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« Le consensus antiraciste est en train de voler en éclats »
DOMINIQUE SOPO (Président de SOS-Racisme)
Publié dans El Watan le 03 - 10 - 2005

Le président de SOS-Racisme tire la sonnette d'alarme. Pour Dominique Sopo, les signes d'une remise en cause du consensus antiraciste ne manquent pas. Les dérapages et les provocations volontaires d'hommes politiques à la veille de chaque élection, la stigmatisation des immigrés, les discriminations à l'embauche... la listes est longue. Les indicateurs sont au rouge.
Dans une de vos déclarations, vous dites que avez noté une « concentration de propos inquiétants » sur l'immigration tenus ces derniers mois par des responsables gouvernementaux, remettant en cause « le consensus antiraciste ». Vous craignez « une sorte d'extrême droite relookée qui n'a plus l'effet repoussoir d'un Jean-Marie Le Pen ». La situation est-elle donc si dégradée ?
Depuis de nombreuses années, la classe politique française a, de façon générale, évolué vers un consensus sur les questions d'antiracisme. Le discours antiraciste, année après année, est devenu majoritaire. Malgré des compromissions locales avec le Front national, malgré des propos tendancieux qui pouvaient émerger ici ou là, il existait un consensus des partis républicains pour tenir l'extrême droite et ses idées en dehors de l'arène nationale. Depuis le mois de juillet, il semble que nous soyons confrontés à un début de remise en cause de ce consensus. Jugez-en un peu. On a d'abord eu droit à un durcissement des propos de Nicolas Sarkozy sur l'immigration. Cette logique s'est poursuivie avec des réponses démagogiques suite aux incendies de logements insalubres qui ont provoqué la mort de 24 Africains il y a quelques semaines puisque le ministère de l'Intérieur a relié ces morts dramatiques au laxisme de la politique migratoire française ! Récemment, le ministre de l'Outre-Mer, François Baroin, a expliqué qu'il fallait réfléchir à une remise en cause du droit du sol. En la matière, c'est la première fois sur les 10 dernières années qu'un responsable gouvernemental ose avancer de tels propos. Enfin, les gesticulations antimusulmanes de Philippe de Villiers renvoient de plus en plus à un discours proche de celui de l'extrême droite. Ces signes nécessitent une réponse immédiate car, sinon, la dérive se poursuivra. En effet, les propos inquiétants que je viens d'évoquer renvoient sans doute à l'analyse que l'électorat du Front national, du fait d'un pari fait sur l'affaiblissement durable de Le Pen (pour des raisons d'âge et de dissensions internes au Front National), n'est plus un glacis imprenable et qu'il faut donc réfléchir à la meilleure façon de le « draguer » dans la perspective de la prochaine élection présidentielle.
Votre organisation ne s'occupe-t-elle pas davantage de faciliter l'entrée des Français « d'origine immigrée » dans les discothèques que de s'atteler à leur assurer une intégration dans le monde du travail ?
Absolument pas. SOS Racisme est l'organisation qui, en France, a poussé à la reconnaissance de l'ampleur des phénomènes discriminatoires touchant les Français d'origine immigrée. Lorsque nous avons commencé à lancer ce thème dans l'opinion publique en 1999, à travers le recours au testing et aux procédures judiciaires, beaucoup de gens nous riaient au nez, en nous expliquant que nous exagérions. Aujourd'hui, tout le monde reconnaît l'existence des discriminations en France. Ce résultat a été obtenu parce que nous sommes intervenus dans l'ensemble des domaines : le domaine des loisirs à travers les discothèques, mais aussi et surtout les domaines de l'emploi et du logement. Nous avons ainsi, à titre d'exemple, fait condamner le célèbre cabaret Le Moulin Rouge qui refusait d'embaucher des noirs comme serveurs. Récemment, nous avons obtenu la condamnation à 8000 euros d'amende et à 8 mois de prison avec sursis pour une gérante d'agence immobilière à Toulouse. Les questions de logement et de travail sont pour nous les plus importantes dans la mesure où elles sont lourdes de conséquences sur la capacité des gens à vivre dignement.
Vous dites que vous n'êtes pas contre le principe des quotas en matière d'immigration, que cela ne vous choque pas...
Le problème, c'est qu'il existe aujourd'hui en France un débat sur la politique migratoire qui ne se déroule pas sereinement. SOS Racisme demande depuis des années que la France redéfinisse la politique migratoire qui tourne le dos au dogme de « l'immigration zéro » en vigueur depuis 1974. A partir du moment qu'il faut relancer l'immigration, comme nous le disons, il faut bien se demander comment cette relance est organisée. Les quotas sont une solution en ce qui concerne l'immigration économique. Si des personnes connaissent un autre moyen d'organiser la relance de l'immigration, qu'ils me le disent ! ça me désole souvent de voir des gens déclamer de grands principes sur la relance de l'immigration et être incapables dans le même temps d'avancer la moindre piste pratique pour aboutir à cet objectif. Mais il faut être clair aussi sur ce que doit être la philosophie de la politique d'immigration française. Il ne saurait être question de faire rentrer toutes les catégories d'immigration dans des quotas. Dans notre esprit, ces derniers renvoient à l'immigration économique. Pour le reste, il existe des immigrations de droit qu'il ne saurait être question de quantifier a priori (regroupement familial,...). Par ailleurs, contrairement au concept qu'avance Nicolas Sarkozy, il ne s'agit pas de faire de l'immigration « choisie ». La France ne peut pas se comporter, notamment par rapport à l'Afrique du Nord et à l'Afrique noire, de façon utilitariste et égoïste. La politique d'immigration doit aussi prendre en considération la dimension du co-développement, d'abord parce que c'est ce qui permettra de lutter réellement contre l'immigration clandestine et, ensuite, parce que l'organisation intelligente de l'immigration peut être source de développement et d'acquisition de compétences pour les pays d'émigration.
Quelle est votre position sur la discrimination positive à l'embauche ?
Le terme de discrimination positive est très ambivalent dans le débat français. En tout cas, si on entend par « discrimination positive à l'embauche » la mise en place de quotas ethniques, nous y sommes totalement opposés. D'abord parce que la France, qui est un pays très métissé, serait confronté à un problème technique évident : qui rentre dans quelle case ? Moi-même, fils d'Africain et de Française, je ne saurais le dire ! Ensuite parce qu'il faut bien comprendre qu'une des grandes richesses de la France, c'est que les barrières culturelles, ethniques et religieuses sont très poreuses - ce que montre là encore le métissage très important de la société française. Pousser les gens à s'identifier à une communauté particulière, ce serait pousser à recréer ces barrières. Il ne faudrait pas, sous prétexte de lutter contre les discriminations raciales, voir la société basculer dans une logique communautariste que je juge funeste. Enfin, et l'exemple américain le montre fort bien, les quotas ethniques ont un effet boomerang terrible. En effet, lorsque les Noirs américains - dont l'immense majorité continue d'évoluer dans des conditions sordides comme l'ont montré les images de la Nouvelle-Orléans dévastée par l'ouragan Katrina - réclament des budgets pour les écoles, la rénovation urbaine... on leur renvoie comme argument : « Vous avez vos quotas. On a déjà fait pour vous. Vous ne pouvez pas en demander plus à l'Etat et à la société. » Bref, les quotas, c'est un formidable moyen d'évacuer la question sociale. Si on veut réellement extirper la réalité discriminatoire à l'embauche, il faut s'attaquer aux vrais problèmes.
Que faut-il faire selon vous ?
D'abord que l'Etat français montre l'exemple en la matière, par exemple en supprimant toute une série d'emplois fermés aux étrangers. A titre d'exemple, pour être buraliste en France, il faut avoir la nationalité française ! Il faut également que la justice, qui reste très frileuse sur les questions de discriminations, joue pleinement son rôle en appliquant la loi qui réprime de tels comportements. Et là, nous sommes encore loin du compte. Pour que vous compreniez bien les difficultés auxquelles nous sommes régulièrement confrontés, je vais prendre un exemple criant. Depuis 5 ans, nous avons déposé plainte contre une filiale de la société d'intérim Adecco parce qu'elle fichait ceux qui s'y inscrivaient sur une base ethnique afin de répondre aux demandes discriminatoires passées par les entreprises. Eh bien, en 5 ans, SOS Racisme a été entendu une seule fois par le juge d'instruction, il y a 3 semaines ! Enfin, il faut s'appuyer sur les entreprises qui acceptent de faire un réel travail de lutte contre les discriminations, c'est-à-dire celles qui analysent sérieusement pourquoi on arrive à des recrutements discriminatoires, celles qui acceptent de former leur personnel à ces problématiques...
Vous pensez que le mirage « Black Blanc Beur » s'est dissipé ?
Non, car la France, je le répète, est une société très métissée. Cette réalité montre qu'il existe donc en France un énorme potentiel de fraternité, qu'il est de notre responsabilité de savoir mobiliser. La majorité des gens aspirent à vivre ensemble, au-delà de leurs différences. Mais il est vrai que des forces tentent de pousser dans le sens inverse et ont comme projet de voir différentes parties de la population se monter les unes contre les autres. De ce point de vue-là, l'extrême droite traditionnelle et les communautaristes ont exactement la même vision de l'organisation de la société : « Chacun chez soi. » Mais je suis sûr d'une chose, c'est que ces forces réactionnaires ne gagneront pas la partie.
Quel est le bilan des opérations de testing, ces opérations qui consistent, par exemple, à envoyer un CV avec un nom bien français et le même CV avec un nom « exotique » ?
Les opérations testing nous ont permis deux choses essentielles. D'abord de montrer que les discriminations n'étaient en rien marginales en France. A chaque fois que nous organisons des testings de grande ampleur, nous trouvons l'existence de discriminations. Ensuite, les testings ont permis de doter les victimes d'actes discriminatoires d'une preuve devant les tribunaux. Car la discrimination, et c'est bien là le problème, est très difficilement prouvable. Le testing a permis de lever cette hypothèque et nous a permis d'aller devant les tribunaux, qui reconnaissent aujourd'hui cette méthode comme une preuve valable. Enfin, l'intérêt du testing, c'est aussi de montrer qu'on peut agir contre les discriminations, qu'il n'y a pas de fatalité et que nul n'est condamné à être une perpétuelle victime.


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