Parmi les 170 œuvres exposées (peintures, dessins et sculptures), 50 ont été façonnées par l'artiste colombien pour dénoncer les atrocités commises par les soldats américains dans la prison irakienne d'Abou Ghraïb. Cet événement culturel, organisé par le pool des musées romains et les galeries Contini de Venise et Benucci de Rome, a été inauguré jeudi dernier, au palais Venise, à Rome, en présence de personnalités italiennes, du monde de la politique et de la culture et de nombreux journalistes venus de plusieurs pays visiter et raconter l'exposition de Botero. Depuis 1991, l'artiste colombien n'avait plus exposé, en Italie, et c'est ainsi qu'il offre, à l'occasion, une panoplie de ses œuvres réalisées en quinze ans de création silencieuse et obstinée, loin des feux des médias. Botero, célèbre dans le monde pour les volumes hypertrophiques et les dimensions exagérées des personnages qu'il immortalise sur ses toiles, mais aussi pour l'humour sympathique presque grotesque qui émane de ses représentations, est très apprécié en Europe, surtout dans les pays latins, comme l'Espagne ou l'Italie. A partir de Paris où il vit, l'artiste a confié au quotidien italien La Stampa comment les informations faisant état des sévices commis par l'armée d'occupation américaine en Irak l'ont frappé. « Je ne m'étais jamais inspiré de façon aussi directe de l'actualité », ajoutant : « Je suis dégoûté, car les Usa se prétendent comme un modèle de compassion et puis ils sont capables de ce genre de pratiques barbares. » Des geôliers hideux et effrayants qui s'acharnent, à coups de matraque, sur le corps de prisonniers irakiens nus, des détenus attachés au mur et vêtus de sous-vêtements féminins, d'autres encore entassés nus... Des représentations humiliantes et avilissantes que le monde a découvertes, avec répugnance et douleur, sur les photos publiées par les journaux américains. Botero a affirmé qu'il ne mettrait pas en vente les toiles sur Abou Ghraïb, car son désir est de faire don de ces dernières, qui lui ont valu un an de besogne acharnée, à un musée qui serait intéressé par toute la collection, « car il ne faut pas les séparer », a-t-il précisé au quotidien turinois. Il a également fait part de sa déception de voir que la plupart des musées américains ont exprimé leur refus d'accueillir cette série de toiles. Botero a reconnu s'être inspiré du célébrissime manifeste de Pablo Picasso sur les horreurs de Guernica, la ville basque bombardée sur ordre du fasciste Franco, par l'armée de Hitler en mai 1937, en pleine guerre civile espagnole, faisant plus de 1600 morts.