Said Sadi, Karim Tabbou, Redha Malek, Abdelhamid Mehri, Bouguera Soltani, Ahmed Benbitour parlent d'El watan -Saïd Sadi : «Il y a dans le parcours d'El Watan une énergie, une conviction et une ambition qui ne peuvent être nourries que par le respect de son métier et de celui de son peuple» L'expérience vécue par la presse privée en Algérie est un indicateur précieux pour l'évaluation de la situation des libertés individuelles et collectives en général, et s'agissant de médias, leur état renseigne plus particulièrement sur la liberté d'expression. En la matière, un journal écrit et qui plus est francophone montre toutes les difficultés qu'il y a à accomplir sa mission dans la durée : -Contraintes institutionnelles qui réduisent de plus en plus les possibilités d'investigation, -Difficultés à recruter des journalistes ayant un niveau de maîtrise de la langue satisfaisant -Pressions financières à travers le contrôle par le pouvoir directement ou indirectement sur le marché de la publicité, -Irruption et donc aussi concurrence de la toile -Il est malheureusement presque superflu de rappeler la violence exercée par le terrorisme contre la presse. Miraculeusement, votre directeur, Omar Belhouchet, en a échappé. Beaucoup hélas n'ont pas eu cette chance. Tout cela ne participe pas en principe à favoriser la production d'une information pérenne et crédible. Et pourtant, malgré ces épreuves, il y a des titres qui jouent leur rôle de lieu de débat et d'expression libre, et parmi eux El Watan occupe une place privilégiée. Quand j'observe ses efforts et acquis, je pense au miracle algérien. Il en est de même avec les jeunes que le pouvoir a essayé d'asservir par l'école, la mosquée et les médias lourds, et qui s'avèrent être ses principaux contestataires avec cette évolution notable qui fait que, désormais, le rejet du régime ne les précipite plus vers l'intégrisme. C'est aussi grâce à des organes comme El Watan, que nos jeunes se sont interrogés avant de se retrouver pour se réaliser dans des projets structurants et positifs. Il y a dans le parcours d'El Watan, et quelques titres privés, une énergie, une conviction et une ambition qui ne peuvent être nourries que par le respect de son métier et de celui de son peuple.
-Karim Tabbou : «La ligne éditoriale du journal se veut moderniste, ouverte au débat et favorable au projet démocratique» Premièrement, je souhaite un bon anniversaire au journal El Watan. D'une manière générale, il est très difficile pour n'importe quel journal d'assumer ses responsabilités éthiques, politiques et sociales dans la situation actuelle caractérisée par un rétrécissement drastique des libertés et des espaces publiques. La question qui se pose : la presse nationale n'est-elle pas contrainte de composer peu ou proue avec le pouvoir ? Il n'y a de presse libre que dans un pays libre. La ligne éditoriale du journal se veut moderniste, ouverte au débat et favorable au projet démocratique. La vérité impose de dire que les possibilités d'accès à l'information, particulièrement en matière sécuritaire et même économique, sont limitées. Le pouvoir a tracé des lignes rouges et exerce un monopole de fait en la matière. Très souvent, les informations sécuritaires et les enquêtes économiques passent au filtre du DRS. Certaines enquêtes, concernant les faits de société, menées par le journal et la création des espaces de libre débats méritent nos encouragements et nos éloges. Pour terminer, je pense que le vrai clivage dans la presse nationale ne se situe pas entre «réconciliateurs et éradicateurs », mais fondamentalement entre les partisans de la démocratie et ceux du statu quo. Que chacun choisisse son camp. -Rédha Malek : «El Watan est devenu un journal de référence aussi bien en Algérie qu'à l'extérieur» Félicitations d'abord pour ce 20e anniversaire d'un quotidien qui est devenu indispensable et qui constitue une institution sur le plan de l'information dans notre pays. C'est devenu un journal de référence aussi bien en Algérie qu'à l'extérieur, et grâce aux efforts de son équipe rédactionnelle et éditoriale, il a pu tenir malgré les difficultés que nous connaissons. Il a traversé une période très difficile avec succès, et cela a exigé beaucoup de courage moral et beaucoup de travail dans le sens de l'objectivité et de la recherche de la vérité. C'est un journal qui a acquis une place par la clarté de sa ligne éditoriale, et en particulier dans la lutte contre l'obscurantisme et la régression, et pour l'affirmation d'une liberté d'opinion, d'expression et de conscience. Tout cela fait que ce journal continuera certainement son parcours avec de nouveaux succès et dans la voie qu'il s'est choisie, qui est celle d'une Algérie moderne et démocratique. -Abdelhamid Mehri : «Plus qu'un journal, El Watan est un repère pour les militants et citoyens qui ont soutenu, après les événements d'Octobre 1988, le projet de démocratisation de l'Etat et de la société algérienne» El Watan fête son 20e anniversaire. Je lui souhaite longue vie et bonne chance. Je lui souhaite, surtout, une vie meilleure que celle qu'il laisse derrière lui. Bien sûr, l'entreprise de presse El Watan est une réussite. Le passé du journal est marqué par des succès indéniables. Succès obtenus grâce à des efforts et des sacrifices que certains lecteurs ne soupçonnent même pas. Ces bons résultats n'ont pas empêché, heureusement, au sein d'El Watan, comme dans d'autres entreprises de presse privée, de saines discussions sur la réalité et les limites de l'indépendance de la presse et la liberté d'expression dans notre pays. El Watan, plus qu'un journal, est un repère pour les militants et citoyens qui ont soutenu, après les événements d'Octobre 1988, le projet de démocratisation de l'Etat et de la société algérienne. La parution d'El Watan et la naissance d'une presse libre étaient, dans leur esprit, les primeurs d'un printemps qui, malheureusement, tarde à venir. Ces réformes ne constituaient, dans le projet démocratique, qu'une pierre dans l'édifice sans l'achèvement duquel tous les acquis restent fragiles. Pourquoi ces réformes étaient nécessaires pour introduire le changement ? Parce qu'une presse réellement libre et une information objective sont des sources indispensables à la bonne gouvernance. Une presse de qualité contribue à dessiner, pour les responsables honnêtes et conséquents, la carte de la société qu'ils se proposent de servir et de diriger. Ils ont besoin, dans l'exercice de leur responsabilité, d'une carte authentique, réelle et complète de la société. Cette carte doit refléter l'image de la société avec ses différents courants, ses problèmes, ses inquiétudes et ses aspirations. Mais beaucoup de responsables, hélas, attendent de la presse qu'elle leur renvoie une carte arrangée de la société, conforme à ce qu'ils veulent ou imaginent. Une presse qui adhère à cette conception, louer et critiquer sur instructions. Ce faisant, elle pousse ces responsables à se tromper d'objectif ou de méthode. Beaucoup de militants de la plume en savent quelque chose et souffrent d'une telle situation qui doit absolument changer. Les journalistes et les militants politiques de toutes tendances peuvent hâter ce changement. El Watan, avec ses vingt années d'expérience, est en bonne position pour ce combat. Bonne chance. -Bouguerra Soltani : «C'est un journal qui a gardé une ligne nationaliste et crédible» Au MSP, nous sommes fiers de l'acquis de la liberté d'expression en Algérie et souhaitons longue vie aux journaux indépendants, qui ont porté le discours de la démocratie, les libertés et les droits de l'homme et qui ont participé à la lutte contre le terrorisme et contre la corruption et grâce auxquels la voix de l'Algérie a été entendue dans le monde. Nous saluons l'orientation nationaliste du journal El Watan. C'est un journal francophone qui a gardé une ligne nationaliste et crédible, ce qui lui a valu d'avoir une assise et être bien considéré par beaucoup d'instances. El Watan, qui s'intéresse aux questions politiques et sociales de l'Algérie, a aussi une vision sur l'extérieur. Il s'intéresse de près, ce qui est très positif, aux questions internationales. Nous souhaitons que le lectorat de votre journal s'élargisse davantage et le félicitons pour son vingtième anniversaire, en lui souhaitant de fêter sa centième bougie. Tout en encourageant son jeune encadrement, nous nous inclinons devant la mémoire de toutes le victimes de la tragédie nationale. -Dr Ahmed Benbitour : «Vous êtes dans la bonne voie, continuez avec courage et détermination» A l'occasion du vingtième anniversaire d'El Watan, j'aimerais remercier l'ensemble des membres de l'équipe, à leur tête Monsieur Omar Belhouchet, pour l'accueil chaleureux qui a toujours été réservé à mes contributions. Ensemble, nous avons pu éclairer les lecteurs et, par-delà les lecteurs, une grande partie de la population algérienne, sur des questions fondamentales pour l'avenir de notre pays. Je note avec satisfaction la diversification des moyens utilisés pour éclairer les lecteurs, aussi bien dans le contenu du journal imprimé et du journal virtuel que dans les instruments de débats proposés en salle et sur le Net. J'aimerais également féliciter toute l'équipe pour l'autonomie financière qu'elle a pu donner à son journal, par la crédibilité et la haute valeur du contenu. Concernant le rôle des médias dans la libre circulation de l'information et sa conséquence sur le développement économique et social, le Mahatma Gandhi disait : «L'un des objectifs de la presse est de comprendre les sentiments de la population et de s'en faire l'écho, un autre est d'éveiller en elle des sentiments louables, un troisième est d'exposer sans crainte les défauts dont elle souffre.» Amartya Sen, prix Nobel d'économie, disait, sur le même sujet : «On n'a jamais déploré de famines dans un pays indépendant doté de structures démocratiques et d'une liberté, même relative de la presse. Les famines sont associées aux royaumes traditionnels et aux sociétés autoritaires dans le monde contemporain, aux communautés tribales primitives et aux dictatures technocratiques, aux économies coloniales soumises aux puissances impérialistes occidentales et aux nouveaux Etats indépendants du Sud qui sont placés sous le régime des despotes ou de partis uniques. Elles n'apparaissent jamais dans un pays indépendant où des consultations électorales sont organisées, où des partis d'opposition expriment leurs critiques et où la presse rend compte de la situation et peut mettre en cause le bien-fondé des orientations gouvernementales sans subir une censure excessive.» Je terminerai ce témoignage avec mes souhaits de succès pour toute l'équipe. Je leur dis, vous êtes dans la bonne voie, continuez avec courage et détermination et tout le peuple algérien cueillera un jour les fruits de votre travail et du nôtre.