Depuis leur expulsion, il y a plus de deux ans, des logements sociaux qu'ils ont illégalement occupés dans la cité dite de la Pépinière, un nom auquel la rue lui préfère toujours celui de Zedma, les ex-squatteurs ne désespèrent pas de se voir recasés. Ils crient, à qui veut les entendre, la précarité de leurs conditions de vie actuelles pour soutenir l'urgence de leur besoin de logements. Ils sont un peu moins d'une quarantaine de familles à avoir établi leur camp en contrebas de la RN 26, à Bir Slam, à l'entrée sud de la ville de Béjaïa, et moins d'une poignée installée dans un lieu « bidonvillisé » à Tala Ouariane, sur la route de Boulimat. La concentration à Bir Slam était plus importante, il y a quelques mois, avant que l'APC ne procède à l'attribution de 42 logements de type F1 à une partie de ces familles. Sachant qu'une décision présidentielle avait interdit la distribution de ce genre de logements, cette attribution a été rendue possible par une dérogation du ministère de l'Habitat. Elle a fait la joie de 42 familles et n'a pas manqué de contrarier le reste. L'« heureuse » issue à laquelle a abouti le mouvement de contestation pour leurs voisins relogés leur donne un motif de persévérance et nourrit leur espoir de connaître le même épilogue. Ne lâchant pas prise, les 38 familles encore installées à Bir Slam semblent gagnées quand même par l'impatience. Cela fait 27 mois qu'elles sont là avec bagages empaquetés. Soit depuis le 27 avril 2003, date de leur expulsion « manu militari par les services de police (qui les) ont conduits au lieudit Bir Slam où la mairie a mis à (leur) disposition des tentes », écrivent, dans une demande de recasement, leurs représentants qui continuent à frapper aux portes des autorités dont l'APC qui les renvoient vers la daïra, désormais nouveau gestionnaire du dossier de logements. Les difficiles conditions climatiques de janvier dernier ont poussé les ex-squatteurs à sortir encore une fois dans la rue dans un mouvement de colère spontané. L'action semble avoir été derrière le déplacement sur les lieux du chef de daïra et des responsables du commandement de la gendarmerie et des services de la police. La visite officielle, intervenue vers 23h, a surpris, pourtant longuement souhaitée, les familles autant qu'elle leur a redonné espoir. Le déplacement inopiné a permis de recenser 36 familles d'ex-squatteurs dont 3 à Tala Ouariane. « Les conclusions de l'enquête du chef de la daïra seraient entre les mains du wali », nous dit un des pères de famille vivant depuis avril 2004 dans un hangar sur un terrain privé à Bir Slam. Le supposé locataire du lieu a actionné, pour rappel, la justice pour récupérer « son » bien. Débouté, le concerné aurait introduit un quatrième appel, apprend-on. « Nous vivons avec les rats, les cafards, les serpents et les sangliers. Le danger est partout et nos conditions de vie sont de plus en plus difficiles », se plaint un des voisins de notre premier interlocuteur, non moins angoissé. « Oubliés des hommes et de l'administration, dormant sous des tentes avec des femmes et enfants en bas âge, sous des abris précaires en tôles et en planches, sous le feu ardent du soleil en été et les morsures du vent et du froid en hiver, nous venons vous rappeler la situation désastreuse dans laquelle nous nous trouvons et les promesses non tenues des responsables », écrivent leurs délégués au wali. Ils expliquent que c'est par le fait de la crise du logement qu'ils ont été « amenés, sans droit ni titre, à occuper des logements vides que ni les services de l'OPGI ni ceux de l'APC n'ont daigné distribuer pendant de longs mois ». L'argument ne pèse pas puisque, dans l'administration, l'on se refuse au fait accompli en estimant que le statut d'ex-squatteur ne donne aucunement droit de priorité sur le reste des demandeurs de logements. Ceci au moment où eux se défendent d'être dans une situation de sinistrés, laquelle, conjuguée au risque de MTH et autres maladies pendant cet été, devrait, espèrent-ils, peser dans une quelconque décision de distribution de logements sociaux ou à défaut de F1 à la faveur d'une éventuelle nouvelle dérogation ministérielle.