Il n'y a pas si longtemps, Alain Finkielkraut était de tous les combats démocratiques, de toutes les manifestations pour les libertés. Puis il s'est érigé en censeur, en donneur de leçons. Aujourd'hui, il a franchi le Rubicon. Il s'attaque aux Noirs et aux Arabes. Ses propos dans le journal israélien Haaretz auraient pu être tenus par Jean-Marie Le Pen. Pour Alain Finkielkraut, « on voudrait réduire les émeutes des banlieues à leur dimension sociale, y voir une révolte de jeunes contre la discrimination et le chômage. Le problème, c'est que la plupart sont noirs ou arabes, avec une identité musulmane. En France, il y a d'autres émigrants en situation difficile. Ils ne participent pas aux émeutes. Il est clair que nous avons affaire à une révolte à caractère ethnico-religieux. (...) Il s'agit d'un pogrom antirépublicain : il y a en France des gens qui haïssent la République ». Très en verve, il se moque du métissage, version Bleus. « On nous dit que l'équipe de France est admirée parce qu'elle est black-blanc-beur. En fait aujourd'hui, elle est black-black-black, ce qui fait ricaner toute l'Europe. » « Et de prôner, lui aussi, les bienfaits du colonialisme. Eux (les jeunes de banlieue) et ceux qui les justifient disent que cela provient de la fracture coloniale. Le principal porte-parole de cette théologie, c'est Dieudonné, qui est le vrai patron de l'antisémitisme, et non le Front national. Mais au lieu de combattre son discours, on fait précisément ce qu'il demande : on change l'enseignement de l'histoire coloniale et de l'esclavage. Désormais, on enseigne qu'ils furent uniquement négatifs, et non que le projet colonial entendait éduquer et amener la culture aux sauvages. » Le philosophe s'en prend aussi à l'antiracisme. « Un Arabe qui incendie une école, c'est une révolte. Un Blanc, c'est du fascisme. Bien sûr qu'il y a une discrimination, et il y a certainement des Français racistes, des Français qui n'aiment pas les Arabes et les Noirs, et ils les aimeront encore moins maintenant quand ils prendront conscience de la haine qu'ils leur vouent. L'idée généreuse de guerre contre le racisme se transforme petit à petit monstrueusement en une idéologie mensongère. L'antiracisme sera au XXIe siècle ce qu'a été le communisme au XXe », compare le philosophe. Sans commentaire. Qu'est-ce qui a pris Alain Finkielkraut ? Les excuses de l'essayiste français arrivent trop tard. « Je présente des excuses à ceux que ce personnage que je ne suis pas a blessés. La leçon, c'est qu'en effet je ne dois plus donner d'interview, notamment à des journaux dont je ne contrôle pas ou je ne peux pas contrôler le destin ou la traduction. Je n'ai en moi aucun mépris ou de haine à l'égard de quelque collectivité que ce soit. Je me sens solidaire par vocation des nouveaux immigrés en France, notamment des immigrés de la deuxième ou troisième génération. » Pourquoi ce mea-culpa ? Le Mrap, mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples, a décidé de renoncer à sa plainte contre le philosophe pour incitation et provocation à la haine raciale après des propos sur la crise des banlieues publiés dans le quotidien israélien Haaretz.