Le chef du gouvernement a présenté, hier, sa « déclaration de politique générale » devant l'hémicycle, clairsemé, du Conseil de la nation (CN). Sur les 144 membres de la chambre haute du Parlement, instituée pour la première fois en 1996, il y a, à peine, 80 d'entre eux qui ont répondu présent à l'ouverture des travaux. Le nombre d'absents, plus de 60 sénateurs, renseigne sur le poids de cette institution sur les grandes orientations politiques du pays. Ahmed Ouyahia n'a innové en rien. En répétant ce qu'il avait déclaré devant la chambre basse, il a pris le risque d'une intervention monotone. Les mêmes mots pour annoncer les mêmes réalisations et les mêmes chiffres appuyés par les mêmes arguments. Insistant sur la nécessité de mobiliser tous les moyens humains et matériels disponibles pour « concrétiser le programme du gouvernement », qui est une copie conforme à celui du « président de la République », Ouyahia reviendra sur l'importance du « dialogue » et le devoir de respecter la loi. « En ce qui le concerne, le gouvernement est résolu à veiller à s'appuyer sur la justice pour faire respecter la loi par tous et en toute circonstance, qu'il s'agisse du crime, de la contrebande, de la corruption, qu'il s'agisse de la violence et de l'anarchie ou qu'il s'agisse de la prise en otage des droits des citoyens par l'usage abusif de la revendication », a-t-il souligné dans son allocution. Se voulant persuasif, le chef de l'Exécutif s'est livré à un exercice statistique. Serein devant le président du CN, Abdelkader Bensalah, qui n'est autre que son bras droit au RND dont il est le secrétaire général, Ouyahia a réaffirmé que l'Algérie, sur les 30 millions d'habitants, n'a aujourd'hui que 17,7% de la population active au chômage. Cela, Ouyahia l'a qualifié de « progrès important ». Car il se rappelle encore, tout en ravivant la mémoire des sénateurs à la tête poivre et sel, que « ce taux était de près de 30% en 2000 seulement ». Dans une brève « envolée » prémonitoire, le chef du gouvernement s'est déclaré plus réaliste. « Cette évolution ne doit pas nous faire oublier qu'il existe actuellement dans notre pays près de 1,7 million de chômeurs, dont 73% ont moins de 30 ans », a-t-il indiqué. En visionnaire, il dira : « Nous devons également avoir à l'esprit que plus de 11 millions de nos concitoyens sont âgés de moins de 17 ans. » Ainsi, il évoquera le plan de 4200 milliards de dinars, soit 55 milliards de dollars, pour le soutien à la croissance économique. Il a ainsi rappelé que, dans ce plan, il est prévu la création de deux millions d'emplois. Ouyahia a, peut-être dans un souci d'être succinct, évité d'aborder les questions d'ordre politique, notamment le rôle de l'Alliance dans la réalisation du programme du gouvernement, comme il l'avait fait devant la première chambre du Parlement. Peu de questions Aussitôt l'intervention d'Ouyahia finie, le débat a commencé. Ouvrant le bal, Abderrezak Bouhara du FLN a axé son intervention sur la nécessité de faire associer la société civile dans la réalisation des « objectifs soulignés dans le programme du président de la République ». Tout en soulignant la fin de la période de transition, Bouhara a insisté sur « l'importance d'instaurer une démocratie participative ». « Nous remarquons clairement la faiblesse de la représentation de la société civile au sein des institutions qui ont à leur charge de mettre à exécution ce programme. D'où la nécessité de revoir la gestion des instances locales à même d'encourager l'émergence des cadres compétents qui pourraient être d'une grande utilité pour la nation », a-t-il fait remarquer, tout en demandant au gouvernement, dont le FLN est majoritaire, d'œuvrer à stimuler « la pratique démocratique » au sein des partis. Hafidha Chaoui du MSP a évoqué « les erreurs constatées dans les livres scolaires » en guise d'entrée pour finir par condamner la décision du gouvernement de supprimer le baccalauréat sciences islamiques. Elle s'est demandée pourquoi la décision de réduire à quatre seulement le nombre de spécialités au bac a touché la branche des sciences islamiques. Kedari Ben Herzallah du MSP a interpellé le gouvernement sur la misère qui ronge la société. Il a ainsi évoqué le pouvoir d'achat qui est en baisse continue. « Les salaires doivent suivre les augmentations des différents produits », a-t-il martelé. D'autres interventions ont eu lieu, sans toutefois que les sénateurs touchent aux dossiers les plus importants. Aucun sénateur ne s'est interrogé sur la fiabilité des données livrées par le chef du gouvernement, telles que le taux de chômage donné à moins de 20%. Aucun sénateur ne s'est également demandé s'il est réellement possible de réaliser un million de logements en un laps de temps très court, sachant que le projet des 55 000 logements AADL n'a pas encore été achevé. Ou encore ni le bilan du plan de la relance économique ni la gestion des 55 milliards de dollars n'ont suscité l'intérêt des quelques membres qui sont intervenus durant la matinée. Le débat était froid et Ouyahia serein et placide. Reprise des travaux lundi prochain à l'APN La chambre basse du Parlement reprendra ses travaux lundi 13 juin. A l'ordre du jour, une kyrielle de projets de loi à débattre et à adopter. De lundi à mercredi, il est prévu le débat sur le projet de loi sur la lutte contre la corruption, du projet de loi sur l'eau, de l'avant-projet de loi sur la ville, du projet de loi portant organisation de la profession du notaire et de celui portant organisation de la profession du huissier de justice. Jeudi 16 juin, les députés vont poser leurs questions orales au staff d'Ahmed Ouyahia. L'adoption de différents projets de loi se fera lundi 20 juin.