Il est des lieux où l'appellation s'impose d'elle-même. Les noms des rues sont intimement liés, aux yeux des Algériens, à la description des sites et de ceux qui y habitent. Des dénominations pour le moins originales se substituent bien souvent à l'appellation officielle. Florilège. Presque chaque commune algérienne dispose d'un quartier «Dallas», désignant les villas cossues comparables à celle de la famille Ewing du célèbre feuilleton télévisé. Les quartiers les plus pauvres n'échappent pas non plus aux surnoms populaires, d'autant que la plupart des bidonvilles ne disposent pas d'une adresse officielle. Récemment démoli, le bidonville «El Djazira» de Bab Ezzouar ressemblait véritablement à un îlot de misère au milieu d'une cité sans histoires. Dans une société où la langue populaire est très imagée, il n'y a rien d'étrange à nommer un quartier insalubre «Hai Qadra wa Keskess», comme c'est le cas à Larbaâ dans la wilaya de Blida ou «Houmat Abazine» désignant un plat de pauvres typiquement kabyle à Bejaïa. Les noms des cités sont parfois liés au climat qui y règne. Les quartiers réputés violents sont ainsi comparés aux villes irakiennes connues pour leur insécurité comme «Falloudja» (à El Harrach). Les mosquées qui semblent proches du mouvement salafiste sont naturellement baptisées «Kandahar». Le cinéma offre une panoplie d'idées de dénomination : on trouve un peu partout les cités «Chicago», «Las Vegas» et «Italia». S'il est un nom qui semble tout droit tiré d'un western-spaghetti à la Clint Eastwood c'est bien celui des «Douze Salopards» de Tizi Ouzou dont l'histoire demeure, à ce jour, énigmatique. Et puis il y a les quartiers nommés selon la forme de leurs immeubles comme «El Babor» à Belcourt, cité dans une chanson du défunt El Hachemi Guerrouabi. Dans la liste des noms les plus saugrenus figurent également «Trig Ezzaoualia» à Jijel, «Village Errih» à Sidi Bel Abbès, «Douar El Flaless» et village «Hram Allikoum» à Mostaganem.