Le noyau dirigeant de l'armée, issu du clan d'Oujda, devenant une menace, Ben Bella opérera des alliances pour tenter de réduire l'influence de cette force. Aussi, Ben Bella conclura, sans en informer son ministre de la Défense, Boumediène, des accords avec l'opposition. D'abord le 12 novembre 1963 avec Mohand Ouel Hadj, puis en janvier 1965 avec Moussa Hassani, enfin avec les dirigeants du FFS. Un accord est conclu avec ces derniers le 16 juin 1965. L'armée des frontières ne cessera d'étendre son influence, s'érigeant en groupe de pression. Dans son ouvrage L'armée dans la politique algérienne, Zartmann écrira : « Un principe fondamental de la doctrine militaire professionnelle est de reléguer toute identité entre l'armée et le peuple au niveau abstrait de la volonté générale et de réduire l'effet des origines sociales par l'organisation militaire. Une partie de la logique de l'organisation est de couper les troupes des intérêts civils afin qu'elles acceptent les ordres de leurs officiers sans question. » Dans les textes, l'armée était soumise à l'autorité du parti FLN. Dans les faits, les relations entre l'Etat et l'armée étaient beaucoup plus complexes. Ayant aidé Ben Bella à accéder au pouvoir, il était naturel qu'elle cherche à peser sur celui-ci, à défaut de le détenir seule. D'ailleurs, lors de sa destitution, un des chefs de l'armée n'a-t-il pas déclaré à Ben Bella : « C'est nous qui t'avons mis, c'est nous qui t'enlevons. » Ben Bella s'attachera tout au long de son exercice à traquer le clan d'Oujda. Comme l'écrit Lebjaoui dans son ouvrage Vérités sur la Révolution algérienne, Ben Bella poussa Medeghri à démissionner et s'en prit à Bouteflika à qui il finit par annoncer sa décision de lui enlever les Affaires étrangères, à la veille de la conférence afro-asiatique qui devait se tenir à Alger fin juin 1965. Ben Bella créera une milice populaire aux seules fins de contrebalancer l'inffluence de l'ANP, et nommera Zbiri au poste de chef d'état-major, alors que Boumediène était au Caire. Le clan d'Oujda ne pouvait rester les bras croisés. Ce sera la prise du pouvoir le 19 juin 1965, où le Conseil de la révolution se substituera au CNRA. Le président du Conseil de la révolution est ministre de la Défense, chef du gouvernement et avait la haute main sur les décisions de l'Etat et du parti. Pourtant, dans le préambule de la déclaration de juin 1965, il est écrit : « Quelle que soit l'importance de sa mission, nul ne peut prétendre incarner seul à la fois, l'Algérie, la révolution et le socialisme. » Il est vrai que ce reproche s'adressait à Ben Bella...