Jamais Annaba n'a connu une aussi grande affluence comme cet été 2004. A la seule vue de ces milliers de véhicules immatriculés dans divers pays, l'on se croirait vivre ailleurs qu'en Algérie. Il n'y a pas que les immatriculations. Le parler de certains de nos compatriotes installés à l'étranger, leur comportement et leurs modes de vie sont autant de signes particuliers qui ne trompent pas. Pour le seul mois de juillet 2004, les services de l'ENTMV ont annoncé l'arrivée sur les quais du port de Annaba de plus de 5600 touristes algériens en provenance particulièrement de France et d'Italie. De Annaba à El Kala et de Skikda à la corniche de Chetaïbi en passant par celle de la Marsa, bon nombre d'entre eux n'hésitent pas à dépenser le maximum pour « passer de bonnes et agréables vacances loin des soucis, tracas et aléas que nous impose notre quotidien dans notre pays d'accueil », dira ce père de famille de 6 membres de retour pour un mois dans sa région natale après plus d'une décennie d'éloignement. « Avec ce qui s'écrivait et se disait sur notre pays, les précédentes années, nous n'avons pu, malgré notre envie, rentrer et passer des vacances comme on le faisait annuellement avant les malheureux événements. Nous étions à l'écoute de tout ce qui se disait sur l'Algérie. Chaque début de saison estivale, nous regardions avec envie les destinations africaines offertes par les tours opérators et on se disait pourquoi il n'y a pas notre beau pays », a affirmé Lilia Kouidri, une jeune fille de 22 ans née en France et qui découvre la terre de ses ancêtres. Des Lilias, Kamil, Sabrine... ils sont des centaines de jeunes beurs à fouler pour la première fois de leur vie le sol algérien. campings Ils sont venus en groupe dans le cadre d'un voyage qu'ils organisent eux-mêmes avec la collaboration de leurs parents en Algérie. Plusieurs ont élu domicile dans des campings de différentes plages, notamment à Oued Bakrat (Annaba), la Messida (El Tarf). Ils n'hésitent pas à mettre « le paquet » pour ne pas se priver de la moindre commodité. Ils donnent l'impression de ne jamais dormir et veillent quotidiennement jusqu'au petit matin comme s'ils voulaient tout prendre, manger, goutter, utiliser, parler s'amuser avant de repartir quelque part dans un pays d'Europe où ils sont nés. Leurs parents éprouvent du plaisir à voir leur progéniture découvrir une partie de ce pays dont ils leur parlaient si souvent. « Durant toutes les années du terrorisme, mes enfants ne cessaient de me harceler de questions sur ce qui se passait et pourquoi je les empêchai de rentrer au bled. Beaucoup de mes compatriotes préféraient ne pas parler de vacances pour s'enfermer dans leur appartement à ne rien faire. Aujourd'hui, grâce à Dieu, tout s'est calmé. Je peux vous dire que s'il n'y avait pas eu ces perturbations et l'insuffisance dans les capacités d'accueil des sociétés de transports maritimes ou aériens, ce sont des millions d'Algériens dont des adolescents qui seraient venus. Même les pieds-noirs et les familles de harkis n'ont que cette idée en tête : venir chez nous pour passer un long séjour », a indiqué Abdelaziz Belaïter qui avait immigré à la fin des années 1950 en France. Il n'y a pratiquement pas un seul coin où l'on ne trouve pas cette catégorie de citoyens algériens. Ils ne sont pas venus les poches vides pour le grand plaisir des commerçants et commerces de tous genres sur la corniche de Annaba. Ils évitent soigneusement de tous les produits made in et se pâment lorsqu'ils sont mis en présence d'un produit bien de chez nous qu'ils n'hésitent pas acquérir au prix fort. Bourrek annabi est leur plat favori avec, le cas échéant, tadjine lehlou préparation maison. une ville hospitalière Le moindre youyou dans une bâtisse les attire comme un aimant. « Je ne suis pas de Annaba. J'ai préféré y venir parce que à Toulon où je réside avec ma famille, on ne parle que de cette ville comme si elle est la seule en Algérie. Je l'ai découverte et je dois dire que c'est une ville formidable, belle, gaie, hospitalière. Je ne trouve pas de mots pour exprimer tout le plaisir que j'ai à être ici. Il faudrait quand même que les policiers chargés de la circulation soient un peu plus cools avec nous, car nous n'avons pas les mêmes réactions de conduite que les autres. Ils sont très sévères et font même dans l'excès de zèle. C'est le seul point noir que j'ai relevé. Quand aux vols, Annaba avec ses maux sociaux est comme toutes les autres villes du monde », a estimé Mourad Bendif.