Qui peut se plaindre aujourd'hui de l'existence des taximen fraudeurs ? Sûrement pas les citoyens qui restent bloqués pendant des heures ne trouvant pas de taxis à partir de certaines heures de la journée, et même au niveau de certains endroits et coins de la ville, et sont par conséquent obligés de se rabattre sur les autres taximen, ceux qu'on nomme communément les « fraudeurs ». Une appellation somme toute logique et qui leur colle à la peau depuis leur apparition, car liée à l'illégalité qui caractérise leur existence. Interrogés, les taximen situent l'apparition de ce phénomène aux années 1990, où la situation sécuritaire précaire avait avantagé certaines pratiques frauduleuses et la montée en flèche du travail en noir, et ce, en l'absence du contrôle, car l'Etat était préoccupé plus par la situation sécuritaire. La situation s'est très vite développée et certaines personnes, et surtout automobilistes au chômage, ont décidé de profiter de l'anarchie régnante afin de travailler à l'abri des regards en se faisant surtout le maximum d'argent. Par ailleurs, les mesures drastiques qui accompagnent la constitution d'un dossier de taximen découragent plus d'un à travailler dans la légalité. Particulièrement la licence d'exploitation que les candidats à ce métier doivent se procurer de chez les propriétaires, c'est-à-dire moudjahidine et veuves de chahid, en les louant à des prix exorbitants. La fourchette étant entre 4500 et 6000 DA le mois, alors qu'elle était de 2000 à 3000 DA il y a à peine deux ans. Ces facteurs conjugués à d'autres charges, comme l'assurance que le candidat doit payer et qui avoisinerait les 15 000 DA pour l'année, ou le droit de parking versé à l'APC qui est de 300 DA le mois. Ces détails ont fait réfléchir plus d'un et un petit calcul simple démontre qu'il est plus avantageux - sur le plan pécuniaire - de travailler au noir que dans la légalité. L'apparition des taximen fraudeurs est due essentiellement au laisser-aller et à l'incompétence d'une majeure partie des vrais taximen, dont certains refusent de desservir certains lieux ou sont carrément absents de la circulations à certaines heures de la journée. Les exemples dans ces cas sont légion, puisque des quartiers comme Bekira, Hamma Bouziane, Gammas ou encore El Khroub et la nouvelle ville Ali Mendjli sont desservis dans la majorité du temps par les taximen fraudeurs. A Hamma Bouziane, le transport entre les quartiers de la ville est assuré exclusivement par les fraudeurs (centre-ville, cité Ghiranes). A El Khroub, les taxis des fraudeurs sont stationnés en longue file au su et au vu de tout le monde afin de desservir des communes avoisinantes, telles que Salah Derradji et Ibn Badis ou encore Aïn Abid, des endroits dont peu de taximen légaux approchent. La particularité des taximen fraudeurs est qu'ils sont prêts aussi à aller n'importe où à n'importe quel heure. Par exemple, un bonhomme qui assure la ligne centre-ville-Gammas peut se rendre à Annaba si on le lui demande. Certains sont carrément spécialisés dans les longs trajets et fonctionnent comme une entreprise (téléphone portable, carnet de rendez-vous). Nous citerons, entre autre, les taxis interwilayas où le job est plus intéressant et surtout beaucoup plus lucratif. Curieusement, ces derniers stationnent sans gêne au niveau des gares routières et certains organisent régulièrement le transport des personnes vers la Tunisie monnayant 1500 DA la place par personne. Ce qui est encore plus bizarre est que ces derniers passent la frontière plusieurs fois par semaine et jamais avec les mêmes personnes, sans jamais avoir attiré l'attention des policiers des frontières ! Il faut avouer que c'est tout de même bizarre. Une catégorie a vu le jour récemment, il s'agit des fourgons transporteurs. Ces transporteurs sont particuliers puisqu'ils ne travaillent que de nuit, s'installent au niveau des grandes artères de la ville et offrent leurs services aux citoyens. Bien sûr, ces derniers n'ont aucune licence. Enfin, personne ne se plaint de l'existence des taximen fraudeurs, puisqu'ils, qu'on le veuille ou non, travaillent certes dans l'illégalité mais soulagent beaucoup de citoyens devant la démission des autres transporteurs : taxis et bus.