Rendez-vous avec l'histoire pour plusieurs milliers de Tunisiens de France qui ont organisé, hier, une marche de solidarité avec leurs frères du pays et en hommage aux martyrs tombés sous les balles assassines de l'ancien régime de l'ex-président Ben Ali. Paris. De notre correspondant «Fiers d'être Tunisiens», «Tunisie, belle et rebelle», «Ben Ali sans domicile fixe», «Leïla Ben Ali, coiffeuse et voleuse», «Trabelsi en prison»… autant de slogans scandés lors de la marche qui a débuté de la place de la République (2e arrondissement de Paris) jusqu'à celle du Châtelet (4e). Sur place, de nombreux orateurs, essentiellement des opposants à l'ancien régime de l'ex-maître de Carthage, ont fait des discours. Ils ont salué la résistance héroïque du peuple tunisien, fatigué et malmené durant 23 ans de règne par un clan de «voyous sans scrupules et sans état d'âme». Le pouvoir français en a également pris pour son grade. Les intervenants ont violemment critiqué la position du président Sarkozy qui a refusé de condamner clairement ce qui s'est passé ces derniers jours dans le pays du Jasmin. «Gouvernement français, cessez votre baratin. La Tunisie appartient aux Tunisiens», pouvait-on d'ailleurs lire sur une banderole. Pour Sarah, une jeune étudiante en gestion, jamais elle n'a imaginé que pareil jour pouvait arriver. «Je n'arrive pas encore à croire que le dictateur Ben Ali soit parti à jamais. C'est comme un rêve qui devient soudainement réalité. Je suis heureuse car je sais maintenant que je retournerai dans mon pays après mes études, alors qu'avant je voulais rester ici en France.» L'avis de Imed, un Tunisien de 46 ans, n'est pas très différent de celui de Sarah. Ingénieur en électronique chez Alcatel, il attend juste que les choses rentrent dans l'ordre pour plier bagages. «Je veux créer une entreprise dans mon pays. Avec le prochain nouveau président et gouvernement, je suis sûr qu'on aura toutes les aides nécessaires et les facilités pour se lancer. Et en plus, il y aura moins de bureaucratie et plus de droits» C'est l'espoir de tous les Tunisiens qui craignent tout de même que les islamistes ne s'invitent dans le jeu politique. D'ailleurs, certains militants d'Ennahdha n'ont pas hésité a crier «Allah ouakbar» en plein Paris et à réciter la première sourate du Coran «la Fatiha». «Il y a effectivement une crainte que les ‘'barbus'' récupèrent tout», estime Maha, une journaliste. «J'ai peur que nous vivions le scénario qu'ont vécu les Algériens avec des islamistes qui bloquent la vie politique et qui empêchent les gens de vivre librement et de rentrer dans la modernité.» Et de souhaiter que les choses bougent aussi au Maghreb qui doit changer et se démocratiser. «Après la Tunisie, viendra le tour de l'Algérie», souhaite-t-elle.