Samedi dernier, Abdelkader Allalou, Aziz Smati, Mustapha Benfodil et Jean Pierre Vallorani étaient au complet à la salle des conférences du 10e Sila, pour présenter Alger nooormal, ouvrage collectif et multilingue. Voyage photographique d'abord réalisé par Jean Pierre Vallorani dans « Alger, El Assima, El Bahdja ». Abdelkader Allalou et Aziz Smati, des gens de la radio, travaillent les musiques et les rencontres-interviews. Mustapha Benfodil lève les mains en l'air. Son labeur sur ce journal « phonore » est pourtant lumineux d'historicité sur des cascades de mots. Alger noormal se présente comme un bouquet d'écrits, de mots lancés en dialecte chaâbi, et de musiques du terroir. Un support hybride où toutes les lectures sont possibles, y compris les plus triviales et les plus poignantes. Sur le support CD qui accompagne le livre, des discours de Boumediène et des vers choisis de Moufdi Zakaria défilent. Sur la chanson Ding, ding, dong de Gnawa Diffusion, l'enregistrement du flash info de la radio annonçant « le professeur Boucebci victime ce matin d'un attentat à l'arme blanche... ». « Je ne suis pas d'accord avec ceux qui ont fait cela », s'égosillent derrière les micros aveugles de la radio des âmes excédées, mais terrorisées. Jacques Deluz projette les hypothèses pessimiste et optimiste de la future Alger. Au sujet de La Casbah, « un problème qu'on traîne depuis cinquante ans » et « dont personne n'a encore jamais trouvé de solution », l'architecte conclut que « c'est peut-être plus un problème de volonté politique que de moyens parce qu'en réalité, l'Algérie est un pays riche ». Des entretiens pas sérieux du tout mais qui en disent long. Il est demandé à l'auteur de Sobhane Allah yeltif, qsida mémorable chantée par Mohamed El Anka, s'il pouvait écrire une chanson sur « ces douze années de terreur ». Mostafa Toumi répond : « Si je devais écrire une chanson sur ce thème, j'entretiendrais le traumatisme et je refuse d'entretenir le traumatisme. » « Amnésie ou amnistie ? », se demande Allalou avant d'aller voir... Monique. Alger nooormal est une de ces pièces rares de libre expression. Alger nooormal, Françoise Truffaut Edition Diffusion Edif 2000 - 1200 DA