D'année en année, la fraude en milieu scolaire gagne du terrain en dépit des moyens colossaux consentis par la tutelle et ses partenaires pour faire du déroulement de tous les examens, des événements sans incidents majeurs. Cependant, le constat est accablant. On s'achemine vers la généralisation de cette pratique en milieu scolaire qui touche aussi bien les examens d'admission en classes supérieures que ceux qui permettent d'aller d'un palier à un autre. Cependant, des voix, même si elles demeurent encore anonymes pour diverses raisons, commencent toutefois à se faire timidement entendre du moins à travers des témoignages. Elles émanent d'enseignants, de parents, mais surtout de candidats qui nous ont exprimé leur sentiment de dépit et d'angoisse face à des situations où la fraude a été pratiquée d'une manière flagrante pour permettre le succès à des candidats certainement d'un niveau au-dessous de la moyenne, tandis que dira ce candidat au bac : « Je bosse toute l'année en doutant des résultats. » Déjà à quelques jours du bac, des préparatifs insolites avaient commencé au niveau de certains cybercafés particulièrement à Khemis Miliana où l'on se bousculait au portillon pour se faire délivrer des sujets corrigés saisis en caractères minuscules, afin que le candidat l'utilise au moment propice sans se faire attraper. A ce propos, un libraire nous racontera qu'il a reçu des menaces pour avoir refusé à des candidats l'utilisation de cette technique. Il ajoutera : « La situation est au pourrissement. » Quant à ce gestionnaire de lycée, sa réponse sera claire : « Plus de fermeté dans les centres d'examen. » Un autre fonctionnaire de l'éducation tentera sans trop l'admettre de justifier cette pratique qui prend de l'ampleur par l'existence dans notre société, et ce n'est plus un secret à présent, d'un laxisme à tous les niveaux qui fait que ce sont les médiocres qui passent, une situation qui a engendré un état d'esprit enclin à la tricherie. Tous les moyens peuvent être utilisés pour parvenir à la réussite. Et justement dans ce milieu, les moyens utilisés se perfectionnent au fil des années. Des candidats nous racontent qu'en plus des petits papiers que le tricheur peut aisément avaler en cas de danger, il existe l'écriture à l'aide d'un stylo sans encre jusqu'à la calculatrice bourrée de réponses qu'on se fait parfois passer par des surveillants qui n'y voient que du feu. Tout est bon pour parvenir à ses fins. Ainsi, une collégienne a été surprise au cours du déroulement des épreuves du BEF, la main dans le sac : l'objet du délit, des réponses cachées dans un bras emplâtré uniquement dans ce but. Cependant, le pire dans tout cela, dira ce père de famille, ce sont les collégiens qu'on dorlote à l'intérieur des salles où tout leur est permis au vu et au su de leurs camarades impuissants. Des exemples ont été cités. L'effronterie est allée cette année jusqu'à l'agressivité comme le cas de ce candidat au bac qui voulait s'emparer par la force d'un brouillon, mais découragé grâce à la fermeté des surveillants. Dans un autre centre, selon des témoignages, le pire a été évité, car les occupants d'une salle ont menacé de se rebeller s'ils ne profitaient pas d'une situation frauduleuse devant concerner un seul candidat. Bref, ces constats rapportés ici et là démontrent bien que c'est un véritable phénomène qui s'installe si des mesures ne sont pas envisagées à temps pour limiter sa propagation. Comment ? Des citoyens répondront : « Pourquoi ne pas envisager de confier les centres d'examen à un personnel étranger à la wilaya et multiplier le nombre des observateurs. » Par ailleurs, nous confie ce jeune homme en fin de cursus universitaire, la tutelle devrait se pencher sur les programmes, le nombre de matières et de modules, les horaires afin de prévenir ces dépassements ajoutant : « Croyez-moi quand on a 14 modules, l'acte de tricher devient presque nécessaire. » Cet étudiant ajoutera qu'il ne sert à rien de soulever ce problème, car les décideurs le savent déjà. Mais d'aucuns excédés par le climat malsain qui s'installe pensent au contraire qu'il est temps de dénoncer ces agissements pour faire au moins réagir l'opinion publique et décourager la médiocrité. Il s'agit, diront nos interlocuteurs, d'axer tous les efforts sur l'éducation des jeunes sujets pour les prémunir contre ces actes prohibés en leur offrant notamment de meilleures conditions en milieu scolaire. Et même si à Aïn Defla les responsables ne signalent aucun incident majeur, ces témoignages interpellent, car si pour certains la fraude et la tentative de tricher est une attitude qui relève de la nature humaine, s'en accommoder expose la société à tous les autres vices.