Si dans un passé récent le désert en Algérie signifiait absence de vie, aujourd'hui la situation est tout autre. Car, depuis quelque temps, une véritable mutation est en train de se faire dans cette région. Dans la wilaya de Ghardaïa, deux communes de la daïra d'El Ménia, situées à 270 km du chef-lieu de la wilaya, se trouvent parmi les localités du Sud qui commencent à sortir de leur léthargie. Mieux encore, traversées par un gazoduc, elles constituent déjà un véritable centre économique sur l'axe Ghardaïa-Tamanrasset. Dominée par son ancien K'sar, qui remonte au Xe siècle, la ville d'El Ménia, de son ancien nom El Goléa, est la dernière halte imposée avant d'aborder la grande traversée du désert pour atteindre la ville de In Salah, la prochaine escale après 400 km de route. L'automne et l'hiver sont loin d'être les meilleures saisons dans cette palmeraie qui compte près de 2000 palmiers, et où les fellahs réussissent les meilleurs orangers de la contrée. L'eau est abondante, il suffit de creuser à peine 50 cm pour la voir jaillir. Aussi, on profite très bien de cette tâche verdoyante en plein désert. Les résultas cependant ne sont pas toujours satisfaisants. Les 36 km de canalisation des eaux résiduelles n'arrivent plus à être drainées vers le lac qui se trouve à Hassi El Gara (30 km d'El Ménia). Un plan d'urgence Les conséquences immédiates sont la pollution des terres par une dangereuse remontée des eaux et par conséquent des sels. El Ménia est donc à l'ère d'un plan d'urgence. Une grande quantité de palmiers sont déjà morts, tués par le sel. Durant ces deux dernières années, le conseil exécutif de la wilaya s'est déplacé, à maintes reprises, pour constater l'ampleur des dégâts, imputables à ce phénomène de la montée des eaux et voir comment remédier à cette anomalie qui ne cesse de s'accroître au fil du temps. Pour mieux comprendre l'origine de cette remontée des eaux et des sels, il suffit de savoir que la ville d'El Ménia et sa palmeraie sont ceinturées de canalisations qui drainent toutes les eaux vers « chott » (le lac). Il existe un drain principal à ciel ouvert qui consiste à éponger le surplus des eaux montantes en surface, à travers la ville. Fort heureusement même en hiver, il n'y a pas risque d'accumulation, d'évaporation et de saturation par les sels. Toutefois, dans le but de trouver une solution adéquate à cette montée dangereuse des eaux, les services de l'hydraulique de la wilaya de Ghardaïa comptent réactualiser une opération déposée depuis longtemps et qui permettrait une étude pour la réalisation d'une série de drains secondaires. Pendant ce temps, afin d'éviter un risque de débordements du drain principal, des opérations de curage se font périodiquement. Une importante enveloppe de plus de 10 millions de dinars a été allouée pour ce type d'opérations dites payantes, dans le cadre du PCD, afin d'entretenir ce drain par le biais de micro-entreprises, type Tuphimo (travaux utiles publiques à haute intensité de main-d'œuvre). C'est un travail qui nécessite aussi des moyens, dont ne dispose pas l'APC d'El Ménia, par exemple, des poclains munis de godets adaptés à ce type de travail très délicat, de façon à ne pas endommager les parois des canalisations. Car, par endroits, le niveau d'obstruction peut atteindre deux mètres. Les journées de volontariat, organisées périodiquement par les instances locales, n'ont pas donné de parfaits résultats. Alors que cette pollution de sel est, selon le P/APC d'El Ménia, le problème central de la ville, car elle menace aussi bien les terres que les habitations. Cependant, les deux communes d'El Ménia et de Hassi El Gara, qui comptent 4000 fellahs environ, vivent essentiellement de l'agriculture. Il n'est donc pas étonnant que les nouvelles dispositions sur l'accession à la propriété foncière aient été accueillies par l'engouement que l'on observe chez les fellahs. Les demandes affluent vers l'APC, plus de 200 nouvelles demandes ont été formulées. Nouvelle zone d'El Barkat Et tous les regards sont tournés vers une nouvelle zone de mise en valeur de 3658 ha qu'on connaît sous le nom d'El Barkat. Pour la direction de l'agriculture, ces hectares sont l'avenir d'El Ménia en raison de la présence de l'eau et les propriétés du sol vierge. C'est le même avis du P/APC qui ajoute l'extrême vieillissement de la palmeraie qui est morcelée à l'extrême, touffue comme une forêt sauvage et ne permettant aucune manœuvre à un tracteur. Quant au nouveau wali,Yahia Fahim, il a de suite compris la gravité du problème spécifique d'El Ménia et ses environs. Il compte désormais allouer d'importants crédits, dans le cadre des différents programmes. Ce qui permettrait d'entreprendre des actions d'envergure, telles que nous constatons maintenant. Elles permettront, d'une part, de freiner cette montée des eaux, d'éliminer complètement la pollution par l'assainissement total de la ville et de boucher les nombreux forages illicites, et d'autre part, par la réalisation d'une station d'épuration des eaux usées. Quoi qu'il en soit, le wali déclare avec fermeté que la daïra d'El Ménia ne doit plus être cette petite contrée oubliée de la wilaya de Ghardaïa. Il est vrai qu'avant le dernier découpage, El Ménia était soumise à une contrainte géographique qui la mettait hors de l'orbite des changements salutaires.Maintenant, on comprend donc mieux cette satisfaction générale avec cette nouvelle vision des choses, grâce au rapprochement du centre de décision tout près des problèmes et du suivi rigoureux de toutes les opérations nouvellement inscrites dans le cadre du développement local dans la ville d'El Ménia.