Les débats autour du projet de loi de finances pour 2006, présenté lundi aux députés par le ministre des Finances, Mourad Medelci, se sont poursuivis hier en plénière avec, pour principale remarque adressée au ministre, l'incapacité exprimée par nombre de députés d'assumer leur fonction de contrôle sur les finances publiques. Investis théoriquement et sur le plan légal d'un large pouvoir de contrôle sur toutes les activités du gouvernement, les représentants du peuple se disent néanmoins dépourvus des moyens leur permettant d'exercer pleinement leur rôle. « Le peuple a perdu toute confiance en ses représentants, car nos interventions n'ont plus aucune valeur et nous ne possédons aujourd'hui que ce pouvoir de discourir et de bavarder », résume avec regret le député Fellahi du mouvement El Islah. Selon lui, les membres de l'Assemblée populaire nationale, du moins certains, ont saisi tous les moyens que leur confère la loi en matière d'interpellation du gouvernement sur bon nombre d'affaires, mais ces interpellations sont restées lettre morte. « Déjà en 2003, nous avons saisi le gouvernement au sujet des crédits bancaires accordés sans garantie aucune à des tiers. La seule réponse que nous avons eue était que le moment n'était pas opportun pour étaler ce genre d'affaires. » Abdelaziz Hamlaoui, un député du même parti, emboîte le pas à son collègue et dira : « Le député ne bénéficie aujourd'hui d'aucun pouvoir de contrôle ni à travers les commissions d'enquête prévues par la loi ni à par les questions orales ou écrites posées aux représentants du gouvernement. » Il en veut pour preuve les différents rapports transmis aux autorités et qui sont restés sans suite bien qu'ils concernent des affaires de « dilapidation de deniers publics, détournements du foncier et autres scandales financiers ». Plus grave encore, le député indépendant Mohammed Araïbi, de la wilaya de Chlef, affirme avoir reçu 19 plaintes contre sa personne pour avoir, justement, dénoncé des malversations et des pratiques frauduleuses. Par ailleurs, le recours à un prix de référence de 19 dollars le baril de pétrole dans l'élaboration de la loi de finances de 2006 a été, encore une fois, évoqué par certains députés comme étant une mesure pour le moins « décevante », pour reprendre les termes d'Ahcen Farek, député FLN. Ce dernier estime qu'« aucune explication ne pourra convaincre les citoyens du bien-fondé de ce choix, au moment où les prix du pétrole ne sont pas descendus, depuis trois ans, au- dessous de 40 dollars le baril ». Au plan social, les interrogations des députés se sont articulées autour de certaines mesures qui pourraient avoir des répercussions négatives à l'exemple des « surtaxes prévues sur le diesel » ou « les nouvelles mesures fiscales concernant les transactions de véhicules d'occasion ». L'absence, dans le projet de loi de finances, d'une quelconque indication sur une éventuelle augmentation des salaires a été défavorablement accueillie par les députés. Ils étaient quasi unanimes à s'interroger sur l'utilité des fonds créés depuis quelques années et de l'argent qui y est accumulé si le peuple n'en profite pas et ne ressent pas les effets positifs de l'embellie financière de ces dernières années. La création de plus de 22 000 postes budgétaires pour la Fonction publique, prévus dans le projet de loi de finances, ne saurait endiguer, de l'avis de certains députés, « ce chômage de plus en plus lourd de conséquences sur la situation sociale de milliers de jeunes ». Le ministre des Finances avait indiqué lundi que le projet de loi accorde une importance particulière au volet social, les transferts sociaux passant à 512 milliards de dinars, en hausse de 13% par rapport à 2005. « Les transferts sociaux représentent 19,5% du budget de l'Etat pour 2006 et plus de 50% de celui de 1999 par exemple et ce sont les secteurs du logement et de la famille qui en bénéficient le plus », a-t-il dit en notant que « 10 millions de centimes en moyenne sont consacrés annuellement à chaque famille démunie ».