, United n'est pas à vendre. » D'autres criaient : « Nous porterons toujours le drapeau haut, Manchester ne mourra jamais. Glazer, vous pouvez mettre vos dollars là où on pense. » Des effigies de Malcom Glazer, avec une corde autour du cou, ont été brûlées devant le grand portail du stade. Des formulaires d'abonnement annuels ont également été brûlés au milieu d'appels à ne plus acheter les maillots, tee-shirts et autres produits frappés du sigle de l'équipe. Des appels ont d'ores et déjà été lancés à adopter la politique des « tribunes vides » l'année prochaine. Et pourtant. Rien ne pourra arrêter la transaction. Glazer, 76 ans, possède désormais plus de 75% des actions de Manchester PLC, après avoir acheté - à crédit, et c'est la grande différence avec le Russe Abramovich qui a payé cash son OPA sur Chelsea - les actions de deux millionnaires irlandais, soit 28% de la valeur de l'équipe, qu'il a ajoutées à ses 28,1%, en plus de l'achat d'autres actions, dont les 9% détenus par un richissime écossais. Les experts de la City, le milieu de la finance londonienne, estiment que c'est là le prix qu'il faut payer quand on a décidé de s'inscrire au Stock Exchange. Initiative que les propriétaires des Reds avaient prise il y a de cela 12 ans et qui leur a permis de faire de très gros bénéfices et devenir ainsi le club le plus cher de la planète, avec des fan clubs au quatre coins du monde et des Japonais riches qui viennent tous les week-ends du Japon juste pour voir, de la tribune d'honneur, l'équipe évoluer à Old Trafford. « Quand on joue la mondialisation, il faut respecter ses règles », indique à cet égard un expert. Les supporters de Manchester United, quant à eux, s'attendent au pire de la part d'un nouveau patron « qui n'a jamais mis les pieds en Grande-Bretagne, encore moins à Manchester ».